entretien avec l’écrivain suisse Joël Dicker, un phénomène éditorial mondial

Depuis « La Vérité sur l’affaire Harry Quebert », il est devenu une rock star de l’édition, avec plus de 15 millions de livres vendus dans le monde et traduits en 40 langues. Il est également l’écrivain le plus suivi en France sur Instagram et sur TikTok. Entretien avec l’écrivain suisse Joël Dicker, de retour avec «Un Animal sauvage» (Rosie et Wolfe), un thriller captivant qui s’est hissé en tête des ventes dès la première semaine. Il nous explique comment il travaille.

Vous êtes de retour avec « Un Animal Sauvage », un roman raffiné, addictif, un « page turner », entre huis clos et allers-retours dans le temps, je vous laisse faire le pitch, en une phrase…

En une phrase tu es dur ! Je dirai : comment, en suivant pas à pas, le braquage d’une bijouterie, on découvre deux couples d’amis qui vont s’affronter, puisque l’un est braqueur, l’autre est flic. Je vous dévoile un peu l’histoire…

L’intrigue est diabolique, où puisez-vous votre inspiration ?

C’est le plaisir de gratter, de creuser… Je n’imagine pas un livre de 400 pages. Ce sont plutôt des petits bouts d’idées que j’agrège et qui, petit à petit, font une histoire. Parfois ça marche, parfois non, ça m’énerve, ça prend du temps, mais j’aime être dans ce tas de petites briques…

Vous ne dessinez jamais de votre quotidien ?

Jamais, ce que j’aime c’est inventer. L’inspiration des auteurs vient généralement aussi d’expériences de vie, mais en aucun cas je ne m’inspire consciemment de personnes que je connais.

« Un animal sauvage », le nouveau livre de Joël Dicker.
Rosie et Wolfe

Votre processus d’écriture a-t-il évolué depuis votre premier livre ?

Je peux faire davantage confiance à mon instinct, j’ai un meilleur contrôle sur ce que je fais.

En revanche, ce qui n’a pas changé, c’est ce plaisir de ne pas savoir, cette façon de travailler complètement sans plan, cette quête de l’intrigue et des personnages.

Avez-vous des rituels ?

J’écris très peu au café, ou dans le train, j’aime m’isoler, c’est là que je suis le mieux. J’ai un petit bureau où je m’enferme, cela me permet de créer une bulle dans laquelle je m’immerge dans l’univers de ma fiction. Et je mets de la musique, ça peut être du jazz, de l’opéra, du rock.

Une musique sans paroles, ou du moins pas en français, car c’est la langue dans laquelle j’écris et cela me dérange.

Quels sentiments vous traversent lorsque vous écrivez ?

Je suis lecteur de mon propre livre, j’y suis, je le découvre, je me pose les questions que se pose le lecteur, j’adore ça !

Après 15 millions de livres vendus, vit-on la sortie d’une œuvre de la même manière ?

J’ai toujours le trac, cette inquiétude : est-ce que ça plaira aux gens ? Vont-ils comprendre ce que je voulais faire ?

S’il n’y avait pas ce petit doute il serait inquiétant, il est là pour vous faire avancer et vous faire travailler plus fort…

Vous êtes aujourd’hui devenue une rock star de l’édition, l’un des auteurs francophones les plus vendus au monde, comment vivez-vous ce statut ?

J’ai les mêmes amis, je vis dans la même ville, mon quotidien a peu changé.

Et puis on ne voit pas vraiment les lecteurs, ce n’est pas comme un musicien qui fait face à son public tous les soirs, il y a une relation plus distante, dans le bon sens du terme, plus douce. D’ailleurs quand je les rencontre, ils ne me disent jamais qu’ils m’aiment, qu’ils aiment mes livres… Ce parti-pris est apaisant.

Vous voyez encore les files d’attente qui s’allongent lors des dédicaces de livres, vous communiquez également avec eux sur les réseaux sociaux.

C’est effectivement important pour moi de leur parler, on a la chance de pouvoir toucher les gens sur les réseaux et c’est pour parler littérature !

Ce qui me touche le plus, ce sont les lecteurs qui me disent « j’étais dans un moment difficile de ma vie, grâce à vous, au moment où j’ai lu votre livre, je m’en suis un peu sorti ».

Et vous, quel est votre roman policier préféré ?

Je dirais « The Gun in the Eye » de Ken Follett.

Votre livre de chevet ?

Peut-être « La Promesse de l’aube » de Romain Gary.

Vous êtes désormais également à la tête de votre propre maison d’édition, Rosie and Wolfe, qui, selon la presse, est entourée de mystère, quel rôle y jouez-vous ?

Je suis le patron, je l’ai créé, mais je ne suis pas monteur dans le sens où j’ai une équipe autour de moi. Et je vous rassure, ce n’est pas moi qui lis et corrige mes textes !

Vous avez publié deux auteurs jusqu’à présent, qui sera le prochain ?

Ce sera un livre passionnant, « War in Darkness », un essai historique d’un journaliste anglais appelé Patrick Marnham, qui sera publié le 23 mai. Il a écrit ce livre en anglais, je le traduis.

Celui-ci raconte les liens entre Londres et la Résistance en France, notamment autour du réseau Prosper et de Jean Moulin. C’est un livre fascinant qui se lit comme un roman.

Quels conseils donneriez-vous à un auteur souhaitant être publié ?

Je lui dirai de trouver un éditeur dans la même veine que le texte qu’il a écrit. L’important est de voir s’il a publié des ouvrages qui peuvent faire réfléchir à ce qu’il écrit.

L’éditeur doit trouver un lien avec ses collections. Envoyer un manuscrit à tout le monde est souvent contre-productif. D’autant que chaque refus est décourageant.

Quels sont vos projets maintenant ?

C’est l’écriture, il y a toujours un texte sur lequel je travaille. Mais je ne sais pas encore ce que ce sera.

Pas de projet de nouvelle adaptation, après la série internationale consacrée à Harry Quebert, ou d’incursions dans d’autres domaines ?

Pas pour le moment…

Votre trilogie (« La vérité sur l’affaire Harry Quebert », « Le Livre de Baltimore », « L’Affaire Alaska Sanders ») vient de sortir en livre de poche. Retrouvera-t-on certains de ses personnages dans un futur roman ?

Je ne peux vous faire aucune promesse. Il est également important que cela ait du sens. Un jour j’aurai envie de faire ressortir un ou plusieurs personnages de la trilogie, peut-être…

« Un animal sauvage », de Joël Dicker, est sorti le 27 février chez Rosie & Wolfe (398 pages, 23 euros).
 
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