En 2019, les studios Disney nous proposaient une adaptation du Roi Lionle classique de Roger Allers et Rob Minkoff, en images de synthèse. Prise de risque quasi nulle dans la mesure où le scénario était une copie conforme, pratiquement, du film qui a bercé notre enfance. À tel point que cette nouvelle version de Jon Favreau a facilement réussi à rapporter 1,6 milliard de dollars aux producteurs. Ce fut un succès commercial indéniable.
Cinq ans plus tard, à l’occasion du trentième anniversaire du film d’animation original de 1994, le réalisateur Barry Jenkins a la lourde tâche de succéder à Jon Favreau avec Mufasa : le roi lion. Un défi, étant donné que cette histoire est totalement inédite et ne s’inspire en aucun cas des différentes itérations 2D qu’a connues la saga : Le Roi Lion 2 : L’Honneur de la Tribuen 1999, et Le Roi Lion 3 : Hakuna Matataen 2004.
Sans grande surprise, le film de Jenkins rassemble trois tendances actuelles des studios Disney : l’acclimatation froide et désincarnée au tout numérique, le prequel facile et commercial et – bien sûr – la déconstruction des mythes d’antan…
L’avènement d’un nouveau roi
L’histoire imagine le sage Rafiki racontant à Kiara, fille de Simba et Nala, l’ascension de Mufasa, son grand-père paternel, assassiné par Scar dans le premier film. Ponctuée par les excentricités de Timon et Pumbaa, cette histoire sous forme de flashbacks nous raconte comment Mufasa, un jeune lionceau orphelin, fut recueilli et adopté par la famille royale sur l’insistance de son nouveau frère, le prince Taka, futur Scar ( !). Qui est destiné, un jour, à devenir roi… Mais c’est sans compter la tribu rivale, dirigée par Kiros, qui compte bien s’emparer du territoire. Comme prévu, Mufasa réussira dans les extrêmes pour sauver la situation et faire de l’ombre à Taka qui, dès lors, se laissera envahir par la jalousie et la haine envers son frère adoptif…
Méritocratie contre légitimité
Si le film original et son remake de Jon Favreau n’hésitaient pas à mettre en avant le principe monarchique et revenaient sur les qualités évidentes d’un tel régime, la suite de Barry Jenkins choisit au contraire de malmener ses fondements en mettant à mal la lignée de Mufasa qui, on le sait, apprend avec horreur, n’est plus de sang noble mais se révèle être un lionceau adopté, un simple roturier. Comprenez par là que le principe de continuité de la famille royale à travers les siècles – dont les intérêts recoupent naturellement ceux de la nation – est obsolète, seule la méritocratie (républicaine ?) devrait départager les individus. Ainsi, le Taka légitime n’est plus aussi légitime pour accéder au pouvoir, et Mufasa est invité à prendre sa place (!).
Un film raciste ?
On note également d’autres discours politiques sous-jacents : le cinéaste afro-américain présente la tribu rivale – les méchants – comme celle des lions blancs (!) aux visées expansionnistes et guerrières. Il est également très intéressant de noter que les héros sont doublés par des acteurs noirs, tandis que l’antagoniste Kiros, cruel et menaçant, est doublé par un homme blanc, le Danois Mads Mikkelsen (!). On se demande comment ce dernier – connu pour son opposition aux discours politiquement corrects – a pu être convaincu de participer à un tel projet…
Enfin, le film de Barry Jenkins termine son récit avec un plan de la princesse Kiara surplombant le territoire de son futur royaume – le pouvoir, semble-t-il, reviendra un jour aux femmes…
2 étoiles sur 5
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