Voici la solution pas chère pour rendre l’avion propre

Il existe une technologie pour voler au vert.Image : www.imago-images.de

Les carburants synthétiques, produits à partir du CO2 extrait de l’atmosphère, permettraient de décarboner l’aviation sans faire exploser les prix des billets d’avion, selon une nouvelle étude. Leur fabrication à grande échelle s’annonce cependant très complexe.

Les acteurs du secteur aéronautique ne cessent de le répéter : l’aviation ne polluera plus d’ici 2050. Cela aura un coût. En effet, la plupart des experts conviennent que la décarbonation du transport aérien fera augmenter le prix des billets. Une étude réalisée par des chercheurs de l’ETH Zurich et de l’Institut Paul Scherrer, publiée début janvier, a tenté de chiffrer l’ampleur de cette augmentation.

Pour ce faire, nous devons d’abord déterminer quelle est la meilleure technologie permettant à l’aviation d’atteindre la neutralité climatique. Les solutions les plus souvent évoquées – les biocarburants, mais aussi les avions électriques et à hydrogène – posent des problèmes aujourd’hui quasiment insurmontables. Les chercheurs ont donc exploré une autre voie : Captage du CO2.

Cette technologie consiste à extraire le CO2 présent dans l’atmosphère et le stocker sous terre. Les gaz polluants ainsi éliminés de l’air pourraient compenser ceux générés par le kérosène des avions – c’est la première solution explorée par l’étude. Le second envisage de combiner le CO2 capturé dans l’atmosphère avec l’hydrogène pour produire des carburants synthétiques. Ces derniers sont compatibles avec les moteurs d’avions, et n’émettent que du CO2 utilisé pour les fabriquer.

Selon les auteurs de l’étude, la deuxième option est la meilleure : elle permet d’atteindre la neutralité climatique à moindre coût que la première. Il s’agirait alors de remplacer progressivement les énergies fossiles par ces carburants de synthèse. Et ce, au niveau mondial. Concrètement, cette solution augmenterait le prix des billets de 45 à 60 %.

La société suisse Climeworks est spécialisée dans le captage du CO2 dans l’atmosphère.Image : CLÉ DE CLÉ

«Lorsque nous examinons cette augmentation potentielle, nous devons tenir compte du fait que les tarifs aériens ont chuté de plus de 40% au cours des 25 dernières années», explique Anthony Patt, professeur de politique climatique à l’ETH Zurich et co-auteur de l’étude. .

« Si cette tendance devait se poursuivre, un vol climatiquement neutre en 2050 coûterait à peu près le même prix qu’un vol aujourd’hui »

Anthony Patt

Oui, mais…

Même si ce scénario n’augmenterait que « légèrement » le prix des billets d’avion, notent les auteurs de l’étude, sa mise en pratique semble tout sauf simple.

De nombreux obstacles se dressent sur son chemin. Tout d’abord, “les carburants synthétiques de ce type sont pratiquement inexistants aujourd’huià l’exception de quelques start-up et usines de démonstration», explique Nicoletta Brazzola, chercheuse à l’ETH Zurich et auteure principale de l’étude.

L'usine de production Synhelion, Allemagne.

Le centre de production de la start-up Synhelion, en Allemagne.Image : Synhélie

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Leur production doit donc augmenter massivement. Sauf que cela nécessite beaucoup d’électricité, qui doit provenir de sources durables. Pour répondre pleinement à la demande mondiale de carburants synthétiques, l’étude estime qu’il faudrait 15 PWh d’électricité d’ici 2050, soit près du double de la production mondiale d’énergies renouvelables en 2021. « Il s’agit d’un « défi sans précédent », résume Nicoletta Brazzola.

Un autre problème est d’alimenter la production de ces carburants 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 avec de l’électricité bon marché, poursuit-elle :

“Les investissements pour la production de ces carburants étant élevés, ils doivent fonctionner quasiment sans interruption pour être économiquement attractifs.”

Nicoletta Brazzola

Selon les auteurs de l’étude, l’énergie solaire et l’énergie éolienne offrent les coûts les plus bas. Cependant, ils nécessitent beaucoup d’espace, ce qui soulève d’autres difficultés. « Il est imaginable de produire ces carburants dans des pays dotés d’un énorme potentiel en termes d’énergies renouvelables et d’une faible demande intérieure en énergie, comme le Chili, l’Islande ou Oman », recommande Nicoletta Brazzola.

“Mais il est peu probable que la production soit possible partout, comme en Europe”, ajoute-t-elle. Sur notre continent, la demande est élevée, l’espace est limité et le potentiel d’énergies renouvelables supplémentaires diminue à mesure que nous décarbonons d’autres secteurs.

Est-ce faisable ?

Au vu de ces éléments, on peut se demander si cette solution est réellement réalisable. « Cela dépend de la définition du terme réalisable », répond le chercheur.

“Il sera incroyablement difficile de faire évoluer ces technologies pour propulser tous les vols, surtout si l’aviation continue de croître”

Nicoletta Brazzola

Il existe cependant d’autres solutions pouvant contribuer à réduire l’impact de l’aviation sur le climat, ajoute-t-elle. La première consiste simplement à voler moins. « Les carburants synthétiques pourraient alors n’être nécessaires qu’à une échelle réduite, ce qui est plus facile à réaliser. »

Nicoletta Brazzola rappelle enfin que « l’Europe s’est fixé dès cette année des objectifs pour l’utilisation de ces carburants dans l’aviation ». Des accords ont déjà été conclus. C’est le cas de Swiss, qui s’est associée à la start-up suisse Synhelion et qui promet de devenir « la première compagnie aérienne au monde à utiliser du carburant solaire ». À suivre.

 
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