Lors de son premier mandat, entre 2017 et 2021, le nouveau locataire républicain de la Maison Blanche a tenté de faire interdire le réseau social chinois. C’était avant de comprendre comment TikTok pouvait servir ses propres intérêts…
Par Thomas Bécard
Publié le 20 janvier 2025 à 16h50
«GGrâce aux efforts du président Trump, TikTok est de retour aux États-Unis ! » Les utilisateurs américains de l’application chinoise n’ont eu qu’à subir une douzaine d’heures d’interruption d’accès avant de voir cette notification apparaître sur l’écran de leur téléphone. En se rendant inaccessible sur le territoire des Etats-Unis, ce 19 janvier juste avant minuit, TikTok avait décidé d’anticiper d’un jour l’entrée en vigueur de la loi (tout juste validée par la Cour suprême) qui l’oblige à revendre ses activités américaines. sous peine d’être banni. Avant de rapidement inverser le cap et rétablir l’accès. Un joli bluff, sans doute, car le réseau social savait que son nouvel ami, Donald Trump, n’allait pas le laisser tomber comme ça.
En 2020, lors de son premier mandat présidentiel, Trump considérait pourtant qu’il fallait “agir contre la menace posée” par TikTok : l’application « capture automatiquement de vastes pans d’informations sur ses utilisateurs, liées à leurs activités sur Internet, telles que les données de localisation, l’historique de navigation et de recherche. Ces données seront probablement accessibles au Parti communiste chinois. a détaillé le décret présidentiel qui voulait déjà interdire à ByteDance, la société propriétaire de TikTok, toute activité sur le territoire américain – ce décret sera par la suite bloqué par un juge fédéral.
Une proposition baroque
Quatre ans plus tard, en décembre 2024, le discours de Trump était complètement différent. “J’ai un gros faible pour TikTok, car j’ai gagné le vote des jeunes par trente-quatre points, et certains pensent que TikTok a quelque chose à voir avec ça”a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse. Celui qui était alors candidat à un second mandat s’était lancé assez tardivement sur le réseau social, en juin, en postant une première vidéo de lui assistant à une compétition de MMA dans le New Jersey. Trois jours plus tard, il comptait déjà cinq millions d’abonnés à son compte (il y en a désormais quinze millions), soit dix fois plus que Joe Biden, qui avait commencé à utiliser TikTok quelques mois plus tôt. De quoi effectivement donner envie de ne pas se passer d’une telle résonance médiatique.
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Dimanche 19 janvier, lors de son « meeting de la victoire » à Washington, Trump a récidivé en rendant hommage à l’influenceur de 22 ans, un certain « TikTok Jack » (de son vrai nom Jack Advent), qui lui avait conseillé de s’aventurer sur la plateforme. : « Jusqu’alors, les Républicains n’avaient jamais conquis le suffrage des jeunes électeurs. Et là, on a gagné par trente-six points (1). Donc j’aime TikTok. J’ai eu une bonne expérience, tu ne trouves pas ? » Il a ensuite expliqué qu’il allait signer, dès sa prise de fonction ce lundi, un décret pour donner un délai avant que l’interdiction de TikTok n’entre en vigueur, le temps de trouver un accord avec ByteDance.
Son idée ? « Une coentreprise [coentreprise, ndlr] entre les propriétaires actuels et/ou les nouveaux propriétaires, dont les États-Unis détiendraient 50 % des actions. » Une proposition baroque (mais on n’en est plus proche), dont on n’est pas tout à fait sûr de comprendre comment elle résoudrait tous les problèmes de sécurité des données. D’autres experts se sont également montrés sceptiques quant à la mise en œuvre de ce délai de grâce proposé par Trump, alors que TikTok n’a encore engagé aucun mouvement vers une éventuelle vente. Et tant que rien n’est fait, « Toute entreprise qui héberge, distribue, assiste ou facilite de toute autre manière le TikTok sous contrôle communiste pourrait faire face à des centaines de milliards de dollars de responsabilité en vertu de la loi »a rappelé le sénateur républicain Tom Cotton.
On verra donc très vite si Trump est capable de tenir parole. En attendant, parmi les invités à la cérémonie d’investiture du nouveau président, aux côtés d’Elon Musk, Mark Zuckerberg ou encore Jeff Bezos, Shou Zi Chew, le directeur général de TikTok depuis 2021, devrait figurer en bonne place. Lui, qui avait déjà rencontré Trump dans sa résidence de Mar-a-Lago (Floride) en décembre, a posté il y a quelques jours une courte vidéo dans laquelle il ne manquait pas de remercier son probable futur bienfaiteur : « Nous sommes reconnaissants et heureux d’avoir le soutien d’un président qui comprend parfaitement notre plateforme. »