New York, 6 février 1954. Le Salon international du sport automobile ouvre ses portes et Mercedes-Benz veut frapper un grand coup pour séduire le public américain. A l’époque, le marché américain représentait déjà un gros débouché pour les constructeurs allemands.
Les Américains adorent les voitures et ont le pouvoir d’achat nécessaire pour acheter des voitures de sport coûteuses. Encore faut-il les fournir.
La surprise
Porsche vend ses 356 comme des petits pains. Mais Mercedes-Benz voit plus grand, plus cher et plus classe.
Dès le premier jour du salon, Mercedes-Benz lève le voile sur une voiture que personne n’attend. Présentée sur un socle rond légèrement surélevé, et recouverte d’un tissu soigneusement drapé, la voiture arbore la calandre de la marque ornée de l’étoile, mais tout le reste est neuf.
Portes papillon
Il n’a jamais été vu en série avec une forme effilée et arrondie, dont chaque centimètre semble avoir été conçu pour fendre l’air. Mais ce que retient le public présent, c’est la présence de portes papillon, uniques à l’époque sur un véhicule de série et qui fascinent encore aujourd’hui.
La 300 SL est née et elle a déjà tous les atouts d’un futur classique. En comparaison, la deuxième nouveauté située juste à côté, la 190 SL, passerait presque inaperçue.
Une voiture ambitieuse
Outre la présence de ces portes papillon, le W198 (son nom de code) possède bien d’autres caractéristiques uniques.
Le véhicule présente une répartition idéale du poids et un moteur six cylindres innovant. La suspension est particulièrement travaillée pour obtenir un comportement sportif.
La SL 300 est la première voiture de série au monde à être équipée d’un moteur à quatre temps à injection directe.
Ce mélange innovant a augmenté la puissance du moteur d’environ 25 %, passant de 125 kW (170 ch) à 158 kW (215 ch) pour la voiture de sport automobile. Le résultat fut une vitesse de pointe de 250 km/h, une performance vraiment extraordinaire au milieu des années 1950.
Un ADN compétitif
Sur le plan de la forme, la 300 SL correspond à la voiture de course du même nom de 1952, avec laquelle Mercedes-Benz a fait un brillant retour dans le sport automobile.
Mille Miglia, 24 Heures du Mans, Carrera Panamericana : les victoires dans les compétitions automobiles les plus prestigieuses du monde sont inscrites dans les gènes de la voiture de série de 1954.
Les portes qui s’ouvrent vers le haut de la nouvelle 300 SL sont également issues de la voiture de sport automobile (W 194). La variante Coupé reçut cependant son propre numéro de série : elle fut baptisée W 198.
Un gadget ?
On pourrait imaginer que les portes papillons étaient une astuce marketing. C’était avant tout une nécessité technique. Comme la voiture engagée en compétition, la 300 SL dispose sous la carrosserie d’un cadre tubulaire léger mais très résistant.
Celui-ci étant relativement haut sur les côtés, il rend impossible l’ouverture latérale des portes de conception conventionnelle. Mercedes trouvera donc cette solution de portes s’ouvrant vers le haut.
Une caractéristique unique qui séduit le public qui lui donne rapidement des surnoms. Les Américains l’appellent « Gullwing » et les Français « Papillon ».
Un peu d’air
L’architecture particulière des portes rend impossible l’installation de fenêtres pliantes. Pour prendre l’air, les propriétaires peuvent retirer les vitres et les ranger dans le coffre. L’apport d’air frais se faisait donc « tout ou rien ».
Il y avait également de petits feux de custode arrière rotatifs pour faciliter la ventilation. L’accès à bord n’étant pas aisé, le volant pouvait pivoter pour faciliter l’accès des jambes au plancher.
A noter que le modèle suivant, le Roadster 300 SL, apparu en 1957, aura des portes avant battantes avec un châssis modifié.
Un autre conseil est la poignée de porte extérieure intégrée. Un détail repris 70 ans plus tard par Mercedes et bien d’autres marques.
Un grand classique
Après cette présentation, Mercedes a réussi. La « Gullwing » attire facilement une clientèle du monde entier, dans le segment très exclusif des supersportives.
La 300 SL Coupé a été produite à 1 400 exemplaires entre 1954 et 1957, suivie du Roadster avec 1 858 unités supplémentaires.
Chaque 300 SL était déjà une icône à l’époque et continue de fasciner encore aujourd’hui.