Dans la microrégion, des experts de viande sont nombreux. Juste Ghisonacciail y a quatre bouchers qui partagent une clientèle fidèle. Une grande présence pour une demande qui reste solide année après année.
Et pour cause, depuis quelques années, les grandes surfaces ont pris le virage de la qualité. Maintenant, ils incluent bouchers traditionnelsoù la viande n’est pas seulement un produit, mais une expérience.
« Nous travaillons comme dans une boucherie artisanale. Nous découpons les carcasses sur place, rien à voir avec les morceaux sous vide », assure Nicolas Cavagnara, boucher au Spar de Ghisonaccia.
Une situation adaptable
Une montée en gamme qui n’inquiète pas les artisans locaux : “Nous n’avons pas la même clientèle” tranche Dumè-Marie Guidicelli, boucherie artisanale de Ventiseri.
Pour elle, la concurrence des supermarchés est un faux problème. Les deux modèles se complètent plus qu’ils ne s’opposent. “Les clients viennent chez nous pour des produits et des conseils spécifiques qu’ils ne trouvent pas ailleurs. ajoute-t-elle.
Alors pour ce personnel restreint, il n’en faut pas plus : « Aujourd’hui, ce rythme nous convient très bien. Nous ne pouvons pas suivre un rythme estival toute l’année. » explique le boucher.
Un constat qui pourrait paraître prétentieux. Mais pour comprendre ce succès, il suffit de le contextualiser. La plaine orientale est une terre agricole où la viande tient une place centrale.
« Ici, les familles de bouchers sont souvent issues d’éleveurs. Nous sommes le pilier de l’élevage corse, nous avons toujours mangé de la viande. » dit Nicolas Cavagnara. A l’approche de Noël, c’est l’effervescence dans les boucheries de la plaine orientale. Après un été marqué par les brochettes et les grillades, cette semaine cruciale est à ne pas manquer. Les commandes explosent et les produits phares s’arrachent.
« Les 23 et 24 décembre, nous avons dépassé les 180 commandes. Tout doit être parfait. » révèle Dumè-Marie Guidicelli.
Au Spar de Ghisonaccia, Nicolas Cavagnara est venu en renfort pour faire face à cette demande exceptionnelle. « C’est une période intense, mais essentielle. Entre volailles farcies, tournedos et foie gras, les clients veulent le meilleur pour leurs repas de fêtes. »
La viande est donc un produit festif. Tant qu’il y aura des fêtes, il trouvera sa place sur les tables corses. Néanmoins, les fêtes se réinventent, et ce, de manière plus générale.
Pour le président des bouchers de Haute-Corse, ce Noël est bien différent : « Nous vendons moins de chevreaux et d’agneaux qu’avant, mais plus de rôtis. Je n’ai jamais vu ça, » Louis Constant est surpris.
Quant à l’inflation, elle n’a pas complètement brisé la dynamique.
« Les clients ajustent leurs achats, mais ils continuent de rechercher, peut-être encore plus qu’avant, des produits qui valent leur prix. » ajoute l’employé de Spar.
Ainsi, lorsqu’il s’agit de planification, les finances passent au second plan après un facteur encore plus inquiétant : le travail.
« Le problème n’est pas économique, c’est surtout qu’on manque de bouchers qualifiés. Il y a beaucoup d’offres ici, mais peu de jeunes choisissent ce métier. déplore Nicolas Cavagnara. Mais face à ce défi, Louis Constant tempère : « La qualité doit rester la priorité. Former massivement des jeunes n’a aucun sens si nous ne leur donnons pas les outils nécessaires pour être véritablement qualifiés.»
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