Une analyse récente de Bank Al-Maghrib (BAM) révèle l’impact notable de la hausse des coûts du transport maritime sur l’inflation au Maroc entre 2012 et 2022. A travers des baromètres comme Harpex et Baltic, la Banque Centrale démontre que les effets persistent jusqu’à 12 mois après la chocs, accentuant l’inflation intérieure.
Les perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales et la flambée des coûts de transport ont marqué la décennie 2012-2022. Au Maroc, ces hausses ont eu un impact direct sur l’inflation, notamment l’Indice des Prix à la Consommation (IPC) et l’inflation des biens échangeables. Selon une analyse approfondie publiée par Bank Al-Maghrib (BAM), les effets de ces coûts s’étendent sur plusieurs mois, avec des variations distinctes selon les indices de référence comme Harpex et Baltic. Le document, rédigé par les analystes Saïda Hajjaji et Kamal Lahlou, explore en détail les mécanismes liant les taux de fret mondiaux et l’inflation intérieure marocaine.
L’impact des indices Harpex et Baltic sur l’inflation
L’étude de Bank Al-Maghrib s’appuie sur deux baromètres internationaux pour mesurer les coûts du transport maritime : Harpex et Baltic. L’indice Harpex suit l’évolution des taux de fret des porte-conteneurs, tandis que l’indice Baltique reflète les prix du transport de marchandises sèches, un indicateur clé de la demande mondiale de matières premières.
Les résultats montrent que chaque augmentation des coûts de transport entraîne une augmentation de l’inflation au Maroc, avec des effets oscillant entre 0,3% et 0,5% selon l’indice utilisé. En particulier :
-Harpex capture mieux les effets à long terme, avec une influence plus forte sur l’IPC et une amplitude plus élevée. Par exemple, l’impact maximum sur l’IPC atteint 0,3% avec Harpex contre seulement 0,1% pour Baltic.
-La Baltique, en revanche, reflète des variations plus modérées et de plus courte durée.
Cependant, les deux indices révèlent une persistance des effets sur 8 à 12 mois, reflétant le caractère structurel des liens entre transport maritime et inflation. Cette persistance s’explique par l’importance des importations pour l’économie marocaine, notamment en matière de produits alimentaires et énergétiques.
Chocs externes et fragilité du commerce maritime mondial
Si le marché du transport maritime semblait évoluer vers l’équilibre en 2023, les tensions géopolitiques ont ravivé les incertitudes. La guerre en Ukraine, combinée aux perturbations des chaînes d’approvisionnement, a maintenu les coûts de transport à un niveau élevé. BAM souligne que la consolidation des alliances entre grands opérateurs maritimes et la volatilité des prix de l’énergie contribuent également à la fragilité du secteur.
En 2024, un nouveau choc accentue ces perturbations : les attaques en mer Rouge. Ces incidents ont contraint les armateurs à éviter le canal de Suez, une route commerciale cruciale reliant l’Europe et l’Asie. Les navires sont ainsi redirigés via le Cap de Bonne-Espérance, allongeant considérablement les trajets et augmentant les coûts logistiques. Entre novembre 2023 et février 2024, les échanges via le canal de Suez ont chuté de plus de 50 %, perturbant le commerce mondial et réduisant les volumes d’import-export des pays dépendants de cet itinéraire, notamment dans la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord).
Les tensions sécuritaires et la réorganisation des routes maritimes ont des répercussions directes sur les coûts de fret, amplifiant à leur tour l’inflation. Les délais de livraison prolongés et l’augmentation des coûts d’approvisionnement affectent particulièrement les biens échangeables, augmentant ainsi les pressions sur les prix au Maroc.