Banques centrales, la sortie du jardin d’Eden

Banques centrales, la sortie du jardin d’Eden
Banques centrales, la sortie du jardin d’Eden

(a) Quelle partie du réseau de production est directement concernée ? Les chocs affectant des secteurs de biens ou de services complémentaires situés en amont de la chaîne de production (ou difficilement remplaçables) ont des effets plus importants que pour ceux situés en aval et facilement substituables.
(b) Le degré de rigidité des prix du secteur concerné. Des chocs persistants sur des secteurs qui modifient rarement leurs prix entraîneront des coûts plus durables que des chocs temporaires sur des secteurs dont les prix sont très flexibles dans les deux sens.
c) Chocs internes versus chocs externes. Les chocs sur les biens importés sans substitut local ont un impact immédiat plus fort, alors qu’ultérieurement, l’effet des termes de l’échange peut partiellement atténuer les pressions inflationnistes globales. Les variations des prix relatifs internes (comme la taxe carbone) redistribuent le pouvoir d’achat entre les consommateurs nationaux.
d) La prévisibilité des effets (une taxe carbone en augmentation régulière et annoncée à l’avance aura des effets plus gérables que ceux d’une hausse ponctuelle et inattendue).

Les banques centrales devront investir dans des modèles plus précis pour analyser ces chocs. En particulier, l’intégration des risques liés au climat (physiques), bien qu’elle en soit encore à ses débuts, devrait alimenter notre évaluation des risques pesant sur les perspectives d’inflation. Les chocs d’offre étant tous différents, une approche possible consiste à utiliser des scénarios pour explorer des interactions complexes ou des événements à faible probabilité et à fort impact. Ces scénarios pourraient être des intrants utiles pour une approche de gestion des risques de la politique monétaire. En période de forte incertitude, nous ne serons pas toujours en mesure d’identifier tous les chocs en temps réel, de sorte qu’une approche de gestion des risques s’appuierait sur les scénarios les plus coûteux.

Deux messages concernant notre point d’arrivée

Concernant notre point d’arrivée, permettez-moi de souligner deux messages clés.

  • Premièrement, même si les chocs d’offre peuvent entraîner des arbitrages compliqués entre production et inflation à court terme, ils ne devraient pas nous empêcher d’atteindre notre objectif d’inflation, qui crée les conditions les plus favorables à une croissance durable à long terme.
  • Deuxièmement, leengagement envers notre objectif d’inflation est une stratégie efficace pour renforcer le canal d’anticipation de la politique monétaireiii. À cet égard, l’objectif symétrique à moyen terme de 2 % que nous avons fixé en 2021 nous a bien servi ces dernières années. Nous devons donc nous abstenir de modifier ce niveau de 2 %, mais le degré de flexibilité approprié fera partie de notre révision stratégique l’année prochaine. Un objectif symétrique à moyen terme de 2 % ne signifie pas strictement 2,0 % en permanence, une certaine marge de manœuvre est envisageable. à l’heure est probablement préférable à une marge d’ajustement dans l’espace. Notre horizon à moyen terme nous donne suffisamment de flexibilité pour lisser l’ajustement aux chocs, alors qu’un objectif défini comme un intervalle pourrait affaiblir l’ancrage des anticipations d’inflation et être pris, à tort, pour une zone d’inaction de la politique monétaire iv.

Je voudrais maintenant passer de ces défis à long terme à une remarque sur notre politique actuelle.

Notre gradualisme pragmatique est cohérent avec une pondération de plus en plus élevée des projections – et une pondération de plus en plus faible des données d’entrée. Cela reflète la variabilité de l’incertitude et des risques au fil du temps. Les données peuvent être volatiles et il existe un risque de réaction excessive aux nouvelles informations, en particulier jusqu’à la fin de cette année : par conséquent, « basé sur les données » dans le contexte d’inflation actuel ne signifie pas « basé sur des estimations rapides ». Cela dit, le chiffre de l’inflation de juin pour la France publié ce matin à 2,5 % après 2,6 % en mai est encourageant : la désinflation est en bonne voie. Les surprises liées aux données étant désormais moins importantes et les révisions de notre diagnostic moins importantes qu’il y a deux ans, nous avons gagné en efficacité. confiance dans les prévisions et ont accru leur marge de manœuvre pour ignorer les petites difficultés du processus de désinflation.

Permettez-moi de conclure par une métaphore. La course automobile des 24 heures du Mans a été particulièrement difficile cette année en raison de conditions météorologiques dangereuses et de 10 abandons pour pannes mécaniques. Cela souligne que plus le parcours est incertain, plus le véhicule doit être fiable. Cela vaut également pour la politique monétaire et les banques centrales : en période d’incertitude, nous avons besoin d’un véhicule fiable. Nous avons la force de nos deux piliers : l’indépendance et nos mandats de stabilité des prix. Soyez assurés qu’en ces temps incertains, la crédibilité de la Banque de France et de la BCE, et la confiance qu’elles inspirent, seront solidement ancrées dans ces deux piliers.

jeGarnier, (O.), De la grande modération à la grande volatilité de l’inflation2023
iiNussbaum, (B.), La mondialisation à son apogée2010
iiiVilleroy de Galhau, Anatomie d’une baisse de l’inflation : d’une première phase réussie aux conditions d’un atterrissage maîtrisé, discours à l’Université Paris-Dauphine, 28 mars 2024
ivLe Bihan, Marx, Matheron (2021) Bandes de tolérance à l’inflation dans un modèle néo-keynésien, et Grosse-Steffen (2021) Ancrage des anticipations d’inflation : les formulations d’objectifs d’inflation sont-elles importantes ?

 
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