L’UE va-t-elle (vraiment) réduire vos factures d’électricité ? – .

Dans une interview accordée à Radio Sud, le 3 juin, le commissaire européen Thierry Breton a fait une déclaration pour le moins controversée sur les bénéfices énergétiques de l’Union européenne. Explications.

Selon M. Breton, il suffirait de regarder l’évolution des prix du gaz et de l’électricité pour se convaincre du bien-fondé de la politique énergétique européenne. Il déclare ainsi : « Il y a un an et demi, nous étions à des prix stratosphériques pour le gaz et l’électricité. Nous sommes désormais revenus à des prix normalisés. C’est donc bien sûr grâce à l’Europe que nous parviendrons à faire baisser le coût de l’électricité de manière significative et stable. » Quelques heures seulement après cette déclaration, on apprenait que le prix du gaz allait bientôt augmenter…

Au-delà du sens de Horaire Selon Thierry Breton, on a du mal à comprendre le lien de causalité entre l’Union européenne et la baisse promise du prix de l’électricité. Certes, une réforme du marché commun de l’électricité contribuera à stabiliser les prix. Mais empêcher les prix d’exploser ne signifie pas les laisser baisser. La suite de l’entretien nous fait comprendre où réside l’intérêt de la France. « Nous allons utiliser de plus en plus d’électricité, grâce notamment à nos investissements dans le nucléaire », explique le commissaire européen. Ce qui est tout à fait juste. Ces investissements ne sont en revanche pas le fruit d’une politique européenne mais d’une politique très française. Au contraire, sur la question nucléaire, l’Europe est profondément divisée. L’Allemagne, pays le plus puissant et le plus influent de l’Union, est même farouchement opposée au nucléaire, en particulier au nucléaire français, comme le démontre l’École de guerre économique, à travers deux rapports sur l’ingérence de son gouvernement dans notre politique énergétique. De ce point de vue, l’Europe apparaît donc plus comme le problème que comme la solution…

Revenons au marché commun de l’électricité. Cela fonctionne en quelque sorte comme une vente aux enchères. L’Europe fait tout pour promouvoir les énergies vertes en les utilisant en priorité. S’ils ne parviennent pas à couvrir la demande, nous passons alors à une Source d’énergie moins verte et plus chère, et ainsi de suite. Toutefois, les prix sont indexés sur celui de la dernière Source d’énergie utilisée. Ainsi, lorsqu’on utilise du gaz, les producteurs d’énergie éolienne réalisent d’énormes marges… La guerre en Ukraine et le sabotage du gazoduc Nord Stream ont fait exploser les prix du gaz, ce qui explique la crise des deux dernières années.

Pour résoudre le problème, les députés ont donc validé une réforme du marché commun. C’est à cette réforme que faisait référence Thierry Breton lorsqu’il déclarait que l’Europe allait baisser nos factures. Le sujet est complexe. B.V. a pu interroger, à ce sujet, Philippe Charlez, ingénieur des mines et énergéticien, pour qui cette réforme est une excellente nouvelle. La France est en effet (grâce à son parc nucléaire) un exportateur d’électricité. Ainsi, le marché commun lui permettrait d’écouler ses surplus. Surtout, la réforme plafonne les prix pour éviter qu’ils n’explosent, comme ce fut le cas au plus fort de la crise. Toutefois, limiter la hausse des prix ne signifie pas les réduire.

Selon un autre expert en électricité, le débat sur le marché commun de l’électricité reste ouvert. La France exportait davantage avant d’y entrer. A ses yeux, ce marché profite surtout à l’Allemagne. Le pays est en effet en tête en matière d’énergies renouvelables. Le marché lui permet ainsi de stocker ses excédents renouvelables chez ses voisins. Ils réalisent donc d’énormes marges à chaque fois qu’ils ont besoin de charbon ou de gaz, puisque le mécanisme du marché fait que, très souvent, ces sources indexent leurs prix. Ainsi, l’avantage que la France peut tirer du marché commun de l’électricité est tout à fait circonstanciel. Mercredi 5 juin, Bruno Le Maire a néanmoins affirmé, lors d’une audition devant les sénateurs, que le marché commun permettait d’éviter les coupures de courant et, surtout, à EDF d’exporter son électricité. Ce n’est que partiellement vrai. EDF a exporté davantage avant d’entrer dans le marché commun.

Mais si les Français bénéficient d’une énergie bon marché, ils le doivent avant tout au nucléaire, à Pierre Messmer et à eux-mêmes, puisque ce sont leurs impôts qui ont servi à financer notre flotte.

Imprimer, enregistrer ou envoyer cet article

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

NEXT BMW va copier Hyundai pour ses voitures de sport électriques – .