Après un entretien d’embauche, ils ont été « fantômes » par leur recruteur… « J’ai trouvé ça insupportable »

Après un entretien d’embauche, ils ont été « fantômes » par leur recruteur… « J’ai trouvé ça insupportable »
Après un entretien d’embauche, ils ont été « fantômes » par leur recruteur… « J’ai trouvé ça insupportable »

Victor*, alors âgé de 20 ans, était à la recherche d’un stage pour compléter son cursus en école de commerce lorsqu’il tombe sur l’offre de ses rêves. Un contrat de quatre mois dans une start-up en pleine croissance. Il obtient rapidement un entretien téléphonique concluant avec les RH. Deux semaines plus tard, il s’y rend pour rencontrer sa potentielle future équipe. Le jeune homme commence à se projeter. Après avoir réalisé un cas pratique, il fait une nouvelle rencontre vidéo avec son futur manager, puis obtient un ultime entretien avec le PDG (CEO) de l’entreprise basée en région parisienne (oui, oui, tout ça pour un stage de formation). quatre petits mois).

Le jeune homme se rend à nouveau dans les locaux de la start-up, situés à plus d’une heure de route de chez lui, a un entretien avec le grand patron puis… attend. Un, deux, trois jours… dix jours. Victor décide de faire un suivi avec eux par courriel et par téléphone. On lui dit que la gérante est malade mais qu’elle reviendra la semaine suivante. Deux semaines plus tard, il a envoyé un e-mail à son futur manager potentiel et a réessayé plusieurs appels. Silence radio. Victor ne reviendra jamais. Le jeune homme s’est simplement fait fantôme. Une pratique bien connue dans le domaine sentimental mais beaucoup moins médiatisée dans la sphère professionnelle. Cependant, Victor est loin d’avoir été la seule victime.

“Je me suis beaucoup remis en question”

Léa*, la trentaine, a dû faire face au même silence. Lors de son entretien avec son potentiel futur patron, elle lui parle déjà de ses prochaines missions dans le secteur de l’événementiel. A la fin de la réunion, la responsable lui annonce qu’elle reviendra vers elle rapidement pour la mettre sur un prochain projet. Pendant deux mois, Léa n’a plus eu de nouvelles malgré ses relances. « Face à ce silence, je me suis posé beaucoup de questions. Je me demandais si j’avais dit quelque chose qui n’aurait pas dû être dit, si je lui avais fait une mauvaise impression. Je me suis beaucoup remis en question. »

Une réaction qui ne surprend pas Adrien Chignard, psychologue du travail. « Le droit au respect est un droit fondamental qui nous est légitimement dû. Alors si nous en sommes privés, nous le ressentons comme une frustration, et toute frustration va générer de l’agressivité. » Une agressivité ce qui peut avoir un effet néfaste sur chercher du travail (à quoi ça sert de continuer si les recruteurs se comportent ainsi ?), se retourner contre le recruteur (avec des messages vindicatifs sur les réseaux sociaux) ou contre soi-même, comme Léa.

Colère et impuissance

Morgane, qui travaille dans la communication, a également été fantôme par un recruteur, l’agression étant clairement dirigée contre ce dernier. « Pour moi, c’est un manque total de respect. Je trouvais ça insupportable et j’étais vraiment en colère contre elle. » Une colère compréhensible pour Marie d’Hautefeuille, psychologue du travail. « Cela ne sert à rien de vouloir accepter quelque chose qui n’est pas agréable ; ce serait banaliser son expérience. Il faut exprimer ses émotions et se donner le temps de digérer l’information. »

Pour Nina*, qui a dû attendre un mois et demi après son entretien pour un poste en marketing, malgré ses relances, avant de recevoir un mail de refus automatique, « c’était vraiment frustrant de ne pas avoir de nouvelles ». Une question d’impuissance, selon le psychologue. « Nous nous sentons extrêmement impuissants face à l’impuissance. Le risque est soit de se dénigrer, soit de s’agiter en envoyant des candidatures à la planète entière sans aucun discernement. Mais alors nous aurons davantage de manque de réponse et nous nous sentirons encore plus mal. »

Une perte de confiance en soi

Le silence sera d’autant plus difficile à vivre si la personne fantôme a déjà des faiblesses. « Les personnes ayant une faible estime d’elles-mêmes seront plus déstabilisées par ce silence », analyse Adrien Chignard. Léa, par exemple, s’est immédiatement dévalorisée. «Je me suis dit : ‘J’ai encore foiré.’ »

«On a encore moins confiance en soi lorsqu’on cherche un emploi que lorsqu’on est primo-demandeur d’emploi», poursuit la psychologue. Et ce n’est pas Victor qui dira le contraire. « Quand j’étais jeune, je ne savais pas que ce n’était pas normal. Je me suis reproché, je me suis dit « peut-être que c’est moi le problème, j’ai foiré l’entretien, peut-être que je ne méritais pas de réponse ». » Selon la psychologue, les personnes qui ont été discriminées à plusieurs reprises et celles pour qui le travail occupe une place centrale dans leur identité connaîtront une pire expérience de vie. fantôme.

Un retour en arrière avec l’expérience

« Au bout d’un moment, face à son silence, j’ai arrêté de me poser des questions, raconte Léa. Je me suis dit que ce n’était pas contre moi, peut-être qu’elle était débordée de travail, peut-être que c’est sa façon de travailler. » Une réaction bienvenue, selon Marie d’Hautefeuille. « Le recruteur n’a pas choisi de ne pas vous répondre. A priori, il ne répond à personne. C’est son mode qui est dysfonctionnel, et cela n’a rien de personnel. »

Une prise de recul plus facile à prendre, selon elle, une fois les expériences accumulées. Victor estime également que si cela lui arrivait aujourd’hui, il ne réagirait pas de la même manière. « Je me disais « est-ce que j’ai vraiment envie de travailler pour des gens qui se comportent comme ça ? ». »

Selon Adrien Chignard, il peut aussi être utile d’insister auprès du recruteur. « Si nous avons une réponse, cela contribuera à atténuer le sentiment initial d’injustice. » Au bout de deux mois, après avoir insisté, Morgane obtient une réponse négative. Un message auquel elle a décidé de ne pas répondre.

 
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