Pénurie de main d’œuvre : terminée ou en pause ?

Pénurie de main d’œuvre : terminée ou en pause ?
Pénurie de main d’œuvre : terminée ou en pause ?

Depuis janvier 2022, 262 000 personnes se sont ajoutées à la population active, tandis que 223 000 emplois nets ont été créés, selon les chiffres fournis par l’Institut du Québec. Cet écart a eu pour conséquence de porter le taux de chômage à 5,7% en août 2024. Il s’est établi à 4,3% en 2022.

Le taux de vacance, quant à lui, a diminué à 3% (juillet 2024). Il s’agit de son plus bas niveau depuis 2019. Grâce à un bassin de candidats élargi, les employeurs ont pourvu une multitude de postes, notamment dans les secteurs de l’industrie manufacturière, de la restauration et du commerce de détail. Cependant, certains secteurs, notamment celui de la santé, continuent d’avoir un nombre important de postes vacants.

« En 2023, nous avons senti le vent tourner. Le marché du travail a commencé à se ralentir. Les employeurs ont supprimé les offres d’emploi pour deux raisons. La hausse du taux directeur, qui a ralenti l’économie. Mais aussi en raison d’une poussée de l’immigration temporaire, qui a augmenté l’offre de travailleurs disponibles», explique la PDG de l’Institut du Québec, Emna Braham.

Jeunes et immigrants

L’emploi des travailleurs expérimentés (55 ans et plus) demeure stable tandis que celui des jeunes (15-24 ans) connaît un déclin notable. Le taux d’emploi des 25-54 ans a diminué, mais reste à un niveau plus élevé qu’en 2019.

Suite à la levée des restrictions post-Covid, les entreprises ont eu un grand besoin de salariés. Des jeunes et des immigrants temporaires sont venus combler les postes.

Si cette masse de travailleurs a permis d’atténuer largement la pénurie de main d’œuvre selon les secteurs, elle a aussi subi de plein fouet le ralentissement économique.

« Obtenir un premier emploi pour les étudiants et les immigrants est plus difficile. Le nombre de postes disponibles étant limité, ils font face à une forte concurrence.

— Emna Braham, directrice générale de l’Institut du Québec

Selon l’économiste, à court terme, cette population va perdre des revenus et connaître des difficultés financières. Cependant, la situation pourrait encourager les jeunes à ne pas abandonner leurs études et à poursuivre leurs études pour de meilleures opportunités d’emploi.

Plein emploi

Faut-il s’inquiéter du taux de chômage au Québec ? Non, disent les experts. Cela reste faible dans un contexte de ralentissement économique. Il a également diminué de 0,2 point de pourcentage pour s’établir à 5,5 % en septembre.

« Normalement, les entreprises licencient et le taux de chômage augmente très vite au-delà de 7 %. Mais ce n’est pas le cas. Le lien avec l’emploi est maintenu en prévision d’un retour à la croissance qui interviendra le plus tôt possible. Nous sommes donc toujours au plein emploi, même la pénurie a disparu dans la majorité des secteurs.

— Xavier Thorens, chasseur de têtes et PDG de Thorens Solutions

Et malgré une baisse des postes disponibles, les entreprises continuent d’embaucher. « En tant que chasseur de têtes, je recherche des personnes expérimentées. L’économie ralentit au Québec, mais le marché est toujours robuste et les employeurs sont en demande de main d’œuvre qualifiée », affirme M. Thorens.

Une grave erreur

L’afflux massif d’étrangers a fortement accru la pression sur le logement. Pour résoudre cette crise, Ottawa et Québec recommandent une réduction drastique de l’immigration temporaire.

Réduire le nombre d’immigrés temporaires est une mauvaise idée, selon les économistes.

« La population québécoise vieillit. Il y a plus de décès que de naissances. La croissance démographique passera donc par l’immigration. Lorsque la croissance reprendra, nous nous retrouverons à nouveau dans une situation où les entreprises auront du mal à recruter », argumente Xavier Thorens.

Il prévoit un retour de la pénurie de main d’œuvre d’ici fin 2025.

«Dans quelle mesure ce désir sera réalisable», demande Emna Graham. Lorsqu’on parle d’immigration temporaire, une petite partie provient de travailleurs recrutés à l’étranger, avec des permis pour occuper des postes particuliers. Mais la plus grande partie est constituée d’étudiants et de demandeurs d’asile titulaires de permis ouverts. Il y aura des impacts négatifs sur certains secteurs.

« Sans oublier qu’il faut un an, voire plus, à un intérimaire pour obtenir son permis de travail », ajoute M. Thorens.

Soyez prêt

Selon le chasseur de têtes, les entreprises auraient dû investir dans l’automatisation pendant la transition démographique.

« Nous avons quelque peu raté une opportunité ces dernières années de changer de modèle économique. Veiller à ce que nous ne nous retrouvions plus en situation de pénurie de main-d’œuvre. Avons-nous pris ce train au bon moment ? Probablement pas. On le voit, les données d’investissement pour les usines 4.0 n’ont pas augmenté», s’inquiète Xavier Thorens.

« J’ai l’impression qu’en ce moment, on perd un temps précieux à s’organiser, planifier, se structurer, et puis être beaucoup plus attentif aux détails. Le Québec rivalisera avec les autres pays pour attirer les talents. Quand vous attendez une réponse pendant un an, et qu’ensuite on vous refuse pour des raisons étranges, vous choisirez une autre destination », prévient-il.

A lire demain : Pénurie de main d’œuvre en pharmacie : « Toujours au même endroit qu’en 2021 »

 
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