Les clients suisses laissés dans l’incertitude

Babboe laisse ses clients suisses dans l’incertitude

Publié aujourd’hui à 11h56

Jean Sersa (nom modifié) se sent abandonné par le fabricant de vélos Babboe et par les autorités suisses. « Ce n’est que par l’intermédiaire d’un réparateur indépendant que j’ai appris que ces vélos présentaient un risque », nous confie-t-il.

Malgré les mesures prises par l’autorité néerlandaise de protection des consommateurs NVWA (Nederlandse Voedsel- en Warenautoriteit), le produit n’a toujours pas été classé comme dangereux par l’Office fédéral de la consommation.

Babboe ne contacte pas les acheteurs de vélos

Je n’ai pas non plus été contacté par Babboe en Suisse, déplore-t-il. « Cependant, nous avons acheté le vélo directement chez eux via leur site Internet », explique Jean Sersa. Selon lui, Babboe Suisse a bien informé ses clients de la situation sur son site Internet en publiant un communiqué datant de début mars. Cependant, cette information a depuis disparu du site.

Jean Sersa fait allusion au scandale des défauts de sécurité touchant certains modèles Babboe et qui se transforme peu à peu en affaire pénale. Le parquet néerlandais enquête actuellement sur le fabricant dont le siège est à Amersfoort. L’accusation est une négligence, car l’entreprise aurait été au courant des problèmes depuis longtemps et n’aurait rien fait pour y remédier.

Aux Pays-Bas et en Allemagne, les autorités compétentes ont ordonné le rappel et l’arrêt de la vente des vélos cargo Babboe à la suite de plusieurs rapports faisant état de bris de cadre. Dans les deux pays, Babboe doit désormais rappeler 22 000 vélos. L’entreprise propose un vélo neuf aux propriétaires dont le vélo a moins de cinq ans.

Les vélos cargo sont un moyen de transport très apprécié, notamment parmi la population urbaine. Ils sont utilisés pour transporter des marchandises ou des enfants en bas âge, ce qui en fait un substitut populaire à la voiture. Cependant, il peut être ennuyeux de voyager avec un vélo défectueux, car si vous causez des dommages avec celui-ci, vous devez vous attendre, dans le pire des cas, à ce que l’assurance responsabilité civile réduise ses prestations.

Pas de rappel officiel pour la Suisse

Dans notre pays, il n’y a actuellement aucun avertissement ni rappel officiel. Babboe Suisse, en tant qu’importateur et représentant suisse de l’entreprise, a en effet signalé les défauts de sécurité et les modèles concernés conformément à la loi, explique-t-on à l’Office de prévention des accidents (BPA).

“Mais les mesures nécessaires et la communication du rappel doivent être prises en premier lieu par ces deux acteurs économiques et non par nous en tant qu’autorité”, ajoute un porte-parole de la BEAA.

Le BPA aurait cependant eu la possibilité d’émettre un avertissement, voire un rappel, via l’Office fédéral de la consommation. Le porte-parole des autorités explique pourquoi cela n’a pas été fait : « Entre-temps, le rappel a été largement diffusé par différents médias. Nous supposons que tous les consommateurs en sont conscients.

Chez Babboe Suisse, la situation semble désespérée. La société mère néerlandaise a résilié les contrats, explique le licencié suisse. Comme il s’attend à un litige, son nom n’est pas mentionné ici. Elle affirme être en train de réduire ses activités et d’examiner dans quelle mesure elle peut continuer à offrir des services tels que des réparations. Il ajoute également qu’il prépare actuellement des informations clients à ce sujet.

Dans notre pays, la vente de certains modèles aurait été suspendue. Babboe Suisse a supprimé l’avis correspondant de son site Internet car celui-ci est actuellement en cours de refonte. «Je ne reçois tout simplement plus d’informations ni d’instructions des Pays-Bas», explique le licencié suisse. Il ne serait pas le seul dans ce cas, d’autres importateurs le seraient aussi. La maison mère les laisse dans l’incertitude, déplore-t-il.

Des discussions avec d’autres exploitants confirment sa version des faits. «Chez moi, des clients mécontents se précipitent à la porte et demandent des informations», explique un revendeur de vélos Babboe pour la Scandinavie. “Le seul problème, c’est que je ne peux pas les aider, car malgré plusieurs contacts, je ne reçois aucune information du siège néerlandais.”

Il dit disposer d’un stock de produits Babboe d’une valeur d’environ 350 000 euros, dont il ne peut se débarrasser. En tant que propriétaire d’une petite entreprise, ce serait une situation pénible. Ce commerçant souhaite également rester anonyme car il envisage une action en justice contre Babboe.

Les partenaires de distribution interrogés voient principalement deux raisons au chaos qui règne au siège : une surcharge de travail et une suppression d’emplois décidée par Accell, le propriétaire néerlandais de Babboe. Accell, à son tour, appartient à la société d’investissement américaine KKR & Co., qui, selon des initiés, a rigoureusement mis Accell et sa marque Babboe, déficitaire, sur la voie de la rentabilité.

Suppression de postes sur le site de production

Ainsi, Accell a annoncé en décembre 2023 qu’elle fusionnerait ses deux sites de production néerlandais à Heerenveen et transférerait une partie de la fabrication vers des usines existantes en Hongrie et en Turquie. Selon les médias néerlandais, jusqu’à 150 emplois sont concernés par cette décision.

Mais des suppressions d’emplois auraient également eu lieu au sein de la direction et de l’administration de Babboe. Les traders interrogés constatent que leur expertise fait désormais défaut, justement au moment où une gestion de crise s’impose.

La société mère de Babboe aux Pays-Bas n’a pas répondu à notre demande. On ne sait donc pas pourquoi l’entreprise a résilié le contrat avec l’importateur suisse et pourquoi elle n’a apparemment pas réagi aux cris de détresse des concessionnaires européens.

Jon Mettler est rédacteur économique à la rédaction de Tamedia à Zurich depuis 2018. Il couvre des sujets liés aux télécommunications, à la numérisation, au tourisme et à l’industrie horlogère. Il a remporté plusieurs prix de journalisme, dont le Prix secondaire des médias de la Fédération suisse des avocats, le Prix européen du journal et le Prix Bedag des médias.Plus d’informations @jonmettler

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