Le Capitole à Washington. C’est le Congrès qui doit voter pour relever le plafond de la dette. (crédit : Clément Cousin / Flickr)
Par George Brown, économiste, Schroders
Les États-Unis pourraient se retrouver en défaut d’ici quelques jours à moins que le Congrès ne parvienne à un accord pour relever la limite d’emprunt du pays. Tant que les négociations sont en cours, si le plafond de la dette n’est pas relevé à la “date x” (voir ci-dessous), les paiements de coupons et les remboursements du Trésor s’arrêteront.
Bien que des défaillances techniques se soient déjà produites – comme le problème de traitement des chèques en 1979 qui a retardé certaines réclamations – un véritable défaut serait un événement sans précédent aux répercussions profondes.
Pourquoi l’échéance précise de cette date n’est pas connue avec certitude
La “date x” marquerait le moment où le Trésor serait à court de fonds. Après des recettes fiscales décevantes pour 2022, tout dépend désormais de l’évolution des recettes jusqu’en mai. Si ceux-ci permettent au gouvernement de tenir jusqu’à la mi-juin, date à laquelle les paiements d’impôts trimestriels sont dus, le Trésor devrait pouvoir tenir jusqu’en juillet et peut-être même jusqu’au mois d’août.
Il y a encore beaucoup d’incertitude autour de la date précise (date x) à laquelle le Trésor américain serait à court de fonds.
Comment éviter le défaut de paiement ?
Après de nombreuses querelles internes, les républicains ont réussi à s’unir autour d’une même ligne et à entamer des négociations avec la Maison Blanche. Même si les deux parties parviennent à un accord, comme nous nous y attendons, il devra encore être approuvé par le Congrès. Au-delà du calendrier législatif limité, le principal obstacle sera les républicains ultra-conservateurs, qui pourraient faire obstacle à l’accord en destituant le président du Congrès pour empêcher la présentation de projets de loi au Congrès.
---Cependant, certains démocrates centristes auraient assuré en privé au président qu’ils viendraient à son aide dans de telles circonstances. Le président Joe Biden a également ouvertement envisagé d’utiliser la section 4 du 14e amendement, qui stipule que la validité de la dette publique américaine « ne doit pas être remise en question ». Mais cette action unilatérale inédite pourrait être invalidée par la Cour suprême.
Ainsi, bien qu’un défaut soit peu probable, il ne doit pas être exclu. Comme toujours, le contexte est important. Les investisseurs considéreraient probablement un défaut comme une conséquence de l’environnement politique conflictuel plutôt que comme une incapacité fondamentale des États-Unis à honorer leurs obligations de dette. Cela étant dit, nous prévoyons toujours une diminution du sentiment de risque sur les marchés au cours des prochaines semaines, ce qui pourrait être amplifié par les inquiétudes persistantes concernant la solidité du système bancaire.
Implications pour les investisseurs
Le message aux investisseurs reste donc le même : espérer le succès, mais prévoir l’échec. Dans la mesure du possible, les portefeuilles doivent être liquides et diversifiés afin de permettre un redéploiement rapide des capitaux compte tenu de la volatilité observée lors des précédents épisodes de course au plafond de la dette. Cependant, il serait faux de supposer que les actifs se comporteront de la même manière qu’auparavant. Par exemple, la hausse des bons du Trésor au cours de l’impasse de 2011 a coïncidé avec les inquiétudes concernant la crise de la dette de la zone euro.
Perspectives des bons du Trésor
Bien qu’il soit possible que les bons du Trésor se portent bien au cours des prochaines semaines, cela n’est en aucun cas garanti. Notre conviction la plus forte est de surpondérer l’or, malgré le récent rallye, ainsi que les émissions souveraines notées AAA telles que les Bunds allemands. Dans le même temps, nous nous attendons à ce que les devises refuges telles que le yen japonais et le franc suisse résistent bien face au dollar américain.
Perspectives pour les actions
En revanche, les actions sont susceptibles d’être les plus sous pression. Mais il est probable qu’il y ait une grande divergence au-delà des principaux indices. Les entreprises qui dépendent fortement des dépenses ou des subventions du gouvernement américain sont susceptibles de faire face aux plus fortes pressions. En revanche, les valeurs sûres pourraient mieux résister, tout comme les secteurs défensifs et non cycliques, comme la pharmacie.
Opportunités stratégiques
Enfin, pour ceux qui sont prêts à parier que le Congrès parviendra à remonter le plafond de la dette à temps, certains investisseurs pourraient chercher à arbitrer le différentiel de rendement entre les bons du Trésor arrivant à échéance avant et après le début du mois de juin. La clé sera le moment, le moment étant le moment où les inquiétudes concernant le plafond de la dette atteindront leur maximum.
Nous n’en sommes pas encore là, mais cela ne devrait pas tarder.
Les courbures de la courbe des bons du Trésor présentent des opportunités d’arbitrage.