l’essentiel
Lydia Olchitzky-Gaillet publie son 4ème ouvrage dans lequel elle retrace le parcours d’une famille juive polonaise qui a fui les pogroms pour atterrir, contre son gré, à Paris et qui a connu les lois antijuives de Vichy. Un roman basé sur des recherches historiques mais aussi des éléments autobiographiques pour cette femme qui vit dans le Lot depuis 40 ans.
S’il est d’usage de dire que nous ne choisissons pas notre famille, on pourrait aussi ajouter que nous ne choisissons pas d’écrire : « Nous sommes émus par notre histoire, par les questions que nous nous posons. Je n’aurais jamais pensé écrire un livre un jour», note Lydia Olchitzky-Gaillet, 77 ans, qui nous accueille dans sa maison de Caillac. Cependant, elle en est maintenant à son quatrième livre, Sans appel. Sans pouvoir entièrement expliquer ce parcours d’écrivain : “Je me suis laissé guider par plein de choses qui m’ont totalement échappé”, poursuit-elle comme si une main mystique l’avait guidée.
De la dépossession des Juifs au conservateur
Mais on ne devient pas écrivain par hasard. Même si être représentant légal, être chargé d’être placé sous tutelle, ne vous prédispose pas a priori à la charge de l’écrit. Il s’est finalement imposé à travers l’histoire qui est la sienne, celle de sa famille, de ces questions restées sans réponse que le silence des aînés – qui ont connu la pauvreté, la guerre, la barbarie – développe malgré eux. C’était comme ça en 2010 lorsqu’elle publiait chez Harmattan Dépossession et enfants cachés, le destin d’un résistant : « C’est l’histoire de mon père. Je voulais savoir comment il faisait pour sortir ses cousins d’un camp de concentration”, se souvient cet ancien Parisien. Ce qui était censé n’être qu’un entretien avec ses proches qui avaient vécu ce passé obscur s’est transformé en une quête d’archiviste. Elle découvre ainsi que son grand-père a été condamné à 3 000 francs d’amende et à trois mois d’emprisonnement. En consultant les interrogatoires au musée de la police, elle comprend ce qui s’est passé : « Il s’agissait en fait de la dépossession de petits commerçants juifs. On les mettait en prison, on pouvait s’installer chez eux et voler leurs marchandises. »
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De ce travail, elle n’est pas sortie indemne puisqu’elle a attrapé le virus de l’écriture. Elle se lance ensuite dans la fiction avec un deuxième ouvrage, En sursisaux connotations autobiographiques, qui suit le quotidien d’une curatrice de justice, son métier, à travers deux jeunes femmes aux parcours meurtris, marqués par un mal-être insurmontable : “Ce sont des gens qui ont été marqués par la dépression qu’ont vécu leurs parents”, explique Lydia. Un peu à l’image de son propre père, marqué par les tourments de la guerre. Cette œuvre de fiction se conclut par un troisième ouvrage, Remise de peinequi suit le parcours de la fille d’une des femmes rencontrées dans l’ouvrage précédent.
Mais le travail de Lydia ne s’arrête pas. Comme un éternel recommencement, il replonge dans les années de l’entre-deux-guerres, et les tragédies qui ont suivi.
Dis-lui ce qu’on lui a dit
Là encore, « c’est l’histoire de ma famille », confirme Lydia, qui ne signe plus uniquement du nom de Gaillet, mais de celui de son nom de jeune fille : Olchitzky. L’histoire d’une famille juive qui, en Pologne, a fui les pogroms et, par hasard, s’est installée à Paris en 1925 alors qu’elle rêvait de rejoindre l’Argentine : « Je voulais savoir comment des gens ayant ce statut social pouvaient réaliser leurs projets », continue Lydia où, à travers cette famille, elle raconte l’histoire de deux Frances. Celui sous Vichy qui, à Paris, connaît les lois antijuives, les rafles, les milices. Et l’autre, celle du sud-est où une partie s’est réfugiée à Digne-les-Bains, alors occupée par les Italiens.
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Ici, la fiction se mêle à son récit, mais aussi à son important travail de recherche historique : « J’ai émis des hypothèses sur ce qui aurait pu se passer », précise celui qui, là encore, a voulu raconter ce qu’il ne voulait pas. lui dire ce que sa mère « qui n’aime pas les mauvais souvenirs » n’a jamais voulu lui dire.
Des livres, en somme, en forme de réponse à l’obscurité de l’histoire. Ce qu’elle dit avoir résolu pour le moment. Jusqu’à ce qu’elle se laisse à nouveau porter par une force qui la dépasse.