LLongtemps champion du gaspillage, la production audiovisuelle et cinématographique se préoccupe de plus en plus de son impact environnemental. C’est du moins le message que portent Gironde Filmings, l’agence départementale chargée d’héberger et d’accompagner les productions de la région, et le Groupe JLA, important fournisseur de séries télévisées, dont « Le Daron » diffusée sur TF1 depuis octobre. La deuxième saison de cette série matinale judiciaire de thriller et de comédie familiale, avec Didier Bourdon en tête d’affiche dans le rôle d’un ténor du barreau exerçant à Bordeaux, a débuté il y a quelques semaines et se terminera en février (diffusion probable début 2025). année scolaire).
Rendez-vous est pris à mi-étape, ce mercredi 18 décembre, dans une zone d’activité de Mérignac, où un bâtiment moderne de style loft (une ancienne agence d’architecture) accueille les décors de « l’agence Daron ». Dans la foule du matin préparant les plans de l’après-midi, aux côtés des directeurs de production, éclairagistes, cadreurs… on retrouve également Pierre Poymiro, « éco-référent manager », ou « éco-manager » du tournage. C’est à dire ? « Le terme désigne la personne chargée d’accompagner l’équipe dans l’éco-production », explique ce Bordelais venu de la restauration (restauration pour tournages), qui assure cette nouvelle mission depuis plusieurs années (« ce n’est pas encore un métier reconnu »), de manière indépendante, « comme un intermittent ».
Il consiste à « collecter toutes les données de consommation » du bilan carbone et à « proposer des solutions pour réduire les émissions ». Dans le milieu naturel, il faut également prêter attention à l’impact sur l’environnement et la biodiversité.
Incitations financières
La prise de conscience du secteur remonte à une quinzaine d’années, avec la création du collectif Ecoprod. « Aujourd’hui, toutes les productions ont leur éco-référence. » Dans ce milieu réputé polluant, la fonction s’est développée grâce à des incitations sociétales, mais aussi financières. Depuis le 1est Janvier 2024, l’aide à la production du Centre national du cinéma est conditionnée à la remise d’un bilan d’émissions carbone. “Il n’y a pas encore d’obligation de résultat mais cela incite chacun à se limiter”, ajoute Valérie Martin, responsable éco-production chez JLA, qui a dressé une “feuille de route” pour tous ses collaborateurs, listant les bons. pratiques.
« Je ferme l’eau du robinet, je finis mon assiette. Je n’aime pas gaspiller, je tiens ça de ma grand-mère. »
En pratique, l’éco-manager met en œuvre « des actions très concrètes, parfois du simple bon sens. Pour ce tournage, il y a 50 personnes par jour sur le plateau. Du côté des émissions, les choses vont vite. » Il a fixé en priorité les « positions sensibles » sur lesquelles intervenir. Côté déplacements, l’avion est interdit « sauf s’il y a plus de cinq heures de train », les transports en commun et le covoiturage, les véhicules électriques favorisés. Pour les décorations, « en amont, nous privilégions les matériaux écoconçus, biosourcés, non polluants. Nous envisageons alors des solutions de recyclage, notamment pour les déchets de bois. »
10 à 25% de réduction des émissions
L’alimentation est le domaine où « les résultats sont les plus rapides ». « On choisit un traiteur local, des circuits courts, on cuisine sur place. Nous privilégions le bio, nous élaborons des repas végétariens. Nous transmettons les fontaines à eau et les écocups, également obligatoires. » Côté énergie, « on essaie de se connecter le plus possible aux réseaux, pour éviter les groupes électrogènes diesel ». Peut-on dresser un premier bilan de ces démarches ? « Avec toutes ces mesures, on peut facilement réduire les émissions de carbone de 10 à 25 % », estime Pierre Poymiro.
De son côté, Gironde Filmings a mis en place « des partenariats depuis plusieurs années » et travaille notamment sur « un annuaire éco-responsable des prestataires locaux » des productions hébergées, précise Marie Rateau, sa directrice. Avec la start-up Flying Sequoia, l’agence du Département réalise « un audit du secteur, dans une démarche plus large de Responsabilité Sociale et Economique (RSE) : inclusion, etc. »
L’industrie du cinéma est encore loin d’être vertueuse et il y a encore beaucoup à faire, notent les acteurs, mais “c’est une étape dans une transition plus globale”.
« Les Inconnus étaient verts avant l’heure »
Didier Bourdon, qui se démaquille et arrive sur le plateau, a-t-il également été mis au courant ? “J’ai toujours été prudent”, assure le comédien. Les petits détails, les petits gestes. Je ferme l’eau du robinet, je finis mon assiette. Je n’aime pas gaspiller, je tiens ça de ma grand-mère. Et puis, regardez les Inconnus : nous étions en avance sur l’écologie et les quotas ethniques ! » Bref, l’acteur, qui fut aussi réalisateur, se définit comme « écologiste avant l’heure » même s’il précise, dans son nouveau costume d’avocat, qu’il se méfie de ceux qui donnent des cours et qu’il faut « rester ouvert ». ».