Créé en 1869 dans ce même théâtre, l’opéra de Verdi a une nouvelle fois conquis grâce aux solistes Anna Netrebko et Brian Jagde, qui ont été encensés pendant plus de 12 minutes.
Une œuvre tourmentée et magistrale, empreinte d’une aura maléfique. Le public de la Scala de Milan a acclamé une représentation grandiose de La Force du Destin de Verdi pour l’ouverture de la nouvelle saison. Absente de La Scala depuis 23 ans, cette grande fresque qui mêle tragédie et comédie est revenue dans ce théâtre prestigieux, suscitant frissons et émotions.
Les artistes, en premier lieu la diva russe Anna Netrebko, ont été accueillis par de vifs applaudissements pendant plus de 12 minutes, très « Bravo » résonnaient dans la salle mythique, mais aussi quelques-uns » bouu! », et des pétales blancs ont été jetés depuis les balcons. Omniprésente, la terreur de la guerre, mais aussi la vengeance et la passion, sont le thème sous-jacent de ce mélodrame inspiré de l’opéra espagnol. Don Álvaro ou la Force du Destinécrit par Ángel Pérez de Saavedra en 1835. Le message de l’œuvre ? ” L’état de guerre est un état permanent qui traverse toutes les époques, avec toujours les mêmes élans de vengeance. », commente Dominique Meyer, directeur général de l’Orchestre de chambre de Lausanne. ” En substance, c’est une œuvre qui nous retient à un miroir assez cruel de qui nous sommes. », a-t-il déclaré à l’AFP.
Aux commandes, Riccardo Chailly a dirigé de main de maître une œuvre qui, selon ses mots, est « terriblement actuel avec ses images de guerre ».
des voix captivantes
Un visiteur régulier du « Primaire », Anna Netrebko a joué avec vivacité Donna Leonora, fille du marquis de Calatrava, qui s’oppose à son mariage avec Don Alvaro, un métis péruvien descendant d’une lignée royale. Sa voix envoûtante faisait vibrer la salle lorsqu’il chantait « Paix, paix, mon Dieu ! » (Paix, paix, mon Dieu !), une invocation de paix, peu avant de mourir dans les bras de son nouvel amant. Pour la diva, la voix de Leonora est unique dans le répertoire de Verdi : « Tu dois être au paradis pour chanter ce rôle « Ô » laissez-vous transporter par quelque chose de surnaturel ».
Un nouveau venu de Primaire », le ténor américain Brian Jagde, a interprété avec brio le rôle de Don Alvaro. Après avoir accidentellement tué le marquis de Calatrava, Don Álvaro s’engage dans l’armée espagnole et Leonora trouve refuge dans un couvent. Obsédé par un féroce désir de vengeance, le frère de Leonora, Don Carlo di Vargas, les suit.
Don Carlo est joué par le baryton français Ludovic Tézier, qui voit « un personnage d’une grande profondeur psychologique “, dévoré par un” forte haine » et « l’esprit de vengeance « . L’émotion était palpable dans la salle lorsque le baryton, très applaudi, a chanté ” Mourir! Chose terrible ! » (Meurs ! Comme c’est effrayant !), avec une voix expressive qui mélange force et douceur.
Depuis 1869 à La Scala
La scène est dominée par un perpétuel va-et-vient de soldats, de pèlerins et de moines, qui traversent quatre siècles en quatre actes, dans un univers marqué par une succession de guerres, de faim et de froid. ” Nous avons imaginé une sorte de roue du destin qui tourne inexorablement, avec des personnages évoluant dans la direction opposée à travers des scénarios toujours changeants. » explique le réalisateur Leo Muscato.
La Force du Destin elle fut jouée pour la première fois à La Scala en 1869 et y connut un grand succès, même si le mélange de moments tragiques et comiques déconcerta une partie du public. Mais son histoire est pleine de coïncidences désastreuses qui ont créé un climat de superstition autour de cette œuvre. Le célèbre baryton américain Leonard Warren est décédé sur scène au Met de New York en 1960, lors de la représentation intégrale de l’opéra.