Une première partie fraîche et passionnante, une deuxième partie plus équilibrée : Les Forces dans lesquelles vous vivezLe spectacle présenté à l’Odéon-Théâtre de l’Europe par Camille Dagen ( Emma Depoid) contraint la critique à une gymnastique dichotomique, qui n’est pas incohérente si l’on considère le caractère émouvant et indispensable du sujet exploré.
Simone de Beauvoir (1908-1986) est au centre de toutes les attentions. Divisée en deux temporalités (avant et après la Seconde Guerre mondiale, cette dernière évitée lors d’un intervalle sous-titré « 1939-1945 »), l’exposition ne perd jamais de vue ce grand philosophe du XXe siècle.e siècle, dont les écrits (Mémoires d’une fille bien rangée, La force de l’âge, La force des choses, Carnets de jeunesse et Le deuxième sexe) innervent chacun des mots.
Le romancier fait bien plus que stimuler la créativité des artistes. Son désir frénétique d’avoir une vie désirée de A à Z donne naissance à une représentation qui ne doit sa forme qu’à elle-même. IL Les forces vivent il ne s’agit ni d’un biopic ni d’une entrée plate et littérale dans l’œuvre, mais d’une série décisive de choix dramaturgiques qui supposent de laisser des pans entiers d’une existence sur le bord de la route.
Le titre doit être pris au pied de la lettre : par l’intermédiaire des comédiens, ce sont en fait des vitalités énergétiques qui se manifestent et résolvent, au fur et à mesure, les problèmes de mise en scène. Camille Dagen ne s’interdit rien : le comique (même le vaudeville) comme le drame, le réel comme le onirique, les accélérations et décélérations, les flashbacks comme les bonds en avant. Son geste, d’une véritable imagination, s’appuie sur les fondements du théâtre – son immédiateté et sa maîtrise – avec une grande assurance. S’il n’évite pas certaines erreurs, son enthousiasme est contagieux, son talent évident.
Cinque Simone sur scène
Placés sous la haute autorité de « Castor » (surnom donné à Beauvoir par un de ses camarades de l’Ecole Normale Supérieure), sept excellents comédiens jouent dans des décors dont ne subsistent que les cadres ajourés. Pliables et mobiles, ils permettent de reconfigurer constamment les espaces. Il ne s’agit pas de figer la scène et d’immobiliser une pensée construite à vue. Dédiée à la jeune Simone, la première partie est un feu d’artifice de réalisations. Celles du spectateur qui réalise de quel terrain originel l’écrivain s’est dégagé. Celle de l’écrivain qui se démarque de l’intolérance de sa mère et des penchants réactionnaires ou misogynes de son père.
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