Des mers aux larmes, l’eau racontée par les artistes de la Villa Médicis

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Œuvre de Laure Prouvost dans l’exposition « Il Canto delle Sirene », à la Villa Médicis, à Rome, en 2024. DANIELE MOLAJOLI

De la superbe fontaine de Laure Prouvost, qui domine l’esplanade devant les jardins et étanche la soif des oiseaux, jusqu’aux profondeurs antiques de la Citerne, où est projeté un film de science-fiction hydroféministe de Madison Bycroft, l’eau s’est infiltrée dans tout l’espace. Villa Médicis, sur les hauteurs de Rome. C’est l’exposition “Histoires de pierres”, conçue en 2023 à partir de la collection minérale de l’écrivain surréaliste Roger Caillois, qui a suscité l’envie des commissaires, Sam Stourdzé, également directeur de l’Académie de à Rome, et Caroline Courrioux, proposent ce contrepoint : un voyage dans la création artistique à travers le prisme de l’eau. De ses aqueducs pour la distribution de l’eau potable à ses nymphées – petits temples construits au-dessus des sources, progressivement disparues – Rome, également capitale de l’eau bénite, s’y adapte parfaitement.

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Si l’exposition, contrainte par le fait de rassembler le travail de près d’une trentaine d’artistes contemporains internationaux dans des espaces d’exposition atypiques et compliqués, n’impressionne pas au premier abord, la déambulation s’avère passionnante. Et plein de surprises, comme l’introduction en forme d’immersion avec le Grec Yiannis Maniatakos (1935-2017) et ses peintures littéralement sous-marines. L’étonnante technique de peinture à l’huile imaginée par cet artiste cycladique, appliquée en mer, par pression avec un couteau à palette muni de poids, d’un masque et de tubes à air, donne à ses toiles un aspect rugueux, presque flou. Et sa façon de se fondre avec ces paysages abyssaux produit des palettes insolites, entre fonds turquoise et gouffres bleu-noir.

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« Underwater », de la série « Ama » (1985-1988), d'Uraguchi Kusukazu.

« Underwater », de la série « Ama » (1985-1988), d’Uraguchi Kusukazu. DANIELE MOLAJOLI

Le peintre des sirènes annonce d’autres sirènes, comme la Ô Japonais, ces « femmes de la mer » dont le photographe Uraguchi Kusukazu a documenté la vie quotidienne de l’apnée et de la pêche aux algues dans les années 1970 et 1980, avant que la profession ne disparaisse progressivement. En écho à ces plongées, une vidéo de Monira Al Qadiri emmène les visiteurs dans le golfe Persique, où l’un de ses grands-pères travaillait sur un navire perlier. L’artiste koweïtien revisite de manière onirique cette période où la culture des perles n’avait pas encore remplacé les nageurs de la région : on y voit des nageurs synchronisés dans la mer, en combinaisons aux reflets irisés, évoluer au son des chants traditionnels qui figuraient à bord de ces bateaux, et aujourd’hui presque oubliés.

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