les cinéastes Jacquot et Doillon en garde à vue à Paris – .

Nette accélération dans une enquête phare du #MeToo français : les cinéastes Benoît Jacquot et Jacques Doillon, accusés depuis plusieurs mois par l’actrice Judith Godrèche et d’autres femmes de violences sexuelles, sont en garde à vue à Paris lundi.

Les deux hommes contestent ces accusations. Ils sont arrivés lundi matin à la Direction régionale de la police judiciaire à Paris accompagnés de leurs avocats, a constaté un journaliste de l’AFP.

Benoît Jacquot « va enfin pouvoir parler devant la justice », a réagi son avocate Julia Minkowski, qui a dénoncé une garde à vue « critiquable » alors qu’« une audience libre aurait dû être décidée ». « Je déplore tous ces dysfonctionnements de la justice, grâce à une ultra-médiatisation qui conduit à des dérives inacceptables », a-t-elle ajouté.

Pour Me Marie Dosé, avocate de Jacques Doillon, « aucun des critères légaux ne pouvait justifier cette mesure » de garde à vue, « 36 ans » après les faits dénoncés par Judith Godrèche. Son client « aurait dû être entendu dans le cadre d’une audience libre au vu de l’ancienneté des faits, de leur prescription acquise depuis plus de deux décennies, et de l’inévitable classement sans suite qui clôturera cette enquête », a-t-elle ajouté dans un communiqué. « Sa présomption d’innocence est bafouée à longueur de journée » dans cette « procédure largement contaminée par des considérations extrajudiciaires », notamment de « communication ».

Selon des sources proches du dossier, ces gardes à vue pourraient permettre des affrontements entre chacun des réalisateurs et leurs accusateurs respectifs, dont Mme Godrèche. ” Je pleure (…). Je ne sais pas si j’en ai la force mais je le ferai. Je l’aurai, je l’aurai” a réagi l’actrice sur Instagram lundi matin, dans un message accompagné d’une photo sur laquelle elle apparaît avec Benoît Jacquot.
L’avocate de Mme Godrèche, Laure Heinich, a refusé de commenter, soulignant le secret de l’enquête.

“Prise”
Début février, sa cliente de 52 ans a déclenché une nouvelle tempête dans le #MeToo français en portant plainte contre Benoît Jacquot pour viol et Jacques Doillon pour agression sexuelle. M. Jacquot et Mme Godrèche, nés en mars 1972, ont commencé leur relation au printemps 1986. Ils ont vécu ouvertement ensemble, achetant même un appartement à Paris, jusqu’à leur séparation en 1992. Pour l’actrice, il s’agissait d’une relation de « contrôle » et « perversion ».

Deux autres actrices ont porté plainte contre M. Jacquot. Julia Roy, de 42 ans sa cadette et qui a joué dans quatre de ses films entre 2016 et 2021, a porté plainte pour agression sexuelle dans « un contexte de violence et de contrainte morale qui a duré plusieurs années », selon une source proche du dossier. . L’actrice Isild le Besco a porté plainte fin mai pour viol sur mineur de plus de 15 ans et viols, remontant aux années 1998-2007.

Quant à M. Doillon, Mme Godrèche lui reproche de l’avoir « pelotée » lors d’une scène de sexe non planifiée sur le tournage d’un film en 1989 alors qu’elle avait 15 ans et qu’elle était en couple avec Benoît Jacquot. Isild Le Besco a également indiqué avoir dû subir les avances de M. Doillon lors des séances de travail, tandis que l’actrice Anna Mouglalis accusait le cinéaste de l’avoir embrassée de force chez lui en 2011.

Cette nouvelle vague d’accusations dans le #MeToo français a mis le cinéma français en ébullition début 2024 et ébranlé la cérémonie des César du cinéma français et le Festival de Cannes. Une commission d’enquête sur les violences sexuelles dans le cinéma, l’audiovisuel, les arts du spectacle, la mode et la publicité a débuté en mai mais a été brutalement interrompue après la dissolution de l’Assemblée nationale française début juin.

Vendredi, Dominique Boutonnat, l’un des hommes les plus puissants de la profession en France, a quitté la tête du Centre national du cinéma (CNC) après sa condamnation pour agression sexuelle.

Gérard Depardieu doit être jugé en octobre à Paris pour agressions sexuelles sur deux femmes, et risque un procès pour viol pour une troisième.