La toute première Miss France, élue « Plus belle femme » du pays en 1920, repose toujours en paix mais n’est plus totalement dans l’anonymat. Depuis l’inauguration du tombeau rénové d’Agnès Souret, ce vendredi 14 juin, à Espelette, sa courte vie (1902-1928) a enfin dépassé le stade Wikipédia pour entrer dans la postérité. Et ce, malgré une cérémonie marquée par l’absence du comité Miss France – faute de temps – et des députés, qui n’avaient pas vu venir cette période de réserve électorale. « Dommage », estime Jean-Marie Iputcha. Entre nous, on est bien aussi. »
Le maire d’Espelette pense que le souvenir d’Agnès Souret retiendra l’attention, avec ou sans l’Aréopage invité. Sa première Miss ne fait cependant pas partie du club des 27 (1), puisqu’elle est décédée à 26 ans. De plus, la floraison de son tombeau est en retard par rapport à celle de Luis Mariano, qui voit passer près de 30 000 admirateurs par an à Arcangues.
Le guide et la miss observent ensemble ce lieu de contemplation rénové.
Bertrand Lapègue/SO
“Son nom n’est certes pas aussi connu, mais Miss France parle à tout le monde”, souligne Jérôme Zapata. Guide conférencier à Saint-Jean-de-Luz, il reste bien informé sur la reine de beauté et son mausolée, qu’il fait visiter aux touristes depuis dix ans. « De style Art Déco, ma spécialité, son tombeau est l’un des deux seuls en Aquitaine à avoir été classé monument historique. Tout s’est accéléré lorsque j’ai lancé une pétition en ligne pour le rénover”, ajoute le guide. En effet, 18 000 euros ont été débloqués (2).
« Devenez comme elle »
L’ancien maire André Darraidou (1989-2006) fut le premier à imaginer cette beauté, accolée à l’église Saint-Étienne d’Espelette. Son vœu est aujourd’hui exaucé : sous l’œil attentif des Affaires culturelles, les Compagnons de Saint-Jacques ont fini de traiter le marbre rose ; et Gérald Franzetti a soigné les vitraux avec soin. « Je trouve cette rénovation réussie », sourit Maude Ricard, élevée au rang de Miss Pays Basque en février. ” Cette femme [Agnès Souret, NDLR] C’est une référence pour nous, les Miss, poursuit la jeune Bayonnaise. On se dit qu’on pourrait peut-être devenir comme elle un jour. »
Devenir Agnès Souret ne consiste pourtant pas seulement à recevoir la couronne, sous les yeux émerveillés de Jean-Pierre Foucault. Cette conception implique aussi une vie brisée trop tôt par une péritonite, après l’avoir dévorée de cabarets en soirées mondaines, au début des années folles. Mais Maude pensait surtout à la couronne.
Le tombeau, de style Art Déco, est classé Monument Historique.
Bertrand Lapègue/SO
“J’espère que ce tombeau sera de plus en plus visité et fleuri”, poursuit Jérôme Zapata. « Il va falloir le mettre dans les guides », ajoute Jean-Marie Iputcha. On me reproche parfois d’en faire trop pour attirer les touristes. On me dit que le piment d’Espelette suffit à garantir notre notoriété. Mais je trouve normal de mettre en valeur notre patrimoine. Je serais surpris s’il y avait des pique-niques au cimetière. » Où l’on apprend, au passage, qu’Agnès Souret était une femme libre, modiste devenue danseuse de ballet puis danseuse de cabaret aux Folies Bergère. Qu’elle rêvait de marcher sur les traces de Sarah Bernhardt. Son tombeau suivra peut-être celui de Luis Mariano.
(1) Formé par des légendes de la musique décédées à l’âge de 27 ans, comme Jimi Hendrix, Janis Joplin, Jim Morrison, Kurt Cobain et Amy Winehouse.
(2) La Direction régionale des affaires culturelles a contribué à hauteur de 3 600 euros, auxquels s’est ajouté un don anonyme de 300 euros. Le reste du financement a été assuré par la mairie.
