Les dix jurés du Goncourt doivent voter lundi pour désigner le lauréat du plus prestigieux prix littéraire français, avec Kamel Daoud et Gaël Faye comme favoris pour succéder à Jean-Baptiste Andrea.
Restent quatre prétendantes, ces deux écrivains, l’un qui a été journaliste et l’autre qui est chanteur, et deux romancières qui apparaissent en outsiders, Sandrine Collette et Hélène Gaudy.
Comme c’est la tradition depuis plus d’un siècle, la décision a été prise à l’heure du déjeuner au restaurant Drouant, dans le quartier de l’Opéra à Paris.
Kamel Daoud, Franco-Algérien de 54 ans, avec « Houris » (éd. Gallimard), fiction sur les massacres de la « décennie noire » algérienne (1992-2002), a été nominé par cinq des six journalistes littéraires interrogés par Livres Hebdo est le vainqueur le plus probable.
“Kamel Daoud l’aura, pour des raisons non pas littéraires, mais politiques”, selon un rédacteur en chef qui s’est exprimé à l’AFP sous couvert d’anonymat. La décision de l’Algérie d’interdire les éditions Gallimard du Salon international du livre d’Alger, du 6 au 16 novembre, semble jouer en sa faveur, dans un contexte diplomatique très tendu entre la France et l’Algérie.
Mais il a un sérieux concurrent en la personne de Gaël Faye, 42 ans, avec « Jacaranda » (éd. Grasset), une autre fiction, celle-ci sur la reconstruction du Rwanda après le génocide de 1994.
Clair et sérieux
Les deux auteurs ont en commun non seulement d’avoir eu du succès en librairie lors de cette rentrée littéraire, mais d’avoir déjà été finalistes au Goncourt, respectivement en 2014 et 2016. Kamel Daoud, avec « Meursault, contre-enquête », puis a remporté le prix Goncourt du premier roman, tandis que Gaël Faye, avec « Petit pays », le Goncourt des lycéens.
Sandrine Collette, 54, with “Madelaine avant l’aube” (editions JC Lattès) and Hélène Gaudy, 45, with “Archipels” (editions de L’Olivier), arrive at this stage for the first time.
Leurs romans ont attiré l’attention par la qualité de leur style, mais sont publiés par des éditeurs moins influents auprès du jury, et de surcroît, n’ont pas un impact politique aussi fort.
Les médias ont exprimé leur préférence. Le quotidien Le Parisien déclarait début septembre avoir un faible pour le livre de Sandrine Collette, « magnifique et poétique, très dur mais parfois lumineux ». Le magazine « Télérama » penchait dimanche pour « le roman beau, limpide et sérieux de Gaël Faye ».
Le Goncourt 2024 est le premier décerné sous la présidence de Philippe Claudel. Élu à ce poste en mai, cet écrivain a déclaré vouloir « être un président démocrate, dont les jurés puissent être fiers ».
De nombreuses traductions
Il a précisé qu’il ferait tout son possible pour que l’Académie Goncourt ne reproduise pas le scénario de 2022 et 2023, à savoir 14 tours de scrutin, le maximum prévu, en raison d’une égalité persistante à cinq voix contre cinq.
Au-delà de la fierté d’inscrire son nom sur la liste, le prix Goncourt est un enjeu économique. Il est récompensé par un chèque de dix euros, que les gagnants choisissent traditionnellement d’encadrer.
Mais surtout, il permet de vendre des centaines de milliers d’exemplaires d’un livre que de nombreux lecteurs seront curieux de découvrir ou de proposer, et il ouvre la voie à de nombreuses traductions à travers le monde.
Si Kamel Daoud ou Gaël Faye venaient à perdre, tous deux ont un autre prix en vue, le Renaudot, traditionnellement décerné au même endroit, juste après. Ces deux auteurs sont finalistes, aux côtés d’Élisabeth Barillé (« Les Sœurs et autres espèces des vivants »), Antoine Choplin (« La Barque de Masao ») et Olivier Norek (« Les Guerriers de l’hiver »).
(AFP)