L’ancien juge Jacques Delisle enterré… avec la femme qu’il a tuée

Jacques Delisle, qui avait plaidé coupable en mars dernier à l’homicide involontaire de sa conjointe au terme d’une saga judiciaire de 15 ans, a finalement été enterré auprès d’elle après son décès il y a quelques semaines.

« On se demande si une peine de prison pour homicide a vraiment des conséquences pour l’Église. Il semble que non. Il y a une vraie question morale à se poser ici », affirme l’avocat et ancien ministre de la Justice Marc Bellemare.

L’ancien juge Jacques Delisle, qui a plaidé coupable à l’homicide de sa femme, est enterré avec elle.

Stevens LeBlanc/JOURNAL DE QUÉBEC

La pierre tombale, plutôt sobre, est située au coeur du cimetière Mont-Hermon de Québec, sur le chemin Saint-Louis, à Sillery. L’épitaphe mentionnant le nom de Jacques Delisle a été ajoutée au cours des dernières semaines sous le nom de sa victime, Nicole Rainville.

L’ancien juge Jacques Delisle est décédé début août 2024.

Photographie Stevens LeBlanc

La situation rappelle à M. Bellemare le cas de Marie-Paule McInnis, qui s’est battue pendant des années pour que les corps de ses enfants soient exhumés, enterrés avec leur père en Gaspésie. Ce dernier avait volontairement déclenché un incendie dans leur maison de Port-Daniel en 1996, les tuant tous les trois.

« Je ne suis pas là pour juger, c’est une question délicate. Mais disons que c’est un peu surprenant de voir que dans la mort, on met le criminel et sa victime dans la même tombe », souligne l’avocat.

Aucun problème avec l’Église

Rappelons que l’épouse de l’ancien juge Jacques Delisle a été retrouvée morte d’une balle dans la tête dans le condo familial à Sillery, en novembre 2009.

Jacques Delisle a ensuite affirmé que sa femme s’était enlevé la vie avec une arme qui se trouvait sur une table à l’entrée de l’appartement.

L’ancien juge a été reconnu coupable de meurtre prémédité en juin 2012.


Nicole Rainville, épouse et victime de l’ancien juge Jacques Delisle.

Photo d’archive

Se déclarant victime d’une erreur judiciaire, il a fait appel auprès du ministre fédéral de la Justice, qui a ordonné un nouveau procès dans cette affaire en 2021.

Une suspension de la procédure a été ordonnée l’année suivante, puis annulée par la Cour d’appel en 2023.

Contre toute attente, Delisle a finalement plaidé coupable à l’homicide involontaire de sa femme, le 14 mars, cinq mois avant sa propre mort.

Lorsqu’on lui a demandé s’il pourrait y avoir des questions de droit canonique dans un tel cas, le diocèse de Québec a indiqué que c’est le concessionnaire du lot qui a le dernier mot, «[…] tant que la personne décédée est catholique et ne s’est pas opposée [de son vivant] être enterré au cimetière ou au carré», précise le chancelier du diocèse, le père Serge Tidjani.

Décision familiale

« Le Code civil devrait être très clair lorsqu’une personne a été reconnue coupable de meurtre : la décision devrait être de la séparer de la victime lors de l’enterrement », estime le sénateur à la retraite Pierre-Hugues Boisvenu.


Retired Senator Pierre-Hugues Boisvenu

Photo d’archive, AGENCE QMI

Ce dernier a fait de la défense des victimes d’actes criminels son cheval de bataille depuis plusieurs décennies.

« Mais dans ce cas, c’est une affaire complexe car les enfants ont toujours cru leur père et ne se sont pas opposés à l’enterrement. [conjoint]même si cela soulève une question morale», poursuit M. Boisvenu.

Invitée à expliquer la situation, la fille du couple, Élène, a simplement répondu qu’il s’agissait d’une décision familiale.

La saga en bref

Novembre 2009
Nicole Rainville a été retrouvée morte dans le condo familial à Sillery, une balle dans la tête. Jacques Delisle affirme que sa conjointe s’est enlevé la vie avec un pistolet laissé sur une table à l’entrée.

Juin 2012
Jacques Delisle est reconnu coupable du meurtre au premier degré de sa femme après un procès de six semaines. Il est condamné à la prison à vie, devenant ainsi le premier juge canadien à être reconnu coupable de l’accusation la plus grave du Code criminel.

Mars 2015
Clamant son innocence et se déclarant victime d’une erreur judiciaire, Jacques Delisle a officiellement déposé une demande de révision ministérielle à Ottawa. L’ancien juge a donné pour la première fois sa version des faits et a reconnu avoir fourni une arme chargée à sa conjointe, qui se serait ensuite enlevée la vie.

Avril 2021
Après une longue enquête, le ministre libéral de la Justice, David Lametti, convaincu qu’il y avait eu une erreur judiciaire, a ordonné un nouveau procès. Delisle a été libéré sous conditions.

2022 et 2023
La Cour supérieure ordonne un arrêt des procédures et Jacques Delisle est libre. Quelques mois plus tard, la Cour d’appel annule cette décision. Delisle attend alors un deuxième procès pour meurtre.

14 mars 2024
Dans un coup de théâtre, Jacques Delisle a plaidé coupable à l’accusation d’homicide involontaire sur la personne de sa conjointe et a été condamné à huit ans et 311 jours de prison, soit un jour de plus que sa peine actuelle. Il a admis avoir fourni l’arme à sa conjointe pour qu’elle s’enlève la vie.

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