Arnaud Démare évoque sa saison 2024 difficile, entre carrière cycliste et vie de famille

Trois ans après la sortie d’un premier livre, Arnaud Démare est revenu sur sa saison 2024, à travers une seconde écriture. Une année marquée par des difficultés sportives, mais aussi par des problèmes intra-familiaux. Lors d’une grande interview accordée à France 3 Hauts-de-France, le coureur est revenu sur ces moments.

“Au départ, le projet était de raconter mon arrivée chez Arkéa-B&B Hôtels. Le changement d’équipe, ma paternité avec ma fille qui a aujourd’hui 20 mois.« Début décembre 2024, Arnaud Démare, originaire de Beauvais, partageait avec nous les coulisses de son deuxième livre, Un an dans ma roue 2sorti un mois plus tôt.

Le journal de bord a dérivé, “progressivement vers un journal», témoigne le coureur professionnel. C’est pourquoi il “j’ai longtemps hésité“d’arrêter sa publication.”C’était tout simplement trop intime. Trop dur aussi. Je ne dis pas seulement de belles choses. On veut montrer qu’on est forts, qu’on va bien et finalement, je parle d’une année qui a été un peu galère. Ce n’est pas nécessairement ce que je voulais au départ. Je voulais parler des bouquets, des coupes, des trophées ramenés à la maison. Et finalement, ce n’est pas le cas.“

“En écrivant ce livre, j’ai pu me mettre un peu plus haut» sur l’année écoulée. Il évoque un «précipitation“lors des premières courses.”On sent beaucoup d’énergie à vouloir montrer sa valeur dès le début de saison, j’y vais à toute vitesse, et finalement, je m’épuise.“

Dans le livre, Arnaud Démare évoque aussi ses problèmes intra-familiaux. Des épreuves dans lesquelles de nombreuses personnes peuvent se retrouver, affirme-t-il. C’est l’une des raisons qui l’ont poussé à mener à bien la démarche. “J’explique ma paternité, c’est magnifique. Maintenant, il y a aussi des difficultés pour ma femme (pendant) mes absences. C’est vrai que tout seul, quand il faut gérer l’enfant, la routine du travail, rentrer à la maison, c’est un peu la course. Mes absences ne sont pas faciles.“Il en parle d’un.”pression» qu’il comptait sur sa famille pour accomplir.

Une pression qui se traduit par «sacrifices“et”exigences« . Le sprinteur prend comme exemple le refus de certains repas entre amis, afin de pouvoir se coucher tôt. Mais aussi le fait de «ne pas me promener en ville sur le marché parce que je dois faire mes quatre heures de vélo, parce qu’il ne faut pas trop piétiner. Il y a une exigence de performance qui est toujours omniprésente. Même quand je ne suis pas sur mon vélo, elle est là. Nous vivons avec. Mais avec un enfant, c’est encore plus difficile. Ce n’est pas facile.“

On parle aussi beaucoup de culpabilité dans ce livre.

Arnaud Démare, sprinter from Arkéa-B&B Hotel

Lors de l’entretien, l’Isarien explique les longues discussions avec Morgane, sa femme, pour qu’elle puisse écrire une lettre témoignant de sa dépression. “Ce n’était pas facile. C’était difficile pour elle, et donc pour nous. Elle avait ce besoin d’en parler aussi, de montrer aux autres femmes qu’il y a des moments, c’est très dur.“

Une période qu’il a dû gérer à distance. “Ma femme n’allait pas bien. Elle luttait pour se remettre de la dépression post-partum. Pour ma part, je voulais seulement terminer la saison. Et puis, étant avec eux, ma femme et ma fille. On parle aussi beaucoup de culpabilité dans ce livre. Je ne voulais pas que dans dix ans, ma fille dise qu’elle est papa, qu’il a arrêté le vélo à ma naissance, que ma femme dise à cause de moi, que mon mari n’est pas arrivé au bout de sa carrière.“

Le coureur dit s’être battu pour continuer, malgré des difficultés sur le plan sportif, par ailleurs. Il a eu des problèmes de santé deux mois avant le Tour de France. En parlant de cet événement, il pense à une scène où «il était mort“dans une ascension d’un col.”J’ai pensé à Morgane et elle a été mon moteur […] à chaque coup de pédale que je mettais, je pensais à elle. À ce moment-là, je me suis battu pour elle.“

Dans ce deuxième ouvrage, Arnaud Démare évoque également des retraites qui n’interviendront pas avant les cent victoires. Le coureur n’est qu’à trois levées de bras de cet objectif. Il rassure donc : «Je n’ai pas de date limite. Tant que je peux prendre plaisir à m’entraîner et à profiter des courses, je n’ai aucune raison de m’arrêter. A condition que je sois performant aussi, malgré une saison difficile.« Il relativise : »J’ai gagné deux courses. Certaines personnes ont du mal à gagner tout au long de leur carrière. Mais si je retrouve un rythme normal, je ne m’arrêterai pas à une centaine. Certainement pas.“

Le récit de la saison 2024 met en perspective les nombreux déplacements entre ses terres picardes et les déplacements pour les stages ou les courses. Il dit qu’il n’a jamais pensé à déménager, comme beaucoup, pour profiter du meilleur temps.

“Il est certain que nombreux sont ceux qui émigrent sur la Côte d’Azur pour de meilleures conditions de travail. Désormais, je suis très attaché à ma région, à ma famille. Ma sœur et mes parents sont à cinq minutes de chez moi. J’ai mes grands-parents, mes cousins, tout le monde est là. Et je suis trop attaché à ça pour aller vivre ailleurs. Je préfère vivre ici et finalement j’essaie de partir souvent pour des stages. Mais ma base et où je recharge mes batteries est ici», en Picardie.

Comme pour le premier opus, Arnaud Démare a reçu l’aide de Mathieu Coureau. Co-auteur, c’est lui qui a traduit les sensations qu’il a éprouvées à vélo, lors des stages et des courses, au travers d’échanges, via différents médias.

Pour la saison prochaine, l’Isarien assure «être revenu au cyclisme avec beaucoup de motivation« . Il espère débloquer le compteur des cent victoires et lever à nouveau les bras sur le Tour de France.

Avec Gaëlle Fauquembergue / FTV