Le psychiatre de 50 ans, d’origine saoudienne, impliqué dans l’attentat à la voiture bélier de vendredi à Magdebourg, a été condamné en 2014 pour « trouble à l’ordre public ».
Deux jours après l’attaque du marché de Noël de Magdebourg qui a fait 200 blessés et cinq morts, certaines carences des autorités allemandes sont pointées du doigt. Ce lundi matin, le quotidien Le monde révèle un jugement du tribunal de Rostock datant de 2014, qui condamne Taleb A., le principal suspect de l’attentat, à une amende pour “trouble à l’ordre public”. La cause ? Il aurait menacé, au lendemain du double attentat du marathon de Boston, faisant trois morts et plus de 250 blessés, de commettre le même type d’attentat.
« Avez-vous vu les photos de Boston ? Cela peut arriver ici aussi »
Récapitulons les faits. Début 2013, Taleb A., médecin d’origine saoudienne, aurait déposé une demande auprès de l’Ordre des médecins de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale pour être admis à l’examen de psychiatre. Il lui est alors demandé un diplôme spécifique, nécessaire pour valider son inscription. Ulcéré par la tournure des événements et la lenteur de la procédure, il téléphone au conseil de l’ordre. C’est une femme qui le reçoit. L’aspirant psychiatre lui donne dix jours pour approuver sa demande, faute de quoi “quelque chose de très grave et d’importance internationale” arriverait. « Avez-vous vu les photos de Boston ? Cela peut arriver ici aussi »il lui a répété. La veille de cet appel, le 15 avril 2013, deux frères d’origine tchétchène, américains récemment naturalisés, avaient posé deux bombes près de la ligne d’arrivée du célèbre marathon de Boston. Au terme d’une chasse à l’homme de quatre jours, l’un d’eux a été tué, l’autre capturé puis reconnu coupable. Ces attentats, les plus graves depuis le 11 septembre sur le sol américain, avaient des motivations supposées djihadistes qui n’ont jamais été élucidées.
La destinataire de cet appel a déclaré au tribunal qu’elle avait été interloquée par l’attitude de son interlocuteur, qui semblait “J’ai soigneusement réfléchi aux conséquences”. Pour se défendre, Taleb A. a expliqué qu’il subissait une énorme pression émotionnelle. D’abord en raison de sa situation financière tendue. Mais aussi à cause des menaces de l’Arabie saoudite, liées à ses positions contre l’islam sur les forums en ligne.
Demande d’extradition de l’Arabie Saoudite
L’individu était également surveillé par les autorités d’Arabie Saoudite, pays qu’il avait fui en 2006. L’Office fédéral allemand de la police criminelle a révélé que son administration avait reçu, en novembre 2023, un signalement de cet État du Golfe. Une enquête a alors été ouverte, puis classée, faute d’indices représentatifs d’un « danger concret ».
Ce lundi matin, une source a confirmé à l’AFP qu’il y avait “une demande d’extradition” de Riyad, dont les autorités avaient prévenu à plusieurs reprises Berlin du danger potentiel de Taleb A. Ces alertes n’ont pas été prises en compte, l’homme étant en désaccord avec ce pays qu’il avait fui après son apostasie dans les années 1990. Il y fut menacé de mort.
Selon ses interventions sur les réseaux sociaux, le suspect est depuis très impliqué dans la lutte contre l’islam strict. Il avait créé une association pour aider les anciens musulmans souhaitant quitter la région du Golfe à obtenir l’asile en Occident. “Il n’y a pas de bon Islam”a-t-il déclaré au journal allemand FAZ. Depuis un an, il avait affirmé sur son compte X son envie de “se venger” de l’Allemagne, incapable de protéger les réfugiés saoudiens. Le gouvernement allemand a promis une enquête rapide, visant à clarifier d’éventuelles erreurs des autorités dans la prévention de cette attaque meurtrière.