jeIl fallait du courage pour s’aventurer dans les tribunes d’Ernest-Wallon, sous la pluie et les bourrasques hivernales, et croiser les doigts pour que ces conditions météorologiques ne gâchent pas le spectacle. Les joueurs toulousains ont récompensé leurs vaillants supporters par un large succès qui confirme leurs bonnes intentions en ouverture de la Champions Cup. Pour la sixième saison consécutive, ils débutent leur campagne continentale par une victoire.
Un an après leur promenade dans le parc contre Cardiff (52-7), les tenants du titre ont récidivé face à l’Ulster (61-21). Il n’y avait pas de suspense. Une balle glissante, un terrain mou ? Le bonus offensif a été assuré après moins d’une demi-heure de jeu avec quatre essais marqués et un jeu ultra précis dans tous les secteurs. “Le format fait qu’on n’a pas le - d’y réfléchir, il faut qu’on soit tout de suite à notre meilleur niveau et ça nous donne un boost”, savoure Antoine Dupont.
Dans le sillage d’un peloton ultra dominant, à l’image d’une deuxième ligne royale (doublée par Emmanuel Meafou) qui gagnait du terrain à chaque impact, et d’une troisième ligne qui dominait la lutte au sol, les trois-quarts se sont régalés. Quand ils n’ont pas fait le travail eux-mêmes, comme ce quatrième essai d’Ange Capuozzo au terme d’une magnifique action qui a balayé tout le peloton. Ou encore le doublé de l’Italien, à la réception d’une passe fantastique de Dupont.
Pas satisfait
« Quand les conditions sont compliquées, on se concentre sur l’essentiel, la qualité de nos runs et de nos passes. Nous faisons donc de bonnes choses. On n’est pas allé trop loin, on n’a pas trop porté (le ballon), c’était intéressant. Et de bon augure pour l’avenir », a apprécié le manager Ugo Mola. Dont les troupes étaient aussi plus astucieuses, lorsqu’il s’agissait de se jeter sur un ballon sortant d’une mêlée (Flament) ou de gêner la retraite d’un défenseur adverse (Ramos).
Ce Stade Toulousain a beau avoir tant gagné, il n’est pas encore rassasié. Il a fallu voir la rage de Jack Willis après un scratch alors que le bonus était déjà acquis, ou la frustration de Peato Mauvaka lors de son remplacement en début de seconde période. Mola avait également aligné sa meilleure équipe du moment. « Jouer ici doit être plus difficile que de considérer le statut que vous pourriez avoir. L’émulation interne est notre juge de paix. Les files d’attente ne sont pas faciles à faire dans le bureau des entraîneurs. »
Bien entendu, ce succès doit être contrebalancé par le constat d’une opposition qui n’a pas vraiment été redoutable et qui s’est rapidement effondrée. Encore fallait-il en profiter et ne pas se laisser emporter. Toulouse a été impeccable en touche (13 sur 14) et en mêlée (7 sur 7), a habilement varié entre lancers de mains et utilisation des coups de pied, avec plusieurs 50:22 obtenus en seconde période, à la recherche de failles jusqu’à la fin. . Même si le banc n’avait peut-être pas le poids attendu.
Admiration irlandaise
«On sait que les primes sont importantes, surtout à domicile», a rappelé Dupont. On a vite senti qu’on avait le dessus en début de match, ça nous a enlevé un peu de pression. Ensuite, il restait beaucoup de - pour jouer, et c’est là qu’il ne faut pas se relâcher. Ce n’est pas toujours facile mais nous l’avons bien fait. » Le demi de mêlée connaît l’importance de faire le plein de points pour maximiser les chances de recevoir en huitièmes de finale.
Une forme d’admiration émanait également des propos de Richie Murphy, entraîneur principal de la province irlandaise : « Nous n’avions pas encore été confrontés à cela cette saison. Certains de nos joueurs n’ont disputé que quelques matchs avec l’Ulster. Ils ont pu découvrir ce qu’était le véritable haut niveau. » Son équipe a cependant fait preuve d’obstination en ne baissant jamais les bras et en marquant à chaque passage dans les 22 mètres toulousains.
Fine bouche
Il suffisait à Dupont et à ses camarades de se préserver de toute euphorie. « En première mi--, nous prenons deux essais sur trois périodes de jeu. A ce niveau, ce n’est pas possible. Nous allons travailler là-dessus», a souligné le capitaine. Qui a aussi constaté l’indiscipline des siens, pénalisés à douze reprises. « Sur certains faits de jeu, comme les hors-jeu de ligne où il faut juste penser à reculer, on n’a aucune excuse. Nous avons aussi manqué de patience par moments, nous voulions affronter tous les rucks. »
Plus de soixante points inscrits en Coupe d’Europe, neuf essais inscrits, et ces Toulousains parviennent encore à faire la fine bouche. Les Anglais d’Exeter, qui les accueilleront dimanche prochain, sont prévenus.
Réaction
Ugo Mola (entraîneur toulousain) : « Il y a toujours un peu à dire, mais compte tenu des conditions météorologiques et de l’intensité des duels, c’est bien d’avoir autant marqué. Même si je pense que nous laissons quelques tests en cours de route. Quand on a cette capacité à se rassembler, à jouer au rugby commun, c’est positif. Nous avions fait des choix assez forts sur la composition de l’équipe, l’intensité du début de match nous a rassurés dans ces choix et dans le fait que cette compétition reste unique. »