© XOSE BOUZAS/Hans Lucas via AFP
Loi spéciale ou ordonnance spéciale, la France dispose de plusieurs moyens pour éviter une paralysie qui empêcherait par exemple la rémunération des fonctionnaires. Mais qu’un nouveau Premier ministre adopte »un budget édulcoré» incluant des concessions ou que le budget 2025 soit identique à celui de 2024, le pays raterait son objectif de réduire son déficit public à 5% du PIB l’année prochaineprédit Maxime Darmet, économiste chez Allianz.
Un budget renouvelé pour 2024, entraînant un gel des dépenses de l’État en valeur, représenterait entre 15 et 18 milliards d’euros d’économiesexplique Mathieu Plane, économiste à l’OFCE. Soit un niveau proche de l’effort prévu dans le projet de loi de finances initiale (PLF) pour 2025. Les dépenses sociales, automatiquement indexées sur l’inflation, seraient cependant en hausse tandis que l’Etat devrait renoncer à des hausses d’impôts. – au moins 20 milliards d’euros – qu’il envisageait, comme la surtaxe sur les très hauts revenus ou sur les bénéfices des grandes entreprises.
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La banque Natixis estime que dans un tel scénario, le déficit atteindrait 5,3% votre PIBalors que Paris est déjà pointé du doigt par Bruxelles pour son déficit public excessif. Dans le cas d’un budget technique, les retraités verraient leur pension augmenter en fonction de l’inflation au 1er janvier, alors que le gouvernement prévoyait de le faire intégralement pour les pensions inférieures au SMIC, avec un certain retard.
La menace d’un alourdissement de l’impôt sur le revenu est également brandie par le gouvernement. “Près de 18 millions de Français verront leur impôt sur le revenu augmenter, d’autres le paieront pour la première fois car il n’a pas été possible d’inscrire dans la loi de finances la réindexation qui est prévue (…) pour le barème des tranches d’imposition, c’est inévitable», a déclaré le Premier ministre Michel Barnier, invité de France 2 et TF1 mardi soir.
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Faible croissance
Ce scénario est cependant loin d’être le plus probable pour le directeur des études économiques à l’IESEG School of Management Eric Dor, contacté mardi soir par l’AFP. Un budget pour 2025 voté plus tard, au cours de l’année 2025, »contiendra nécessairement cette clause puisqu’il est d’usage de la mettre», souligne-t-il.
Les collectivités locales, dont les dotations versées par l’État risquent d’être gelées, pourraient faire partie des perdantes, souligne Maxime Darmet, qui y voit un risque pour le fonctionnement des services publics. Certains pourraient compenser ce déficit en augmentant les impôts locaux, notamment impôt foncierselon lui.
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La réduction des dépenses pèsera sur la croissance, à des degrés divers selon les scénarios. “Avec un budget reconduit dans les termes de 2024, et notamment sur la partie dépenses, on aurait un renversement de ce qui a permis, pour l’instant, de maintenir un peu de croissance en France.», à savoir investissement publicexplique Charles-Henri Colombier, directeur économique de Rexecode. La pression fiscale croissante sur le revenu des ménages ne serait pas non plus de nature à encourager la consommation.
À cela s’ajouterait une accentuation de l’effet négatif de l’incertitude politique – jusqu’ici estimé à 0,2 point de PIB pour 2025 par l’OFCE – ce qui conduirait les ménages et les entreprises à un attentisme prolongé. M. Colombier mentionne également la méfiance croissante des investisseurs étrangers. Et moins de croissance signifie moins de recettes fiscales, ce qui complique l’équation budgétaire.
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Chocs financiers
«Les conséquences de la censure pourraient nous coûter la confiance de nos créanciers et de nos voisins», a prévenu mardi le président du Medef Patrick Martin, la première organisation patronale. Résistant à l’incertitude, les marchés financiers connaissent déjà des secousses. Après que Michel Barnier ait demandé des comptes à son gouvernement, le taux des obligations publiques françaises à dix ans a immédiatement grimpé, passant en quelques heures de 2,86% à 2,92%.
Le “propagé», l’écart entre les taux de la France et de l’Allemagne, baromètre de la confiance des investisseurs, a également connu une hausse rapide lundi, pour atteindre 0,88 point. «L’impact de cette instabilité politique, vous le verrez immédiatement dans les taux d’intérêt qui nous étranglent», a déclaré mardi soir Michel Barnier, évoquant «des sommes gigantesques pour payer des intérêts aux financiers, aux fonds d’investissement chinois, japonais ou américains».
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Dans son malheur, la France a un allié de taille : la Banque centrale européenne. En juin, elle a engagé une politique de baisse des taux, rendue possible par la baisse de l’inflation dans la zone euro, atténuant la pression sur les taux d’intérêt des obligations d’État. Il reste que «si rien ne change dans les prochains mois, la lassitude pourrait s’installer sur les marchés, et alors tout pourrait très vite dérailler», prévient Aurélien Buffault, gérant obligataire de Delubac AM.
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