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Paul Kircher et Angelina Woreth, ici dans le film « Leurs enfants après eux ».
CINÉMA – 700 000 exemplaires plus tard, Leurs enfants après eux est de retour. Pas pour un deuxième tome en librairie, mais sur grand écran. Le best-seller de Nicolas Mathieu arrive au cinéma ce mercredi 4 décembre, dans une adaptation signée des frères Boukherma, cinéastes remarqués pour leurs brillantes comédies Nounours et L’année du requin.
Exit l’humour. Les jumeaux du Sud-Ouest sont restés fidèles, ici, à la fresque romantique, Prix Goncourt 2018. Nous sommes en 1992 à Heillange, et Anthony (Paul Kircher), un jeune garçon frappé par l’ennui, tombe sous le charme immédiat de la belle. Stéphanie (Angelina Woreth), lors d’une chaude après-midi d’été au bord du lac.
Le coup de foudre ne semble pas réciproque, mais la jeune fille – issue d’une bonne famille locale – l’invite, lui et son cousin, à faire la fête le soir même. Super, mais comment y arriver ? Après une minute d’hésitation, les deux adolescents enfourchent la moto de leur père. Problème de taille : il a disparu au moment de rentrer chez soi au petit matin.
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Anthony est foutu. Si son père (Gilles Lellouche) l’apprend, il est mort. Sa mère (Ludivine Sagnier), inquiète des coups et des possibles répercussions sur elle et son fils, tente de cacher l’affaire. Trop tard. Un soir, en rentrant du travail, elle aperçut une foule dans le quartier. La raison de ce regroupement ? Une moto en flammes. C’est celui du père. Vite, il faut fuir.
Pourquoi avez-vous un « mauvais regard » ?
Époustouflant, le film des frères Boukherma réussit l’adaptation d’un livre dense de plus de 400 pages en 2 heures et 15 minutes. Ce point fort est aussi son point faible. Tout s’enchaîne, au risque parfois de s’essouffler. Au risque également de négliger certains personnages, et notamment ses héroïnes qui servent les besoins des protagonistes masculins plutôt que le scénario.
L’accent mis par exemple sur les parties dénudées du corps de Stéphanie en maillot de bain pose question. Celui sur ses fesses, quand elle couche avec Anthony dans la voiture aussi. Faut-il y voir une forme de « regard masculin » ? ” Je trouve injuste qu’on nous parle de ça », répond Ludovic Boukherma. Ce à quoi son frère ajoute : « Quand on regarde une jeune fille à travers les yeux d’un adolescent amoureux d’elle – comme dans notre film – ce n’est pas de la « gaze masculine ». »
Stéphanie, Zoran Boukherma nous raconte : « c’est un personnage qui existe beaucoup aux yeux d’Anthony car on a beaucoup resserré l’histoire « . Elle entre et sort régulièrement du film. ” Lorsqu’elle n’est plus là, le mystère règne autour de sa personne. Nous sommes à une époque où les réseaux sociaux n’existent pas. Anthony ne peut pas continuer à la suivre sur Instagram », poursuit le cinéaste de 32 ans.
Son frère défend l’idée d’avoir filmé tous les corps, y compris ceux des garçons. ” Nous les imaginions opposés à ceux des adultes, plus meurtris par la vie et frappés par la réalité.Ludovic Boukherma nous le raconte. Leurs corps expriment la désillusion. Et ceux des jeunes, de l’espoir. »
La masculinité, selon les frères Boukherma
Concept développé par la réalisatrice féministe britannique Laura Mulvey dans les années 1970, le « regard masculin » fait référence à une manière de sexualiser les femmes à l’écran en les transformant en objets. Présentées comme désirables aux yeux des hommes, elles sont déshumanisées.
« Le regard masculin n’est pas un problème en soi » si cela sert à quelque chose, estime Zoran Boukherma. ” Qu’est-ce qui pose problèmeil ajoute, c’est sa prédominance. Les points de vue devraient être plus diversifiés. » Cette question, nous dit-il, les jumeaux se la posent « en tant qu’hommes » avant chaque film, conscients que cela influence forcément leur façon de filmer.
A leur manière, ils tentent d’y répondre, par exemple en s’adressant à « la place occupée par la masculinité dans [leur] construction « . A titre d’exemple, ils évoquent le choix du casting des deux héros du film, Paul Kircher et Sayyid El Alami. Loin des stéréotypes de virilité, les deux hommes n’ont ni le physique ni même forcément l’attitude des Anthony et Hacine du livre.
« Nous voulions que ces deux garçons s’opposent de manière violente, mais pas qu’ils affichent cette violence.Ludovic Boukherma nous le raconte. Comme si dans leur environnement, c’était par la violence qu’ils devaient s’affirmer. Ils ne font que reproduire la violence de leurs pères. Une violence sociale qu’ils subissent eux-mêmes. » Un déterminisme, reflet aussi d’un inconscient patriarcal. Comme le « regard masculin » ?
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