Les obligations et actions souveraines françaises ont chuté mercredi alors que les investisseurs craignent de plus en plus qu’un différend sur un projet de budget d’austérité puisse faire tomber le gouvernement du Premier ministre Michel Barnier.
Ces ventes massives ont poussé l’écart entre les coûts d’emprunt français à 10 ans et ceux de l’Allemagne jusqu’à 0,9 point de pourcentage, un niveau jamais atteint depuis la crise de la zone euro en 2012. Il est ensuite retombé à 0,86 point.
L’indice boursier de référence Cac 40 a chuté de 0,7 pour cent, ce qui en fait le moins performant parmi les principaux marchés européens. Les banques et les assureurs ont été les plus durement touchés, Axa en baisse de 4,3 pour cent et la Société Générale en baisse de 3,5 pour cent.
Barnier cherche à faire adopter un budget prévoyant 60 milliards d’euros de réductions de dépenses et d’augmentations d’impôts malgré l’absence de majorité au Parlement. Il a confirmé qu’il devra utiliser un outil constitutionnel pour empêcher les législateurs de le faire, une décision qui l’exposera à un vote de censure qui pourrait faire tomber son gouvernement ainsi que son budget.
“La liquidation est due aux craintes d’un éventuel effondrement du gouvernement Barnier”, a déclaré Gareth Hill, gestionnaire de fonds obligataires chez Royal London Asset Management. Si le budget n’était pas adopté, le défi consistant à réduire le fardeau de la dette de la France deviendrait « encore plus difficile », a-t-il ajouté.
La dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen est devenue un acteur clé dans ce drame, car son parti, le Rassemblement national, est le plus important à la chambre basse et ses voix seraient nécessaires pour qu’une motion de censure soit adoptée. Après avoir rencontré Barnier lundi, Le Pen a averti que le Premier ministre n’écoutait pas ses demandes de protéger les Français des hausses d’impôts et elle a réitéré sa menace de renverser le gouvernement.
Dans une interview accordée mardi à la chaîne française TF1, Barnier a appelé les partis d’opposition à adopter le budget, arguant que s’il n’était pas adopté, il y aurait « une grosse tempête et de très graves turbulences sur les marchés financiers ».
Le bras de fer entre Barnier et le Parlement pourrait atteindre son paroxysme dès la semaine prochaine avec un vote sur les dépenses sociales, qui pourrait conduire à un premier vote de censure. Alternativement, le gouvernement pourrait être confronté à un vote de censure quelques jours avant Noël.
Dans un contexte d’instabilité politique, la liquidation des obligations d’État françaises a poussé le rendement des obligations à 10 ans au-dessus de 3 pour cent, alors que les investisseurs s’inquiètent de la viabilité de l’endettement de Paris. Les rendements sont désormais à peine inférieurs à ceux de la Grèce, pays au cœur de la crise de la dette souveraine il y a plus de dix ans.
Le déficit budgétaire de la France est en passe de dépasser 6 pour cent du PIB cette année, soit plus du double de l’objectif de 3 pour cent de l’UE.
Bruxelles a placé la France dans un processus de surveillance des « déficits excessifs » pour la pousser à réduire ses déficits sur une période de cinq ans.
Barnier avait promis de ramener le déficit à 5 % du PIB d’ici la fin 2025 – un objectif que les économistes considèrent désormais comme improbable – et de revenir dans les limites de l’UE d’ici 2029.
« Il est difficile d’être trop optimiste quant à l’évolution de la France », a déclaré Mark Dowding, directeur des placements chez RBC BlueBay Asset Management. « Il y a un risque que [government bonds] pourrait subir de nouvelles pressions à la vente si le contexte politique se détériore.