Il fut un temps, il n’y a pas si longtemps, où affronter la Nouvelle-Zélande, c’était l’assurance d’en prendre un bon, du genre qui permettait de s’habiller pour l’hiver, et parfois les deux ou trois suivants avec. Nous ne sommes malheureusement pas assez jeunes pour avoir oublié le désastreux quart de finale de la Coupe du Monde 2015, ce 62-13 digne d’une nation de Tier 2, ni les 127 points pris au visage en trois essais lors de la tournée dans le Pacifique Sud, en 2018.
Mais c’était avant. Avant que le XV de France marque 40 points sur les All Blacks lors d’une soirée bénie de novembre 2021 et les bat en ouverture de la Coupe du monde. Avant également, les Néo-Zélandais montraient qu’eux aussi pouvaient connaître de graves trous d’air.
Les yeux dans les yeux
Ces dernières années, ils ont concédé le plus gros revers de leur histoire (35-7 contre l’Afrique du Sud en 2023), ont été humiliés à deux reprises à domicile par l’Argentine (2022 et 2024) et ont subi trop de fois la loi irlandaise pour que ce soit le cas. considéré comme un accident. Tout cela a marqué un certain déclassement, même si cela reste forcément relatif quand on parle de LA nation du jeu. Le terme de « démythification » serait peut-être mieux adapté. Quoi qu’il en soit, la France, dynamisée par l’arrivée de Fabien Galthié aux commandes, n’est plus l’enfant qui attend la leçon.
« On ne regarde plus cette équipe comme on la regardait il y a quelques années, quand on accumulait les défaites. C’est du 50/50, parce qu’on a autant de talent qu’elle, a déclaré mercredi Gaël Fickou, qui avec ses 91 sélections a tout connu face aux Blacks. Cela reste un match unique, une équipe qu’on aime jouer, qui déclenche toujours une ferveur incroyable. Cela va être un gros défi, on sait à chaque fois qu’on se retrouve face aux meilleurs, mais je pense qu’on a les moyens de rivaliser avec elle. »
Une troisième victoire consécutive des Bleus face aux All Blacks – ce qui n’est arrivé qu’une seule fois dans son histoire, en 1994-95 – est à sa portée mais attention, les Néo-Zélandais arrivent à Paris lancés comme des avions. Après des débuts chancelants à la tête des Fougère suite à la Coupe du Monde, le nouveau sélectionneur Scott Robertson semble avoir trouvé sa voie. Son équipe vient de s’imposer coup sur coup en Angleterre (22-24) et en Irlande (13-23), ce qui montre encore le niveau d’adversité qui attend Galthié et ses hommes.
“Au combat, ça pique”
« C’est une équipe en train de régler ses comptes après avoir traversé des années compliquées », observe le sélectionneur. A bien les connaître, j’ai vraiment l’impression qu’ils veulent retrouver le leadership mondial. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas joué les All Blacks à ce niveau. » Lors de ce début de tournée dans l’hémisphère nord, ils ont montré un nouveau visage, rugueux, clinique, avec notamment un troisième ligne dévastateur. Et si le capitaine Sam Cane doit l’abandonner cette fois, Ardie Savea, meilleur joueur du monde en 2023, et le jeune Wallace Sititi, révélation de ces derniers mois avec sa puissance de buffle (113 kg) et son cardio marathon, veilleront à ne pas l’abandonner. perdre de bonnes habitudes.
La présentation est de Xavier Garbajosa, qui a fait part de ses impressions au Midol après avoir commenté ces deux derniers matchs sur beIN Sports :
« Pour moi, cette équipe n’est pas impressionnante dans le sens où on la comprend [d’habitude]avec ce côté magique, des garçons capables de faire des différences, des “décharges”, un jeu en défense, un jeu flamboyant. Aujourd’hui, les Blacks sont efficaces. Dans leur engagement, ils ont élevé leur niveau. Ça se voit dans les rucks, dans les contre-rucks, en défense… Ils sont beaucoup plus coriaces. Lors de ces deux matches contre l’Angleterre et l’Irlande, nous ne nous sommes pas amusés. Mais ensuite, dans le combat, ça pique. Les Néo-Zélandais ont étouffé les deux équipes. »
Galthié admiratif et… un peu jaloux
La patte du nouvel entraîneur, évidemment, un ancien troisième ligne international qui, à son époque de splendeur, était surnommé « Rasoir » pour sa prédisposition à démembrer tous ceux qui se présentaient devant lui. Avec en plus le retour de Beauden Barrett en numéro 10, même si Damian McKenzie avait parfaitement pris le relais à Dublin, c’est une armée qui se présente au Stade de France.
“Ils sont capables de répondre à toutes les formes de rugby, très bons dans les phases de conquête pure, le jeu au sol, le combat aérien, avec toujours autant de vitesse sur la ligne des trois-quarts et en troisième ligne”, énumère Galthié, admiratif et… un peu jaloux. Le sélectionneur français n’a pas manqué de souligner cette semaine que son homologue a bénéficié de ressources tout à fait différentes des siennes pour bâtir son équipe, constituée depuis juillet.
NOTRE DOSSIER XV DE FRANCE
Il commence tout juste son chemin vers la prochaine Coupe du monde, comme il l’a expliqué jeudi. Alors, entre ce XV de France en reconstruction et ces All Blacks qui semblent un peu plus avancés, qui sortira vainqueur du crash test ? On aurait pu conclure par « l’approche très rationnelle de la rencontre » prônée par Galthié, mais nous préférons vous laisser sur ces mots du poète de Montgesty : « Qu’est-ce qui pourrait nous poser problème à leur sujet ? Tous. Cela va être un match extrêmement difficile. Mais fantastique. » Comme toujours.