La très chère banane de Maurizio Cattelan, un chef-d’œuvre d’art virtuel

La très chère banane de Maurizio Cattelan, un chef-d’œuvre d’art virtuel
La très chère banane de Maurizio Cattelan, un chef-d’œuvre d’art virtuel
>>
« Comedian », la banane de Maurizio Cattelan exposée à Art Basel Miami, en 2019. TIMOTHY A. CLARY/AFP

En exposant en 2019 à Art Basel Miami, sous le titre Comédien, une simple banane achetée sur un marché local et fixée au mur du stand de la galerie Perrotin avec un épais morceau de ruban adhésif argenté, Maurizio Cattelan avait fait le buzz. Puis début du scandale lorsque son galeriste annonce avoir vendu deux premiers exemplaires (il y en a trois, plus deux « épreuves d’artiste ») pour 120 000 dollars (113 907 euros), le troisième pour 140 000 – une sorte de bonus pour les deux acheteurs les plus rapides. Vie quotidienne Poste de New York puis titré : « Le monde de l’art devient fou… » Il lui faudra faire preuve d’imagination : l’un des exemplaires en question a été vendu mercredi soir chez Sotheby’s à New York pour 5,2 millions de dollars (4,7 millions d’euros), “prix d’adjudication” comme on dit lors des enchères, une formule qui sonne désormais plus juste, soit 6,2 millions de dollars (5,8 millions d’euros) frais compris.

Lire aussi : Une banane accrochée à un mur vendue 120 000 $ à la foire Art Basel… avant d’être mangée

Lire plus tard

Sept soumissionnaires étaient en compétition pour l’acquérir. Estimé par la maison de ventes entre 1 et 1,5 million de dollars – ce qui veut dire qu’elle avait déjà des acheteurs dans cette fourchette, qui représente pourtant dix fois son prix initial –, adjugé 800 000 dollars (759 000 euros), le fruit est assemblé en six minutes jusqu’à ce que la récompense finale. Son nouveau propriétaire est le chinois Justin Sun. Basé à Hong Kong, fondateur de la plateforme TRON, il a fait fortune dans les cryptomonnaies, qui se sont fortement appréciées depuis l’élection de Donald Trump.

Vendre virtuellement

Ce n’est pas la première incursion du milliardaire dans l’extrême avant-garde du marché de l’art : déjà en 2021, il était le sous-enchérisseur de la vente chez Christie’s de Tous les jours : les 5000 premiers joursune œuvre de Beeple, de son vrai nom Mike Winkelmann, artiste numérique américain. Garanti par un NFT (Non Fungible Token), sorte de certificat numérique d’authenticité, l’œuvre, qui est un collage d’images déjà mises en ligne par l’artiste, avait atteint la somme incroyable de 69,34 millions de dollars (65,83 millions d’euros). Ainsi, même s’il n’a pas remporté l’enchère, Justin Sun a montré qu’il pouvait déjà atteindre des sommets.

Pour quelle raison ? M. Sun lui-même l’a expliqué, dans un message posté sur X après la vente : «Je suis ravi d’annoncer que j’ai acquis avec succès l’œuvre emblématique de Maurizio Cattelan, Comédienpour 6,2 millions de dollars. Ce n’est pas seulement une œuvre d’art ; il représente un phénomène culturel qui relie les mondes de l’art, des mèmes et de la communauté des crypto-monnaies. » Parce que, quant à Tous les jours : les 5000 premiers joursla valeur de Comédien ne réside pas dans l’objet – Justin Sun a d’ailleurs annoncé son intention de manger la banane, dont il ne serait pas le premier, deux personnes l’ayant déjà fait sans autorisation – mais dans le certificat d’authenticité qui l’accompagne (ainsi que les notices de montage, etc.). Il ne s’agit pas d’un NFT (non-fungible token, ou « jetons non fongibles » en français), mais d’une version papier, cependant l’esprit est le même. Les deux vendent du virtuel. C’est un principe aussi vieux que l’art conceptuel et qui remonte même à Marcel Duchamp, voire plus loin si l’on considère que ce qui donne de la valeur à une œuvre, c’est la notoriété de l’artiste. C’est ce qui fait qu’un tableau presque entièrement restauré, mais attribué à Léonard de Vinci, peut être vendu pour 450 millions de dollars.

Il vous reste 44,18% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Nouvelles tendances du marché de l’art ancien
NEXT il photographie les cimetières pour préserver la mémoire de nos ancêtres