LLa salle de l’Abbaye aux Dames se remplit petit à petit ce mercredi 20 novembre au soir. Plus de 200 personnes ont poussé la porte pour assister à l’enregistrement de l’émission historique de France Musique, « La Tribune des critiques de records ».
Créée en 1946, c’est tout simplement la plus ancienne émission de Radio de France. “Ce n’est pas “Le Masque et la Plume”, ils font de fausses communications disant que c’est eux, je le leur rappelle, en les taquinant évidemment”, sourit Marc Voinchet, directeur de la station depuis 2015.
Rachmaninov et menu
Le principe de l’émission, animée par Jérémie Rousseau depuis 2014, reste avant tout ludique. Pour chaque numéro, une œuvre est choisie et plusieurs versions sont écoutées par des critiques, aux profils différents. Chacun donne son ressenti et les classe par ordre de préférence. Mercredi soir, ce sont les « Vêpres » (1915) du Russe Sergueï Rachmaninov qui étaient au centre de toutes les attentions. « Ce soir, nous allons proposer six versions enregistrées au fil du temps », précise l’animateur. Le premier date de 1965, il était destiné au label russe Melodiya. En raison de la politique antireligieuse, cette version était uniquement destinée à l’exportation. »
Nice, en 2022, Limoges, en 2023, c’est France Musique en Charente-Maritime. Marc Voinchet se réjouit que le spectacle puisse s’exporter dans la saison : “Oui, il faut sortir de la Maison Ronde [surnom de la Maison de la radio, à Paris] et venez voir les gens qui nous écoutent. L’idée est de briser l’image d’une radio parisienne élitiste. »
Ancienne recette
Ce sont souvent les idées les plus simples qui perdurent dans le temps et « La Tribune » en est le parfait exemple. « C’est toujours une audition à l’aveugle. Plus récemment, « The Voice » a repris le même principe. On écoute, on aime ou pas. Il y a un jury qui donne son avis. Avec « la Tribune », c’est pareil. »
En 2025, « La Tribune » innovera. Pour la première fois, dans l’émission du 16 mars, les œuvres classiques de l’option musique du baccalauréat 2025 seront critiquées à l’antenne par les étudiants : Carl Philipp Emanuel Bach, Concerto pour violoncelle, et Robert Schumann, « Carnaval » (extraits ). «Le programme peut être réécouté et servir de support de révision aux élèves», explique Jérémie Rousseau.
“Pas de vérité absolue”
Chaque dimanche, 300 000 auditeurs jouent avec Jérémie Rousseau et ses invités. Ce mercredi soir, à Saint-Etienne, l’animateur est accompagné de trois critiques : la journaliste culture de « La Croix » Emmanuelle Giuliani et deux locaux, en la personne de David Théodoridès, le directeur de l’Abbaye aux Dames, et Jean-Nicolas. Richard, directeur du conservatoire de Saintes.
Pas facile de trouver les mots justes lorsqu’on parle d’un extrait, tout en étant sincère et mesuré.
Armés d’une grille d’écoute et de la partition pour compléter leur ressenti, les trois critiques du soir redoublent de concentration à chaque version diffusée. Dans le public aussi où certains ferment les yeux. David Théodorides a passé « un moment merveilleux. La présence de France Musique ici est un grand moment fort pour la ville et l’Abbaye aux Dames. Ce n’était pas évident de trouver les bons mots, le bon ton, lorsqu’on parlait d’un extrait, tout en étant sincère et mesuré. Nous voyons qu’il n’y a pas de vérité absolue. »
«C’était un beau moment», résume Jean-Nicolas Richard. J’avais un peu d’appréhension car ce n’est pas un répertoire que je connais très bien. Pour moi, c’est plutôt de la musique de chambre. Jérémie Rousseau nous a mis à l’aise. J’ai trouvé nos impressions assez complémentaires. On constate tout de même qu’il y a une énorme part de subjectivité dans la musique. Je pensais apprécier la première version emblématique, enregistrée dans les années 1960 en URSS. D’ailleurs, c’est l’un de ceux que j’ai le plus critiqué… » Juste comme ça… Pour jouer aussi, rendez-vous dimanche 26 janvier, entre 16h et 18h sur France Musique.
A retrouver sur www.radiofrance/francemusique et au 88.4 à La Rochelle, 100.6. à Saintes, 97,4 à Royan, 91,1 à Rochefort.
Ce qu’ils pensaient
Ludovic, 49 ans, originaire de Saintes : « Le fait que des personnalités locales participent profane le spectacle. Même si je ne connais pas grand-chose en musique, je voulais venir voir l’enregistrement. »
Marin, 14 ans, écolier à René-Caillié, pratique la flûte traversière au conservatoire : « Sur les quatre premières versions de « Vêpres », j’ai été séduit par le A pour l’ensemble du chœur et le C pour le soliste. J’aime le côté ludique du spectacle où chacun peut se faire sa propre opinion. »