Lors de recherches généalogiques, Marcelle Mercier-Fages découvre l’existence d’un oncle mort pour la France dont le nom n’était gravé sur aucun monument aux morts.
Le 11 novembre, à l’issue des cérémonies de commémoration de l’Armistice, Marcelle Mercier-Fages se glisse entre les fonctionnaires et descend les marches du monument aux morts de Nîmes pour voir gravé deux semaines plus tôt le nom de Samuel Jeanjean. Pour elle, c’était l’aboutissement de plus de deux années d’engagement au service de la mémoire. “C’était un devoir, pour moi et pour mes descendants.”
Il y a quelques années, Marcelle Mercier-Fages a entamé des recherches généalogiques, elle a retrouvé les traces de sa famille dans les Cévennes dès le XVIIème siècle, et a suivi les traces de sa famille réunionnaise jusqu’en Inde. Mais un mystère était plus récent… Elle découvrit aussi que son oncle Samuel Jeanjean, né en 1898, obtint la Légion d’honneur pour des faits d’armes lors de la Première Guerre mondiale dont il revint gazé et fut déclaré mort pour la France, après avoir été tué. par les Allemands en 1944.
« Une histoire que je ne connaissais pas »
Petit à petit, elle parvient à reconstituer cette fin tragique. « Ma tante m’a toujours dit qu’il avait été tué par les Allemands, mais sans jamais entrer dans les détails. Je me suis retrouvé face à une histoire que je ne connaissais pas. Je me suis mis en quatre pour retrouver son dossier »explique-t-elle. “C’était une grande énigme mais les généalogistes persévèrent”sourit son mari, Alain Mercier.
Le cheminot part dans les Cévennes après le bombardement de Nîmes. Le 3 août 1944, il est arrêté pour contrôle par les FFI près de Florac. « Alors qu’il présentait ses papiers personnels, […] une colonne allemande, venant de Mende, déboucha précipitamment. »note la fiche d’information du Secrétariat général des Anciens Combattants. Les nazis ouvrent le feu. « Seul Jeanjean était […] grièvement blessé par plusieurs balles. Dans son acte de décès, le docteur Rouvière précise : « multiples perforations abdominales par des balles de mitrailleuses allemandes ».
“Pourquoi personne ne m’en a parlé ?”demande Marcelle Mercier-Fages, qui ne savait rien de cette histoire et veut savoir sur quel monument aux morts son nom était gravé. « J’ai cherché son nom à Plantiers, où il est né, il n’y était pas. Je me suis tourné vers Nîmes, où il vivait et où il a été enterré, il n’y était pas non plus. Elle entre en contact avec plusieurs autres passionnés de généalogie. Aucune trace… Elle contacte alors l’Ordre de la Légion d’honneur et se lance dans un nouveau combat pour que cette histoire soit gravée dans le marbre.
Après un refus de Gatuzières, près de Florac, elle se tourne vers Nîmes. Par l’intermédiaire de Pascal Coget, de l’Office national des anciens combattants, elle entre en contact avec Monique Boissière, conseillère municipale responsable des Armées et du monde combattant. « Il faut faire des recherches auprès de la préfecture, monter un dossier notamment avec l’acte de naissance constatant le décès pour la France. Ensuite, la mairie s’en charge. Pour les anciens combattants, c’est très rare. En revanche, nous avons récemment enregistré les noms de deux décès pour la France en opérations extérieures au Mali.explique l’élu, pour qui il est important que les familles continuent à entretenir cette mémoire. “C’est très bien, ça veut dire qu’on ne les oublie pas.”
En octobre, le nom de Samuel Jeanjean rejoint celui des milliers de Nîmois morts pour la France. « Je suis fier que son nom figure enfin sur un monument. Je n’aurais jamais abandonné. Je n’avais pas le droit de le laisser dans la nature, après ce qu’il avait vécu.