Un verdict sans réponse. En Turquie, 3 membres de la famille d’une fillette de 8 ans, dont le corps a été retrouvé dans une rivière, ont été condamnés à la prison à vie. Mais le mobile du crime reste un mystère et l’enquête semble avoir été entravée. Une affaire qui a choqué tout le pays…
Un verdict qui ne suffira pas à apaiser la douleur. Samedi, un tribunal turc a condamné à la prison à vie trois proches de Narin Guran, une petite fille de 8 ans dont le meurtre a choqué tout le pays. Selon une source judiciaire, la mère, le frère aîné et l’oncle de l’enfant ont été condamnés à perpétuité pour « assassinat en bande organisée ». Un quatrième suspect a été condamné à quatre ans et demi de prison pour avoir transporté et caché le corps.
Le drame remonte à septembre dernier dans la province de Diyarbakir, au sud-est de la Turquie. Narin était porté disparu depuis 19 jours, provoquant une vive émotion dans le pays. De nombreuses personnalités se sont mobilisées sur les réseaux sociaux avec le hashtag « Find Narin ». Puis l’impensable s’est produit : le corps sans vie de la jeune fille a été découvert dans un sac, flottant dans une rivière à environ un kilomètre de son village.
Un motif encore mystérieux
Malgré la sévérité des peines prononcées, de nombreuses zones d’ombre entourent encore ce drame familial. À la fin de la seule journée d’audience, le tribunal n’a pas été en mesure de déterminer les raisons qui ont conduit au meurtre de Narin. Aucun motif clair n’a été établi, laissant le mystère sur ce qui s’est réellement passé.
La mère clame son innocence
Au cours du procès, la mère de Narin, Yuksel Guran, a nié à plusieurs reprises toute implication dans la mort de sa fille. « Ils n’ont même pas laissé ma fille grandir jusqu’à l’âge où elle pourrait porter une robe de mariée. Ils l’ont enveloppée d’un linceul », a-t-elle déclaré au tribunal, ajoutant : « Ma fille a été brutalement tuée. Je n’ai même pas vu son linceul ni sa tombe. » Des propos déchirants de la part d’une mère qui affirme n’avoir rien à voir avec ce crime odieux.
Un oncle qui aurait fait obstacle
Au cours de l’enquête, les soupçons se sont portés sur l’oncle de Narin, qui n’était autre que le chef du village. Selon l’accusation, il a fourni de fausses informations pour faire obstacle à l’enquête lors de la recherche de la jeune fille. Un comportement inquiétant qui n’a pas été clairement expliqué.
Un autre « meurtre » présumé
Pour ajouter à la confusion, la mère de Narin a également dû se défendre contre les allégations selon lesquelles elle aurait tué une autre de ses filles. Elle a assuré que cet enfant est décédé à l’hôpital des suites d’un handicap physique. Une affirmation impossible à vérifier et qui jette une ombre supplémentaire sur cette sombre affaire.
Indignation jusqu’au sommet de l’Etat
Face à l’onde de choc provoquée par l’assassinat de Narin, les plus hautes autorités turques ont réagi. Le président Recep Tayyip Erdogan lui-même a exprimé sa tristesse et sa souffrance face à cet assassinat brutal. Il s’est engagé à suivre personnellement la procédure judiciaire afin que les coupables reçoivent « la peine la plus sévère ». Un suivi au plus haut niveau qui n’a visiblement pas permis d’éclairer ce drame.
Ils n’ont même pas laissé ma fille grandir jusqu’à l’âge de porter une robe de mariée. Ils l’entourèrent d’abord d’un linceul.
– Yuksel Guran, mère de Narin, au tribunal
Une punition exemplaire, mais des questions sans réponse
Si le verdict rendu samedi constitue indéniablement un signal fort, avec des peines particulièrement lourdes pour les trois principaux condamnés, il ne permet pas de comprendre ce qui s’est passé dans cette affaire. Comme le souligne Abdulkadir Gulec, bâtonnier du barreau de Diyarbakir, le jugement est « proche de ce qui était attendu » mais des zones d’ombre subsistent. Pourquoi et comment Narin a-t-il été tué ? Quel rôle précis ont joué les différents membres de sa famille ? L’enquête a-t-elle été menée avec rigueur malgré les obstructions invoquées par le parquet ?
Autant de questions qui resteront peut-être à jamais sans réponse. Et qui ne fait qu’accentuer le caractère insupportable de la mort de Narin. Comme dans tous les cas de meurtre d’enfant, un sentiment d’horreur et d’incompréhension domine. Avec la terrible impression que la justice, même si elle passe, ne pourra jamais réparer complètement l’irréparable.