la version émouvante de l’Opéra national du Rhin sur Le Figaro

la version émouvante de l’Opéra national du Rhin sur Le Figaro
la version émouvante de l’Opéra national du Rhin sur Le Figaro TV

L’œuvre atypique d’Albéric Magnard retrouve cette année toute son humanité avec une diffusion idéale.

« J’achète les mécontents, je bâillonne les envieux, j’écrase les rebelles. » Cette phrase n’est pas celle d’un leader antilibéral aujourd’hui, elle est prononcée par le dictateur Heurtal en Guercoeur le magnifique opéra d’Albéric Magnard que l’Opéra national du Rhin nous invite à découvrir dans une production qui lui rend une justice très émouvante (lire nos éditions du 29 avril 2024). Détruite en 1914 dans l’incendie de la maison que le compositeur tentait de défendre contre l’envahisseur allemand, la partition fut reconstituée par son ami Guy Ropartz, créée en 1931 et jamais jouée en depuis, hormis l’enregistrement Plasson de Michel.

Un opéra atypique, à l’image de son auteur, idéaliste et engagé, élevé dans la sonorité française mais nourri d’influence wagnérienne. Revenant d’entre les morts et constatant que son œuvre a été mal utilisée par ses successeurs, l’homme d’État Guercœur, au nom symbolique d’aspirations contradictoires, surmonte la désillusion en laissant place à l’espoir en l’humanité.

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Orchestre dense

Il y a beaucoup de naïveté dans le livret, mais on ne veut pas s’en moquer, tant sa sincérité et sa moralité laïque sont si bonnes dans une époque qui s’est tellement éloignée des utopies. Il y a de nombreuses longueurs dans l’acte II dépendant d’un certain pompiérisme, mais les actes I et III sont absolument magnifiques, avec un orchestre dense mais clair et des effets de spatialisation saisissants (choeur et fanfare de coulisses remarquables). Cette allégorie tend vers l’oratorio, mais les rôles permettent aux chanteurs d’exprimer autant de grandeur que d’humanité.

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La distribution à Strasbourg est idéale. Stéphane Degout le domine, le rôle titre faisant de lui un artiste dont on peut déjà dire qu’à 48 ans, il laissera un nom. La beauté et l’égalité du ton, la qualité transcendante de la diction et la sincérité de l’accent : tout est inoubliable. Ce n’est pas une raison pour oublier le lyrisme à fleur de peau d’Antoinette Dennefeld, la clarté puissante de Julien Henric, la projection mordante de Catherine Hunold, rien n’ayant été laissé au hasard dans le choix des compléments (la belle alto grave d’Adriana Bignagni Lesca ! ).

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Toujours curieux de partitions à (re)découvrir, le chef Ingo Metzmacher a mis toute sa ferveur à guider l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg dans celle de Guercoeur. Avec quelques grains de sable dans les trompettes et les flûtes, sa baguette expressive ravive et soutient cette musique vibrante. La mise en scène de Christof Loy ne cherche pas le drame là où il n’en existe pas : son système plus que dépouillé se contente de la division entre le royaume des vivants (en blanc) et celui des morts (en noir), séparés par un couloir agrémenté d’un paysage de Claude Lorrain. . Une sobriété qui serait frustrante si la direction des acteurs ne révélait pas l’humanité d’une œuvre profondément touchante, jusque dans sa maladresse.

 
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