La baisse des émissions de gaz à effet de serre en France montre des signes de ralentissement en 2024, avec une légère hausse au troisième trimestre, tirée par le bâtiment et les transports (AFP / PHILIPPE HUGUEN)
Après une baisse significative en 2023, la baisse des émissions de gaz à effet de serre en France montre des signes de ralentissement en 2024, avec même une légère hausse au troisième trimestre, tirée par le bâtiment et les transports.
De juillet à septembre, les émissions françaises de gaz à effet de serre (GES) ont augmenté de 0,5% par rapport à l’été 2023, après une baisse de 5% et 2,2% au cours des deux premiers trimestres. a annoncé vendredi le Citepa, l’organisme chargé de dresser le bilan carbone de la France.
Sur les neuf premiers mois de 2024, les émissions restent en baisse de 2,4%, hors puits de carbone, soit bien moins que la baisse de 6% enregistrée l’an dernier de janvier à septembre.
Au final, 2023 s’est soldée par une baisse des émissions de 5,8% par rapport à 2022. Logiquement, 2024 devrait être encore en baisse, mais une année moins bonne.
La dernière année de hausse remonte à 2021 (+6,4%) en raison de la reprise post-Covid.
Ce ralentissement “nous rappelle qu’il ne faut pas baisser la garde”, même si “heureusement (cela) nous laisse encore sur la bonne trajectoire” pour atteindre l’objectif de réduction de 50% des émissions de la France d’ici 2030 par rapport à 1990, a souligné vendredi le RTL la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher.
A l’inverse, ce ralentissement “devrait agir comme un véritable choc pour le gouvernement”, a réagi le Réseau Action Climat, par la voix de sa directrice de programme Anne Bringault.
“L’instabilité politique et le ralentissement, voire l’arrêt des politiques de transition écologique et de coupes budgétaires mettent en péril nos objectifs climatiques, mais aussi les secteurs d’avenir de notre pays et laissent les Français dans une dépendance coûteuse aux énergies fossiles”, a-t-elle ajouté.
Les données du Citepa, pour l’instant provisoires, n’incluent pas l’absorption de CO2 par les puits de carbone, comme les forêts et les sols, très dégradés du fait du réchauffement climatique et de la pollution, mais pourtant essentiels à l’atteinte des objectifs.
– chauffage en septembre –
Le ralentissement de la baisse vient des secteurs de la construction et des transports, dont les émissions ont recommencé à augmenter.
Le 3ème trimestre a notamment vu une hausse des émissions du trafic routier (+1,1% par rapport à 2023), qui restent cependant bien en deçà des étés 2019 à 2022, note le Citepa.
A ce sujet, le ministre a une nouvelle fois évoqué la possibilité d’un durcissement des conditions de renouvellement des flottes automobiles des entreprises.
« Les entreprises achètent deux fois moins de voitures électriques que les ménages et ne jouent donc pas le jeu. Il va falloir les pousser à jouer le jeu», a déclaré Mme Pannier-Runacher.
Mais c’est surtout le secteur du BTP qui plombe le bilan, avec une hausse de 11,8% au 3e trimestre, en raison d’un bond des émissions de chauffage en septembre.
Du côté des bonnes nouvelles, le secteur de l’énergie contribue toujours à la dynamique de réduction (-12,9%), grâce à une moindre utilisation des énergies fossiles dans la production d’électricité.
Autre point positif, le transport aérien intérieur a vu ses émissions diminuer de 4,1% au 3ème trimestre et de 4,2% de janvier à septembre, amplifiant la baisse en 2023 sur cette période (-3,5%).
L’industrie manufacturière continue également de réduire ses émissions, même si le rythme ralentit : -1,3% au 3e trimestre, après -2,8% au deuxième.
Pour l’agriculture, le Citepa précise que “seule une partie des évolutions” est estimée et que la “quasi-stagnation des émissions (+0,3%)” sur les neuf premiers mois “reste un aperçu partiel”.
– Ce budget carbone ? –
Le Citepa rappelle qu’en 2023, tous les secteurs avaient contribué au déclin et que « cette dynamique multifactorielle doit se poursuivre » pour répondre aux objectifs de la troisième Stratégie nationale bas carbone (SNBC).
La trajectoire pour atteindre le nouvel objectif provisoire d’émissions annuelles de 270 millions de tonnes (Mt) équivalent CO2 (CO2e) en 2030, hors puits de carbone, implique une réduction de 4,7% par an entre 2022 et 2030, indique le Citepa.
La France, qui doit contribuer à l’objectif européen de -55% d’émissions d’ici 2030 par rapport à 1990, n’avait pas respecté son premier budget carbone (2015-2018). Elle avait revu à la baisse ses ambitions pour la 2e SNBC (2019-2023), dont les résultats doivent être arrêtés en 2025.