Le message que Mathieu a pu adresser à sa famille nantaise tient en une vingtaine de mots : « Je suis vivant, en sécurité. Mais bon sang, c’est horrible. C’est une bombe atomique qui est tombée sur nous. Nous en reparlerons quand je pourrai. Lundi 16 décembre, deux jours après le passage du cyclone Chido sur Mayotte, le quadragénaire qui vit à Mamoudzou depuis trois ans n’a plus donné de nouvelles. Les appels tombent sur son répondeur : le réseau de communication reste quasiment hors service.
Aéroport fermé, accès aux ports extrêmement limités, routes endommagées… C’est pourquoi aider les victimes de ce territoire de l’océan Indien est un casse-tête.
L’aéroport fonctionne « en mode dégradé »
Sur les photos que franceinfo a pu consulter, des morceaux de bois et des bâches recouvrent les écrans d’ordinateurs qui servent normalement à diriger les avions sur la piste de l’aéroport de Mayotte-Dzaoudzi. La salle de commandement est baignée d’eau. “Il y a une multitude de dégâts, dont la tour de contrôle qui est particulièrement endommagée”, confirme le président de l’aéroport, Martin Meyrier, à franceinfo.
Deux jours après le passage du cyclone, les vols commerciaux ont évidemment été annulés et aucune date de reprise n’a encore été avancée. « Nous ne fonctionnons pas comme un aéroport commercial normal. Pour joindre nos équipes sur place, nous utilisons les téléphones satellites ou le système Starlink, décrit le gérant. Nous fonctionnons en mode dégradé, en contact permanent avec la cellule de crise, les services de l’Etat et les autorités locales.
Seuls les avions militaires affrétés pour les secours sont autorisés à atterrir à l’aéroport. « Et encore une fois, tous les modèles ne Le colonel Guillaume Vernet, porte-parole des armées, l’a déclaré à franceinfo. La réception de gros avions n’est pas possible pour le moment.» Les premières rotations ne pourront donc se faire qu’à l’aide de petits porteurs de type Casa. “La capacité d’accueil à bord est extrêmement limitée, une trentaine de places, pas plus.”
Le transport du matériel prend donc du -. D’autant que l’accès à la piste n’est pas le seul problème à l’aéroport de Mayotte-Dzaoudzi. « Nous manquons également de moyens de manutention pour décharger le matériel et le transporter plus loin sur le chantier »poursuit le porte-parole des forces armées.
Le pont aérien doit s’effectuer depuis la Réunion, à plus de 1.400 km
Situé à 200 km au nord de Mayotte, l’archipel voisin des Comores possède un aéroport. Mais il n’est pas non plus en mesure d’accueillir de gros avions militaires. « Les Comores, à ce stade, ne sont pas une solution. Nous avons le même problème qu’à Mayotte »coupe le colonel Guillaume Vernet.
A ce jour, la seule solution est d’acheminer des renforts humains et matériels depuis la Réunion. Celui-ci “sera une sorte de hub pour (…) l’envoi de renforts, de matériel et de nourriture”a détaillé dimanche le préfet du département, Patrice Latron.
C’est donc sur la base aérienne 181, qui jouxte l’aéroport de Saint-Denis, qu’un premier A400M de l’armée française s’est posé en fin de journée dimanche. A bord, “des équipements pour produire de l’électricité, ce genre de produits de première nécessité, explique le colonel Guillaume Vernet. Aujourd’hui, un A400M décolle chaque jour de la France métropolitaine vers la Réunion. Mais les deux territoires français sont distants de plus de 1 400 km, et sont séparés par Madagascar. Pour les connecter, il faut 3 heures 15 minutes de vol.
Le pont maritime est lent et fragile
Il existe une autre option : la mer. Mayotte compte trois ports, Dzaoudzi, Longoni et Mamoudzou. Mais leur accès, là aussi, reste extrêmement compliqué. De nombreux bateaux ont chaviré à cause du vent. Samedi soir, l’armée française a fait état d’une mer déchaînée, avec des vagues de 7 mètres et des rafales de vent mesurées à plus de 220 km/h, ce qui rend la navigation périlleuse. Le trafic des barges entre Petite-Terre et Grande-Terre, les deux îles principales de Mayotte, est également interrompu. Seuls ceux qui transportent des fournitures d’urgence circulent.
Par exemple, il a fallu attendre que les plus bas soient ramenés à « 2 ou 3 mètres » pour que la frégate Floréal peut s’approcher des côtes de Mayotte, avec un hélicoptère à son bord, analyse le porte-parole de l’état-major de l’armée. Elle sera rejointe jeudi matin par le Champlainun navire outre-mer de soutien et d’assistance qui a quitté la Réunion dimanche. A son bord, 180 tonnes de fret, dont du matériel fourni par l’armée et EDF, mais surtout des rations de survie et de l’eau. Elle sera suivie en fin de semaine par les compagnies maritimes gros porteurs, qui transporteront également des denrées alimentaires. De la Réunion, « il faut entre deux et trois jours de navigation »calcule le porte-parole de l’armée Guillaume Vernet.
Les routes principales sont endommagées
À Mayotte même, la circulation des biens et des personnes est extrêmement compliquée. Partout sur les 347 km2 de l’archipel, le déblaiement des routes est en cours. Mais certains axes restent bloqués. Et il faut prendre en compte les risques d’éboulement, de chute de blocs ou de mouvements de terrain, rappelle la préfecture de Mayotte dans ses points de situation.
Une quarantaine de pompiers de La Réunion étaient prépositionnés sur place avant le passage du cyclone. Ils sont actuellement en mission de reconnaissance pour déterminer un plan de « des chemins clairs, accessibles, ouverts et zones », explique Guillaume Vernet. « C’est un travail de longue haleine. La cellule de crise doit décider quelles zones doivent être rétablies en priorité.»
Les réseaux télécoms sont presque hors service
Le vent violent a également perturbé une grande partie des services de téléphonie mobile. « Nos réseaux ont subi des dégâts importants. Nos équipes sont pleinement mobilisées et déployées sur toute l’île pour sécuriser en priorité nos sites stratégiques »explique André Martin, directeur d’Orange Réunion-Mayotte. L’entreprise, qui est le principal opérateur de l’archipel, a fait le point : 51 de ses 54 antennes relais sont hors service, principalement à cause d’un manque d’énergie. Il estime que 99% de ses clients internet sont « déconnecté ». Son concurrent, Telco OI, est également très touché. « Tout est coupé, les liaisons téléphoniques, WhatsApp, Facebook, les branchements électriques, les routes… On ne peut pas avoir de nouvelles des gens du sud, ni du centre, ni du nord, ni de Petite-Terre »déplore Ousseni Balahachi, contacté par l’AFP.
Electricité de Mayotte teams are hard at work restoring power. “C’est une priorité”insiste Guillaume Vernet. Deux jours après le passage du cyclone Chido, Martin Meyrier, le président de l’aéroport de Mayotte, est sans nouvelles d’une cinquantaine de salariés. “Ils ne répondent pas au téléphone, alors nous essayons de les localiser physiquementil explique. Mais nous sommes très inquiets pour eux. Tous ceux que nous avons pu atteindre jusqu’à présent vont bien. Mais plus personne n’a de toit au-dessus de la tête.»