Le constat est clair. La révision à la hausse du déficit de la Sécurité sociale pour 2024 (18,5 milliards d’euros au lieu des 10,5 milliards prévus), en raison de l’augmentation des dépenses, principalement dans les branches maladie et vieillesse, et de la baisse des recettes, liée à l’atonie du marché du travail et la baisse de la consommation, impose au gouvernement et aux partenaires sociaux de trouver immédiatement des solutions pour assurer la résilience du système de santé français. Selon le dernier rapport de la Cour des comptes, sans mesures correctrices, le déficit pourrait atteindre 28,4 milliards d’euros en 2025… Mais quelles mesures ? Celles envisagées dans le cadre du PLFSS 2025 sont censées limiter les dégâts, avec un déficit prévu de 16 milliards. De leur côté, les LDS estiment qu’il est possible d’inverser le cours des choses d’une autre manière : « grâce à des actions audacieuses, cohérentes et collectives. »
Les LDS sont prêts à s’engager dans une relation exigeante et constructive avec l’État et Medicare
Philippe Besset, président des Libéraux de la Santé
C’est justement pour exprimer leurs positions en présence de la ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, que Les Libéraux de la Santé (LDS)*, présidés par Philippe Besset, également président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), avaient décidé de repositionner leur rendez-vous annuel au milieu des débats parlementaires, entre l’Assemblée nationale (qui n’a pas voté le PLFSS dans le délai imparti) et le Sénat qui l’examine depuis le 18 novembre.
Une grande conférence sociale ?
Si tous les intervenants présents** ont manifesté leur volonté de sauver et de réformer en profondeur le système de santé ainsi que leur refus de la financiarisation, les avis sur les moyens pour y parvenir diffèrent. Dans son discours inaugural, Philippe Besset a assuré que le LDS était prêt à s’engager dans « une relation exigeante et constructive avec l’État et l’assurance maladie » et a appelé à la mise en place d’une loi de programmation pluriannuelle des dépenses et des objectifs de santé. Il a également préconisé « une nouvelle loi santé » la nécessité dont la ministre elle-même a parlé.
Cette loi doit « redéfinir l’équilibre entre ville et hôpital en donnant toute sa place aux soins de proximité » (avec les pharmaciens) et transformer l’assurance maladie en un véritable « une assurance maladie, basée sur la prévention et non plus principalement sur le traitement curatif ». Pour construire cette refondation, les LDS proposent l’organisation d’une « grande conférence sociale de santé réunissant tous les acteurs, sous l’égide du Conseil économique, social et environnemental (CESE), qui aboutirait à une proposition de loi, discutée puis validée par une convention de citoyens tirés au sort ». Cette proposition de loi citoyenne devrait aboutir à « un nouveau pacte social sur la santé, aussi ambitieux et visionnaire que celui de 1945 ».
Ou une « grande chose » ?
Bien que favorable à « la construction de cette transformation du système de santé, déjà à l’œuvre tranquillement » et croyant « très fort en dialogue social et en partenariats »Geneviève Darrieussecq a clairement exprimé son scepticisme sur la méthode en détournant la célèbre formule du général de Gaulle (à propos de l’ONU) : « Je me méfie beaucoup des grandes « choses »… » Elle préfère “quelque chose de plus flexible” et invite les différents professionnels de santé à faire d’abord des propositions concrètes avant d’organiser « une conférence sociale utile ». Il faut avancer, répète-t-elle. Pour l’instant, sans remettre en cause le pacte conventionnel auquel il dit « très attaché »il suppose des mesures visant à maîtriser les dépenses de radiologie et de biologie (articles 15 et 16 du PLFSS). Des mesures sur lesquelles Philippe Besset estime qu’il est encore - de revenir « restaurer une relation de confiance entre partenaires conventionnels ». Bref, si le dialogue est renoué, les désaccords persistent.
* La LDS regroupe 10 syndicats de professionnels de santé. ** Geneviève Darrieussecq, ministre de la Santé, Thomas Fantôme, directeur général du CNAM, Lamia El Aaraje, 1ère secrétaire de la Fédération parisienne du PS (pharmacien de formation), Yannick Neuder, député LR de l’Isère, rapporteur général du Social Budget sécurité, Sarah Degiovani (FNO), Franck Devulder (CSMF), Daniel Guillerm (FNI).
« Supprimer l’AME serait une triple erreur »
La création d’une franchise sur les dispositifs médicaux – envisagée pour mettre fin au gaspillage, notamment de pansements – qui inquiétait les pharmaciens, a finalement été écartée, du moins pour le moment. En revanche, la question de la suppression de l’AME (aide médicale d’État), qui refait périodiquement surface, continue de préoccuper tous les professionnels de santé, à commencer par François Braun, signataire – avec 7 autres anciens ministres de la Santé – d’une plateforme contre la remise en cause des ce système. « Ce serait une triple faute, contreproductive pour la santé publique (augmentation des maladies vectorielles, tuberculose…) et pour la dépense publique : l’absence de soins entraîne plus tard un transfert à l’hôpital et donc un surcoût, évalué après coup. un essai en 2012. Un bénéficiaire coûte 7 fois plus cher qu’en médecine de ville… C’est aussi une erreur par rapport à notre Constitution. » Same analysis from the president of France Assos Santé, Gérard Raymond. « Il n’y a aucune raison philosophique et pragmatique de supprimer l’AME ou de la transformer en AMU (aide médicale d’urgence). L’AME, c’est aussi un acte de prévention. L’Espagne, qui avait choisi de supprimer ce type d’aide, est revenue pour cette raison. » Seul problème évoqué lors d’une table ronde LDS par Catherine Mojaïsky du syndicat des chirurgiens-dentistes (CDF) : les difficultés techniques rencontrées pour obtenir un remboursement en l’absence de carte Vitale.