Ce rassemblement a également eu lieu après que la Cour constitutionnelle, saisie par le président pro-occidental, ait décidé de maintenir inchangé le résultat des élections législatives d’octobre remportées par le parti au pouvoir Rêve géorgien mais contesté par l’opposition.
Des manifestations à Tbilissi, ponctuées de violences, ont éclaté jeudi après que le gouvernement a annoncé le report à 2028 des ambitions d’adhésion de ce pays du Caucase à l’Union européenne. Mardi soir, les manifestants étaient toujours par milliers, mais un peu moins que les jours précédents, lançant des feux d’artifice sur le Parlement et la police et brandissant des drapeaux de la Géorgie et de l’UE, ont rapporté des journalistes de l’AFP. La police anti-émeute a d’abord réagi à coup de lance à eau, notamment pour repousser les manifestants qui tentaient d’escalader les murs du Parlement, puis à coups de canon à eau et de gaz lacrymogènes alors que la foule se dirigeait vers une avenue voisine.
Le ministère de l’Intérieur accuse dans un communiqué les manifestants d’avoir lancé sur la police «divers types d’objets contondants, d’appareils pyrotechniques et d’objets inflammables« La présidente Salomé Zourabichvili, qui soutient le mouvement de contestation, a dénoncé le recours àdisproportionné“force par la police”,arrestations massives et mauvais traitements« .
Quelques heures plus tôt, le Premier ministre Irakli Kobakhidze avait accusé l’opposition et les ONG d’être à l’origine des affrontements avec la police et prévenu qu’elles «n’échappera pas à ses responsabilités« Son parti, qui assure qu’il ne renoncera pas à l’UE malgré l’annonce du report des négociations, a estimé que les Géorgiens mécontents l’avaient eu »mal compris« et cette intégration européenne »progressé« .
La veille, il avait rejeté toute négociation avec l’opposition, qui réclame de nouvelles élections législatives en dénonçant des fraudes lors du scrutin du 26 octobre, tout comme Bruxelles, que M. Kobakhidzé a qualifié de «chantage« . Le Rêve géorgien tente également de présenter le mouvement de protestation comme le résultat d’une ingérence extérieure.
“Personne ne nous paie, nous venons ici par notre volonté, par nous-mêmes», a déclaré à l’AFP un manifestant, Nougo Chigvinadzé, logisticien de 41 ans, qui a simplement déclaré vouloir «un avenir meilleur pour nos enfants« . “Tout ce que dit notre gouvernement est un mensonge. Ils nous mentent depuis douze ans et ils continuent de le faire», a-t-il ajouté.
À la mi-novembre, les groupes d’opposition et le président, en rupture avec le gouvernement mais avec des pouvoirs limités, ont déposé un recours devant la Cour constitutionnelle pour faire annuler les résultats des élections législatives d’octobre. La Cour, dans une décision publiée mardi, a rejeté cette demande, précisant que son verdict était définitif et sans appel.
Selon le ministère de l’Intérieur, 293 manifestants ont été arrêtés depuis le début du mouvement et 143 policiers ont été blessés. Des manifestants et des journalistes ont également été blessés ces derniers jours. L’opposition accuse le gouvernement de vouloir se rapprocher de Moscou et d’imiter ses méthodes répressives et autoritaires.
“Partout en Géorgie, les citoyens se soulèvent contre le régime fantoche russe.», a salué lundi soir la présidente Salomé Zourabichvili, voyant «un mouvement sans précédent« . Cette ancienne diplomate française a assuré la semaine dernière qu’elle refuserait de remettre son mandat comme prévu fin décembre et qu’elle resterait à son poste jusqu’à l’organisation de nouvelles élections législatives. Bien qu’elle ne dispose que de pouvoirs très limités, Mme Zourabichvili est populaire auprès des manifestants, dont le mouvement, largement spontané et organisé en ligne, ne dispose ni de leader politique dominant ni de véritable structure.
Chaque soir, la police veut chasser les manifestants de la place du Parlement, épicentre de la mobilisation et des tensions. Le Rêve géorgien prétend vouloir éviter au pays le sort de l’Ukraine, envahie par les troupes russes depuis près de trois ans. Ses responsables accusent l’Occident de vouloir entraîner la Géorgie dans une guerre avec Moscou.
Le pays niché au bord de la mer Noire reste traumatisé par une brève guerre avec la Russie à l’été 2008. Moscou avait alors reconnu l’indépendance de deux régions séparatistes limitrophes de son territoire, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud. , où elle maintient toujours une présence militaire.