La Russie est-elle vraiment la « 4ème économie mondiale » comme le prétend l’eurodéputé RN Thierry Mariani ?

La Russie est-elle vraiment la « 4ème économie mondiale » comme le prétend l’eurodéputé RN Thierry Mariani ?
La Russie est-elle vraiment la « 4ème économie mondiale » comme le prétend l’eurodéputé RN Thierry Mariani ?

l’essentiel
L’eurodéputé RN « Poutinophile » Thierry Mariani a relayé le classement du FMI et de la Banque mondiale plaçant le PIB « PPA » russe en quatrième position mondiale. Vrai ou faux ? L’analyse de deux experts.

Le 21 novembre, l’eurodéputé RN Thierry Mariani déclarait sur son compte X : « C’est désormais confirmé : selon le classement du PIB mondial en parité de pouvoir d’achat (selon le FMI & la Banque mondiale), la Russie est la 4ème économie du pays. le monde depuis 2 ans. Bravo #LeMaire pour les sanctions. Grâce à cela, il a ruiné un pays, mais c’est la

L’admiration de Thierry Mariani pour Vladimir Poutine et ses relations avec Bachar al Assad et Ilham Aliiev, ​​les présidents syrien et azerbaïdjanais, sont bien connues. Elles conduisent régulièrement à ce que cet élu d’extrême droite soit présenté par ses adversaires comme « l’homme de Moscou » ou « l’ami de nos ennemis ». La Russie, quatrième économie mondiale, vraiment ? La question est alors légitime car si la résilience de l’économie russe est factuelle, Thierry Mariani sait aussi jouer sur les lettres pour détourner les chiffres. Ce qui n’est pas un scoop…

En juin dernier, David Teurtrie, chercheur associé à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco) consacrait déjà un long article dans Le monde diplomatique à cette question. Contrairement à « l’effondrement » promis à la Russie par Bruno Le Maire en mars 2022, Moscou pourrait se targuer d’une croissance économique de 3,6 % de son PIB en 2023 et de 3,4 % en 2024, « supérieure à celle de l’Union européenne et des États-Unis ». , a noté le chercheur.

En effet, suite à l’invasion de l’Ukraine et aux sanctions, « l’économie russe a surmonté une première phase de forte déstabilisation puis s’est réorientée », explique Julien Vercueil, également économiste à l’Inalco. Rentes pétrolières et gazières et flux commerciaux redistribués vers la Chine, l’Inde, le Brésil tout en contournant le système bancaire occidental… Elle a ainsi repris « une croissance assez rapide, portée par les dépenses publiques, la consommation et l’investissement intérieur, financée par l’augmentation des recettes fiscales.

Jusqu’à en faire la quatrième économie mondiale ? En « PPP », oui, mais… pas dans le monde réel, corrige l’économiste. « Pour comparer les données nationales à l’échelle internationale, il faut utiliser un taux de change. La mesure du PIB utilisée pour cette classification est basée sur l’utilisation de taux de change dits « à parité de pouvoir d’achat » (PPA). Ils permettent de convertir les roubles russes dans la monnaie de référence, appelée « dollars PPP » par la Banque mondiale et le FMI », explique l’expert. Mais « il s’agit d’un taux calculé et non observé, c’est-à-dire le taux de change actuel que l’on peut trouver sur les sites de conversion du rouble en dollar », poursuit-il. Ce qui change toute la perspective.

Car « si l’on utilise le taux de change actuel, la Russie est proche de la dixième place », constate Julien Vercueil, relevant entre autres faiblesses une inflation qui ne ralentit pas. Mais cette inflation qui sert le consommateur profiterait néanmoins à Moscou, souligne l’ancien ambassadeur de France en Russie, Jean de Gliniasty, à La Dépêche. Directeur de recherche à l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), il estime qu’« en dollars courants, la Russie se situe plutôt autour de 11e position”. Mais il souligne que cette bataille de classement ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt.

Parce que la Russie perçoit ses ventes de gaz et de pétrole en dollars courants. Mais elle fabrique et paie en roubles ses chars pour la guerre en Ukraine. “C’est aussi pour cela que Moscou laisse filer sa monnaie.” Quand on peut acheter beaucoup plus en Russie avec un dollar qu’aux Etats-Unis, « alors il faut moins de dollars courants pour produire un char russe qu’un char américain », conclut Jean de Gliniasty.

 
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