© EDOUARD MONFRAIS-ALBERTINI/Hans Lucas/Hans Lucas via AFP
– Michel Barnier a annoncé lundi 2 décembre le recours à l’article 49.3 de la Constitution.
Que va-t-il arriver au gouvernement Barnier ? Deviendra-t-il le plus court de l’histoire de la Ve République ? Lundi 2 décembre, le Premier ministre a activé le 49.3 sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. L’article de la Constitution permet qu’un texte soit adopté sans vote de l’Assemblée nationale. En revanche, elle engage la responsabilité du gouvernement qui, plus que jamais, risque de tomber après le vote d’un motion de censure.
“La chute de Barnier est actée”a déclaré Mathilde Panot, cheffe du groupe parlementaire La France insoumise (LFI) à sa sortie de l’Assemblée nationale. L’alliance de gauche, le Nouveau Front populaire (NFP), a déposé une motion de censure quelques heures après le coup de poker de Michel Barnier. Selon la Constitution, les députés disposent d’un délai de 24 heures pour déposer une motion de censure. Pour qu’elle soit validée, cette dernière doit obtenir la signature d’un dixième des membres de l’Assemblée.
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Un gouvernement fragilisé face à deux motions de censure
Le Rassemblement national (RN) n’est pas en reste : le parti à la flamme a également déposé une motion de censure contre le gouvernement après avoir laissé le suspens pendant plusieurs jours. Les deux motions de censure seront débattues mercredi 4 décembre à 16 heures. Celle qui aura recueilli le plus de signatures, celle du NFP, sera votée en premier. Le RN a affirmé qu’il votera sur toutes les motions, “d’où qu’ils viennent”a indiqué Marine Le Pen à la sortie de l’Assemblée nationale.
Pour qu’une motion de censure soit adoptée, elle doit recueillir la majorité absolue des membres de l’Assemblée nationale, soit 288 voix, en raison de l’absence de deux députés sur les 577 sièges que compte la chambre. Le RN totalise 140 adhérents en prenant en compte les 16 alliés d’Eric Ciotti. Quant au NFP, si l’on additionne le Parti socialiste (66), les Écologistes (38), LFI (71) et la RDA (17), on obtient 192 voix. Mathématiquement, Michel Barnier a donc de fortes chances de chuter.
Michel Barnier devra-t-il bientôt présenter sa démission à Emmanuel Macron ?
Si la motion de censure est adoptée, le texte du budget de la Sécurité sociale est rejeté et le Premier ministre doit démissionner face à Emmanuel Macron, actuellement en visite d’Etat en Arabie Saoudite. Le Président de la République doit alors nommer un nouveau ministre afin de former un nouveau gouvernement. Mais le processus pourrait être long étant donné que la Constitution ne prévoit aucun délai. Pour rappel, Michel Barnier a été nommé le 5 septembre, près de deux mois après la démission de Gabriel Attal le 16 juillet 2024.
Le seul précédent dans l’histoire de la Ve République date de 1962. Le gouvernement Pompidou fut renversé via une motion de censure dite « spontanée » – à l’initiative des députés. « Charles De Gaulle a alors refusé sa démission et a immédiatement dissous l’Assemblée nationale. Le général remporte les élections législatives anticipées et reconduit Pompidou au poste de Premier ministre.a déclaré Guillaume Tusseau, constitutionnaliste et politologue Capital. Pour rappel, l’Assemblée nationale ne pourra être dissoute avant juillet 2025, soit un an après la dernière.
Que devient le budget 2025 ?
Concernant le budget 2025, pour le moment l’examen se poursuit. Le Sénat doit continuer à débattre du budget de l’État mardi. Dans la matinée, la commission mixte est parvenue à un accord sur le budget de « fin de gestion » pour 2024. Si le gouvernement de Michel Barnier tombe, plusieurs remèdes existent pour que la France ne se retrouve pas sans budget.
La loi organique relative aux lois de finances (LOLF) donne la possibilité de présenter devant le Parlement «une facture spéciale l’autorisant à continuer de percevoir les impôts existants. “On peut supposer que les élus auront à cœur d’assurer la continuité de la vie nationale puisque, dans ce cas, il n’est pas question de répartition des recettes ou des dépenses”analysé la semaine dernière pour CapitalStéphanie Damarey, professeur de droit financier public. Une fois cette loi spéciale publiée au Journal Officiel, le gouvernement pourra prendre «décrets ouvrant les crédits applicables uniquement aux services votés», précise la LOLF. C’est le « les crédits minimaux que le gouvernement considère comme essentiels pour poursuivre l’exécution des services publics dans les conditions approuvées l’année précédente par le Parlement ».
La LOLF donne également la possibilité au gouvernement de voter une loi partielle sur la première partie du projet de loi de finances, à savoir les recettes. “La deuxième partie, relative aux dépenses, pourra être adoptée plus tard, en janvier voire en février”nous a dit l’expert. Enfin, la Constitution donne la possibilité de « adopter son projet de loi de finances en tout ou partie en ordonnance». Cette option n’a jamais été utilisée sous la Ve République.
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