Avec 14 marques actuellement dans son giron, Stellantis est l’un des groupes automobiles les plus puissants au monde. Et son succès est dû à son célèbre patron, Carlos Tavares, dont les méthodes ont toujours été pour le moins critiquées.
Stellantis et la méthode Tavares
Cet ancien numéro 2 de Renault, arrivé à la tête de PSA en 2014avait engagé à l’époque un plan d’action sans précédent pour redresser le groupe. Peugeot et Citroën ont été sauvées in extremis de la faillite grâce à des licenciements et des restructurations d’usines, et DS Automobiles est sortie de terre pour générer des liquidités en naviguant dans les échelons supérieurs du premium. Un pari réussi pour ce « psychopathe de la performance » comme il se décrit lui-même, qui s’était même offert le luxe de acheter Opel, arrachée aux griffes de General Motors en 2017. La consécration arrive enfin en 2021, lorsque PSA et Fiat-Chrysler fusionnent pour former le nouveau groupe Stellantis, dont Carlos Tavares prend les rênes. C’est sous sa direction que Jeep, Alfa Romeo, LanciaRAM et même Maserati se sont relancés, en faisant évoluer leur positionnement, en revoyant leurs stratégies industrielles et en lançant de nombreuses nouveautés, tant sur le marché européen que dans les pays émergents. Résultat, en 2023, Stellantis affiche l’une des meilleures performances du secteur, avec un bénéfice net en hausse de 11%, et une marge opérationnelle record fixée à 12% ! Carlos Tavares avait de quoi jubiler…
Des erreurs de gestion à plusieurs niveaux
Seulement, l’année 2024 a tourné au drame. Les ventes de voitures électriques sont décevantes, les problèmes de fiabilité augmentent (pare-brise, airbags Takata, ceintures de sécurité, moteurs 1,2L Puretech et 1,5L BlueHDi…), et surtout, le soldat américain s’est effondré ! Car oui, la véritable poule aux oeufs d’or du groupe Stellantis, c’est l’Amérique du Nord, où il vend les marques RAM, Jeep, Chrysler et Dodge. En voulant trop prioriser le marché européen, Carlos Tavares a abandonné ses marques américaines, et elles ont payé le prix fort. Chrysler est en état de mort cérébrale et ne commercialise qu’un seul modèle, le monospace Pacifica, Dodge attend cruellement sa nouvelle Charger après l’échec du SUV Hornet (une Alfa Romeo Tonale rebadgée), tandis que RAM et Jeep ont été durement touchées par la fabrication. défauts et ratés de montage. Les livraisons du groupe en Amérique du Nord ont chuté de 18 %. au premier semestre, et sa part de marché est passée de 10 % à 8,2 %. Actuellement, ce sont encore des dizaines de milliers de SUV et de pick-up encombrent les parkings des concessionnaires américainsmanque de ventes, et qui ont coûté une fortune à Stellantis. Des erreurs de gestion qui n’ont pas empêché le principal intéressé d’obtenir une nouvelle rémunération record : 36,5 millions d’euros pour l’année 2024.
La fin de l’ère Carlos Tavares
Face au mécontentement qui s’est accru ces derniers mois, Carlos Tavares a annoncé qu’il quitterait son poste en 2026. Mais le conseil d’administration du groupe en a décidé autrement, et ce dimanche 1est En décembre, Carlos Tavares a officiellement présenté sa démission avec « effet immédiat ». De quoi plonger encore un peu plus le groupe franco-italo-américain dans l’incertitude. Mais comment envisager l’avenir ? Déjà, et en attendant de trouver un remplaçant (au premier semestre 2025 peut-on lire), c’est John Elkann, président de Stellantis, qui prendra la direction par intérim de la direction générale. Et elle n’aura peut-être pas d’autre choix, remettre les comptes sur les rails, se débarrasser de certaines de ses marques. Maserati ? Le constructeur est tiraillé entre un positionnement compliqué par rapport à Ferrari et Lamborghini, et ses modèles électriques sont invendables. Chrysler et Dodge ? Ils sont dans une situation financière très critique et n’ont évidemment jamais été la priorité du groupe depuis sa création en 2021. Alfa Roméo ? Sa transition vers le 100 % électrique s’annonce bien plus difficile que prévu. A défaut de se séparer de ses marques, Stellantis pourrait aussi décider de rationaliser ses outils industrielsen fermant plusieurs de ses usines, ou en revenant à une stratégie de volume et non plus de valeur, en vendant ses voitures moins cher pour en vendre le plus possible (la méthode « Ghosn »).
En tout cas et après l’annonce du départ prématuré de Carlos Tavares, Les actions du groupe Stellantis chutent de 8% à l’ouverture ce 2 décembre. Tout reste désormais à faire.