Dans le quartier de l’Oratoire et du Plan du Pont, le sujet est sensible. Omniprésent. On ne compte plus les épisodes d’inondations qui ont touché le secteur en raison des aléas du Gapeau. 1999, 2014, 2019, pour n’en citer que quelques-uns. Autant de souvenirs douloureux que les habitants aimeraient ranger dans un tiroir et ne plus jamais voir se répéter.
Le Programme d’action en prévention des inondations du Gapeau (PAPI) soutenu par le Syndicat Mixte du Bassin-versant et labellisé fin 2020 devrait permettre de répondre – au moins en partie – à cette problématique même si, comme le rappelle Patrick Martinelli, président du syndicat, « nous ne pouvons pas empêcher les inondations ».
Divers aménagements ont déjà été réalisés en amont du cours d’eau et d’importants travaux sont en cours dans sa zone d’expansion des crues, à quelques kilomètres de son embouchure dans la Méditerranée.
Un projet impressionnant de détournement du canal Muât, mais qui ne fait pas forcément l’unanimité auprès des riverains qui doutent de son efficacité. Ils n’ont pas hésité à le faire savoir aux élus lors d’une visite de chantier (notre édition du 8/11).
« Le projet a évolué avec le temps. C’est un quartier régulièrement inondé, des études sont menées depuis longtemps pour trouver des solutions. Les plus anciens furent d’aménager la zone d’expansion des crues en construisant des digues et des bassins. Mais quand on fait un PAPI, toutes les études nécessaires sont faites pour trouver les meilleures solutions, et on a trouvé une meilleure solution.répond Patrick Martinelli.
Plusieurs options ont été envisagées ces dernières années pour sauvegarder ce quartier résidentiel. Certains ont été abandonnés, d’autres restent à étudier
Bassin et digues…
C’est la première solution qui a été présentée aux habitants, celle à laquelle “ils sont restés coincés”. Celle de la création de digues et d’un bassin de rétention.
« Une solution abandonnée car moins efficace que le projet actuel. Il a permis de réduire des crues jusqu’à 380 m3/s, soit des crues survenant en 15 ou 20 ans. Le projet actuel répond à des inondations de trente ans.
Cela aurait-il été efficace en 2014 ? « Nous ne savons pas si cela aurait sauvé quelque chose. Avec les pluies des jours précédents, elle aurait pu être pleine. » Sachant que le volume de stockage prévu était de 1,5 million de m3 et qu’une crue décennale est de 10 millions de m3…
L’Oratoire bunkerisé ?
La solution d’un système de confinement autour du quartier pourrait-elle être la solution miracle ? « C’est un projet très compliqué à mettre en œuvre. La digue doit avoir 7m de hauteur par rapport au cours d’eau, soit 2m devant les maisons. Nous sommes en protection rapprochée, ce que l’Etat ne recommande pas car nous craignons les risques technologiques plutôt que naturels. Il existe des risques de rupture très dangereux pour les habitations.
Sur le rehaussement des murs de clôture demandé par certains riverains ? « Nous ne pouvons pas autoriser cela. Un mur de clôture n’a jamais été construit comme une digue. Il existe des contraintes de sécurité importantes. Et en zone inondable, il n’est pas autorisé d’avoir un mur de clôture… »
Rachat de maisons
Aucune maison n’aurait dû se trouver dans ce quartier. Ce constat, partagé par tous, est désormais clair. La plupart ont été construits avant la loi Barnier, et le risque d’inondation n’était pas pris en compte dans l’urbanisme…
Pourquoi alors ne pas acheter les maisons à risque plutôt que de dépenser des millions en travaux ? “C’était une hypothèse lors de la rédaction du PAPI. Nous avons fait des calculs qui estimaient 70M pour acheter les maisons les plus exposées uniquement. Et cela n’a pas sauvé le quartier, il y aurait toujours eu des inondations. Les plus exposées ne sont pas forcément celles les plus proches du cours d’eau mais celles adossées à la colline, dans une sorte de bassin. souligne le syndicat.
Et à ajouter pour les 240 foyers concernés par le risque que « L’achat de maisons par le fonds Barnier repose sur des problématiques de vitesses élevées et de crues élevées. Dans le quartier de l’Oratoire, il n’y a pas de vitesses élevées. Impossible donc d’utiliser les millions du fonds Barnier, et bien trop cher pour les collectivités.
La suite…
Une fois le projet de détournement de canal terminé, les travaux du PAPI ne seront pas terminés. Une nouvelle phase débutera avec une étude sur les possibilités d’aménagement de la partie aval et des arrivées d’eau du Gapeau.
Etudes sur la rive droite du fleuve afin de retrouver les «les meilleures dispositions possibles»: barrage, recalibrage du cours d’eau pour éviter les infiltrations d’eau sur certaines parties du quartier, fermeture de certaines arrivées d’eau, installation de pompes pour faciliter le drainage, compensation nécessaire au probable débordement de la rive opposée ou de la partie aval, achat de terrain pour les zones inondées…
Le syndicat sera également mobilisé pour « inciter les habitants à s’équiper. Nous reviendrons vers eux pour qu’ils s’équipent car les aides ne sont pas éternelles », rappelle le syndicat qui ajoute que « le diagnostic est gratuit et le matériel aide à 80 % ».
Détourner le Muat, la meilleure solution ?
Le détournement du canal Muat, dont les travaux sont en cours, devrait résoudre les problèmes jusqu’à une crue trentenaire. « Cette solution a été analysée et modélisée par des personnes compétentes. Le projet est plus efficace que le projet initialement présenté »indique le syndicat. Et pour des inondations plus importantes comme celle de 2014, le volume d’eau entrant dans le quartier sera réduit.
« Lors de la crue de 2014, ce système aurait permis de protéger la moitié du quartier de l’eau et 70 à 80 cm d’eau dans certaines zones. Pour cela, nous proposons des solutions pour réduire la vulnérabilité des bâtiments à batardeaux. en bonne et due forme qui protégera les maisons qui ne sont pas toutes équipées, surtout les plus impactées, insiste le syndicat. Et il y a des aides allant jusqu’à 80 %.
Berges rocheuses ou végétalisées ?
Lors de la visite du site, les habitants ont exprimé leur scepticisme quant à la technique végétale de stabilisation des berges, réclamant des enrochements afin de ne plus voir leur clôture s’affaisser à cause de l’érosion.
« Elle a été intégrée et réalisée en prioritérappelle le syndicat qui précise que des calculs de stabilité et d’érosion ont été effectués et que la technique de revégétalisation pouvait être utilisée avec, selon les calculs effectués, une résistance jusqu’à une crue centennale. Les roches n’apporteraient pas plus d’efficacité.»