À la cour d’assises de l’Isère
Dans la salle d’audience, un silence de cathédrale ponctue la présentation du maréchal en chef Audrey Nadal Santa. C’est elle qui a mené l’enquête sur la disparition puis le meurtre de Victorine Dartois. Ses conclusions sont sans appel : la jeune femme a été « étranglée à plusieurs reprises avant de se noyer » dans le débordement d’un ruisseau. A quelques centaines de mètres de chez lui. Et tous les éléments “permettent de dire que ce meurtre a été précédé d’une tentative de viol”, souligne Audrey Nadal Santa, balayant toute explication contraire.
Reste à savoir si l’accusé Ludovic Bertin avait identifié les lieux à l’avance. Ou s’il avait raté la situation. Le jeune père avait passé l’après-midi à se défoncer chez un ami avant de rentrer chez lui. Et sortez courir tout de suite. « Il est retourné chercher sa proie pour la violer », insiste le gendarme auprès des jurés. Tout l’indiquait. “Quand il a avoué le meurtre à sa meilleure amie, il lui a dit que son intention était de la violer, pas de la tuer”, explique-t-il. Au moment de la découverte, le corps de Victorine était partiellement nu, à moitié submergé et caché par des branches. Son pantalon était complètement sous l’eau. Il était à l’envers, sa ceinture défaite et sa fermeture éclair baissée.
Un lieu “difficile d’accès”.
Pour tenter de comprendre l’agencement de la salle, un « lieu particulièrement isolé » et « difficile d’accès », le président du tribunal propose de montrer des photos. Mais aussi des enregistrements réalisés par des caméras de vidéosurveillance. Valérie Blain prévient les parties civiles, assises au premier rang, que cela pourrait être dur pour elles : « si tu veux, tu peux quitter la salle. » D’un geste de tête, le père de la victime indique que sa famille est prête à encaisser. D’un bras, l’homme entoure sa femme aux yeux déjà rouges. De l’autre, ses enfants. Et montrer ainsi l’image d’un clan uni dans la douleur.
A l’écran, le pull rose de Victorine se détache déjà dans les couloirs du centre commercial Village des Marques. Petit à petit, le public suit son itinéraire jusqu’à la gare routière. Ce jour-là, à 18h46, Victorine vient de rater le bus et quitte la gare pour se diriger vers le chemin piétonnier qui mène au stade. Au même moment, un joggeur portant les mêmes vêtements que Ludovic Bertin est présent et fait le chemin inverse. « Une centaine de mètres les séparent », commente le gendarme.
“Nous pensons qu’il s’est caché pour l’attendre”
Sanglots et cris étouffés dans la pièce. Pointant du doigt l’écran, la mère de Victorine, en larmes, murmure à plusieurs reprises “c’est ma petite fille”, tandis que son mari tente de la consoler. Sur les images, le joggeur se retourne, trois minutes plus tard, pour se diriger vers le chemin de prairie que va bientôt emprunter l’élève. “Nous pensons qu’il s’est caché dans un endroit pour l’attendre, mais nous n’avons pas pu le déterminer formellement”, explique le maréchal Nadal Santa.
Le scénario « plausible » selon lui était que Bertin ait frappé la jeune femme qui tentait de se dégager. Caché derrière les buissons qui bordaient les escaliers en bois, il l’a étranglée avec son bras droit, lui attrapant le cou. De peur d’être surpris par un homme promenant son chien de l’autre côté des buissons, il a « relâché la victime stupéfiante ». « Parce qu’il avait peur qu’elle le reconnaisse, il va l’étrangler une seconde fois un peu plus fort. Victorine s’évanouit. Il l’a tirée par les pieds pour l’emmener jusqu’au ruisseau”, raconte le gendarme.
Dans les prochains jours, des experts scientifiques seront entendus pour détailler la chronologie des faits. Ludovic Bertin risque la prison à vie. La décision est attendue vers le 6 décembre.