quel avenir pour la loi de finances si le gouvernement est renversé avant Noël ?

quel avenir pour la loi de finances si le gouvernement est renversé avant Noël ?
quel avenir pour la loi de finances si le gouvernement est renversé avant Noël ?

Le calendrier budgétaire s’accélère et l’incertitude quant à ses résultats demeure. Pour y voir plus clair, Michel Barnier a reçu Marine Le Pen à Matignon ce lundi 25 novembre, avant de recevoir cette semaine les autres chefs des groupes parlementaires d’opposition. Son objectif est d’éviter une motion de censure après ce qui semble plus que probable : le recours au 49.3 pour approuver la loi de finances. A la fin de l’entretien, le leader des députés RN a maintenu sa menace de voter une motion de censure si “le budget reste tel qu’il est”. Et d’ajouter, perplexe : “Nous verrons si les déclarations d’aujourd’hui tiendront effet, mais rien n’est moins sûr”.

Concrètement, le Sénat a entamé lundi 25 novembre l’examen de la loi de finances 2025 en séance publique. Le Palais du Luxembourg s’est donné jusqu’au 12 décembre pour achever l’intégralité de la loi de finances. Le gouvernement s’est donné jusqu’au 16 décembre pour tenter de trouver un accord au sein de la Commission paritaire (CMP). Le texte devrait ensuite revenir à l’Assemblée nationale, en séance, le 18 décembre. Michel Barnier débuterait probablement le 49.3.

Le gouvernement pourrait tomber juste avant Noël

Une motion de censure pourrait donc être déposée immédiatement. La loi impose un délai de 48 heures avant de la soumettre au vote. Le gouvernement pourrait donc tomber le 20 décembre, soit quelques jours avant Noël. La question sera alors de savoir si Marine Le Pen appuiera sur le bouton de la censure. Votre parti ajoutera-t-il ses voix au PFN ? Le chef de file des députés RN a rappelé au premier ministre sa ligne rouge : la hausse des taxes sur l’électricité.

Que se passe-t-il si une motion de censure obtient la majorité ? « Le gouvernement démissionne et s’occupe de l’actualité », indique Théo Ducharme, professeur de droit public à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Emmanuel Macron peut donc choisir entre trois solutions : reconduire Michel Barnier, choisir un autre Premier ministre ou nommer un Premier ministre défini comme « technique ». De son côté, la loi de finances 2025 serait effectivement rejetée.

La se retrouverait donc sans budget. Toute la dernière séquence serait annulée. Comme si de rien n’était. Maud Bregeon, porte-parole du gouvernement, avait alors assuré “qu’on courait le risque d’un scénario grec”. De leur côté, Éric Coquerel, président de la commission des finances du Palais Bourbon, et Marine Le Pen affirment que “ce ne serait pas le chaos”.

Le vote d’une “loi spéciale”

Dans ce scénario, le gouvernement dit « démissionnaire », jusqu’à la nomination d’un nouveau Premier ministre, devra gérer l’actualité. Comme Gabriel Attal l’a fait cet été. Pour éviter un «shutdown» à l’américaine, il demanderait aux deux assemblées d’approuver une loi de finances spéciale. Selon l’article 45 de la Loi organique relative aux lois financières (LOLF), le gouvernement « demande instamment au Parlement l’autorisation de percevoir les impôts ». Puis «il ouvre des crédits par décret dans la limite du montant de l’année précédente pour des services jugés essentiels et qui permettent à l’État de continuer à fonctionner», explique Théo Ducharme, spécialiste du droit constitutionnel. Les services considérés comme essentiels sont la rémunération des agents publics ou la gestion des services publics. Un scénario qui ne s’est jamais produit en France. «Cela s’est produit aux Pays-Bas en 2021», indique pourtant Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à l’université Sorbonne à Paris 1. L’Espagne aussi y est habituée. Son premier ministre, Pedro Sanchez, l’a fait en 2019, 2020 et 2024.

Le budget de l’année dernière serait alors reporté à l’euro le plus proche. Le gouvernement ne pouvait pas créer de nouveaux impôts. Ce qui fait dire à Marine Le Pen que « la loi de finances 2024 sera à nouveau votée ». Et se réjouir car « les classes populaires et moyennes ont été moins touchées par les impôts ». Par définition, l’État serait contraint d’épargner. «C’est peut-être le seul mérite», plaisante Théo Ducharme, professeur de droit public à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. “Le revers de la médaille, c’est que la confiance des ménages et des entreprises s’effondre, c’est ce que l’histoire montre”, ajoute-t-il. «La vie des Français aurait encore changé», indique la politologue et constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina. “Un Etat qui ne peut plus dépenser un euro ne peut pas prendre d’initiatives, ne peut pas répondre à des urgences comme fournir un budget à l’Ukraine, ou simplement revoir la répartition des collectivités locales ou le montant des crédits”, poursuit-il.

Le principe du « douzième provisoire »

Comment cela fonctionnerait-il à partir de janvier ? « La discussion se poursuivra jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé sur le budget 2025 », explique Anne-Charlène Bezzina, professeur de droit public. En attendant, « il faudrait se mettre d’accord pour diviser le budget en douze tranches, mois par mois, c’est ce qu’on appelle la ‘douzième provisoire’ », poursuit-il. Chaque mois les crédits seraient débloqués par rapport à ceux du même mois de l’année précédente. Un dispositif récurrent sous la Troisième République. De 1871 à 1914, il fut utilisé 22 fois.

Dans ce scénario, il reste un problème. Que se passe-t-il si la « loi spéciale » est rejetée par les parlementaires ? «Nous n’avons pas de précédent», souligne Anne-Charlène Bezzina. « L’idée d’un blocus semble politiquement très sérieuse. Cela n’a aucun objectif politique. Je ne vois pas qui aurait intérêt à ce que cela se produise”, ajoute le constitutionnaliste.

 
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