L’écrivain franco-algérien Kamel Daoud, lauréat du prix Goncourt 2024 pour « Houris », est-il complice d’une violation du secret médical ? S’est-il approprié l’histoire d’un miracle de la guerre civile ? Car l’intrigue qu’il raconte dans son roman serait celle de Saâda Arbane, un Algérien qui vit désormais près d’Oran.
C’est en tout cas ce qu’a déclaré le trentenaire dans une interview accordée à la chaîne privée algérienne One TV quelques jours après la remise du prix Goncourt. Elle explique que le psychiatre qui l’a suivie est l’épouse de Kamel Daoud et qu’avec son mari, ils lui avaient demandé il y a trois ans de pouvoir raconter son histoire dans un roman et qu’elle a refusé à plusieurs reprises.
VidéoL’écrivain Kamel Daoud remporte le prix Goncourt 2024 pour son roman « Houris »
Son avocate, Me Fatima Benbraham, a annoncé que deux plaintes ont été déposées en Algérie contre l’auteur et son épouse, les accusant d’avoir révélé et utilisé le récit d’un patient pour « Houris ». Le premier a été déposé au nom de l’Organisation nationale des victimes du terrorisme”, et “le second au nom de la victime”, a-t-il précisé, assurant que le dépôt remonte au mois d’août, “quelques jours après la publication du document”. livre”, et bien avant la remise du prix Goncourt du roman, début novembre. “Nous ne voulions pas en parler, pour qu’on ne dise pas que nous voulions interrompre la nomination de l’auteur pour le prix”, a-t-il déclaré à l’AFP.
Lundi, l’éditeur de Kamel Daoud, Gallimard, a réagi en dénonçant “des campagnes de diffamation violentes orchestrées par certains médias proches d’un régime dont personne n’ignore la nature”. L’auteur n’a fait aucune déclaration et Gallimard n’a pas répondu à nos demandes. Pour la maison d’édition, l’enjeu est énorme : « Houris » a été imprimé à plus de 300 000 exemplaires et, après le Goncourt, est numéro 1 des ventes, avec plus de 50 000 exemplaires vendus cette semaine.
Quant à l’Académie Goncourt, son président Philippe Claudel nous a indiqué qu’il n’avait « aucune déclaration à faire, n’ayant pas les moyens d’enquêter sur cette affaire ». Interrogé par « Le Parisien », Sabeur Younes, le journaliste algérien qui a interviewé Saâda Arbane, assure qu’il n’a subi aucune pression. « J’ai essayé de faire mon travail du mieux que je pouvais. Je sais que c’est un sujet très sensible et controversé. J’apprécie mon intégrité. Contrairement à ce que dit Gallimard, One TV n’est pas une chaîne pro-pouvoir car sinon nous n’aurions pas invité Kamel Daoud en 2018.”
Il lui explique avoir été contacté par la jeune femme car ils avaient des « contacts en commun ». «Ensuite, j’ai fait mon travail, j’ai vérifié ce qu’elle disait, et j’ai pu voir des preuves tangibles comme les échanges de SMS entre elle et la femme de l’auteur ou le roman. Mineraiqu’il lui a dédié. » Selon lui, c’est en recevant ce livre avec la note de Kamel Daoud qu’elle a souhaité s’exprimer.
Le journaliste raconte avoir rencontré “une femme choquée par cette histoire”. Elle lui dit « qu’elle avait lu un tiers du roman et qu’elle ne pouvait pas continuer, car elle se sentait profondément trahie. Il a lu des choses que seul son psychiatre savait…”. Aujourd’hui, poursuit le journaliste, « il souhaite que la vérité soit rétablie. »