Après le câble endommagé entre la Finlande et l’Allemagne, c’est au tour de celui reliant la Suède et la Lituanie d’être rompu. Le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius s’est exprimé mardi 19 novembre “sabotage” certainement à l’origine des dégâts constatés en quarante-huit heures sur ces deux câbles de télécommunications. Depuis le début de la guerre en Ukraine, les incidents de ce type se sont multipliés.
Selon les experts et les politiques, ces actions, visant notamment les équipements énergétiques et de communication, s’inscrivent dans un contexte de « guerre hybride » entre la Russie et les pays occidentaux. Un autre type de conflit a lieu dans cette vaste zone bordée par plusieurs membres de l’Otan, où Moscou dispose également de points d’entrée. Libération fait le point sur les différentes actions qui illustrent ce conflit latent.
Gazoducs et câbles en ligne de mire
Le plus spectaculaire de ces incidents s’est produit en mer Baltique, avec le sabotage en septembre 2022 des gazoducs russes Nord Stream, qui n’a pas encore été élucidé. Quatre fuites massives de gaz, précédées d’explosions sous-marines, se sont produites le 26 septembre 2022 sur Nord Stream 1 et 2, les gazoducs transportant la majorité du gaz russe vers l’Europe. En août, le Journal de Wall Street avait mis en cause l’ancien chef d’état-major ukrainien, soupçonné d’être impliqué dans le sabotage des oléoducs, tandis que les médias allemands révélaient l’émission par la justice allemande d’un mandat d’arrêt européen contre l’Ukrainien. Une accusation qualifiée de « une absurdité absolue » via Kiev.
L’accident d’octobre 2023 relatif au gazoduc Balticconnector, ouvrage qui relie la Finlande et l’Estonie, reste également une énigme : la connexion a été interrompue le 8 octobre 2023 après la détection d’une fuite qui, selon les autorités finlandaises, était provoquée par des causes extérieures. Des facteurs interviennent, faisant craindre d’éventuels sabotages. Le même mois, un câble sous-marin de télécommunications entre la Suède et l’Estonie a été endommagé. “une force extérieure” ouais “manutention”, selon Stockholm.
Des perturbations GPS qui augmentent les risques de crash d’avion
Depuis que la Russie a lancé son invasion de l’Ukraine, les perturbations des signaux GPS dans cette zone se sont intensifiées. En avril, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont averti que le brouillage généralisé du GPS par la Russie augmentait le risque d’accidents d’avion. Dans le même temps, la compagnie aérienne finlandaise Finnair a suspendu pendant un mois ses vols vers Tartu en Estonie en raison d’interférences GPS, décrites par le ministre estonien des Affaires étrangères. « Attaque hybride russe ».
Pour répondre à cette menace, l’armée britannique a annoncé en août la construction d’une installation présentée comme l’une des plus grandes d’Europe, destinée à préparer ses équipements au risque de brouillage du signal GPS.
Navires espions russes
Navires océanographiques, chalutiers, cargos ou encore yachts : la Russie utilise tous types de navires pour collecter de précieuses informations dans la Baltique et la mer du Nord. En février 2023, la Belgique a annoncé avoir ouvert une enquête sur les activités d’un « navire espion » russe repéré en novembre dans des zones de la mer du Nord où se trouvent des parcs éoliens, des gazoducs sous-marins et des câbles de communication. En avril 2023, la Russie a été accusée par de grandes chaînes de télévision nordiques de mener un programme d’espionnage dans les eaux du nord de l’Europe, utilisant plusieurs dizaines de navires militaires et civils pour détecter d’éventuelles actions de sabotage. Le Kremlin s’est immédiatement retiré “erreurs” et des accusations “sans fondement”.
Le 31 août, la mort du béluga Hvaldimir non loin de Risavika, dans le sud-ouest de la Norvège, a mis fin à bien des fantasmes. Observé pour la première fois en 2019 au large des côtes norvégiennes, le cétacé a suscité l’intérêt des services de renseignement norvégiens, qui ont commencé à enquêter sur son origine. Des enclos ont finalement été repérés près de la ville russe de Mourmansk, où des dauphins, des bélugas et des phoques étaient retenus captifs pour des raisons inconnues. Les autorités norvégiennes ont conclu que Hvaldimir était un animal espion dressé par la Russie. Le Kremlin n’a jamais confirmé.
Les bouées ont été déplacées pour modifier les limites
En mai, les garde-côtes estoniens ont découvert que leurs homologues russes avaient retiré dans la nuit des bouées positionnées sur la rivière Narva, qui sépare les deux pays. Jens Stoltenberg, alors secrétaire général de l’OTAN, affirmait sa solidarité avec l’Estonie, tandis que le chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell, décrivait“inacceptable” cette opération russe de réorganisation des frontières en eaux troubles. L’inquiétude des dirigeants occidentaux ne vient pas de nulle part : au printemps, la Russie a publié un projet de décret prévoyant l’expansion des eaux territoriales du pays en modifiant les frontières de la mer Baltique avec la Finlande et la Lituanie. De quoi mettre en alerte les garde-côtes de la mer Baltique.
Survolez les pays européens à l’aide de drones
En Allemagne, les autorités n’ont guère prêté attention à un drone russe survolant la ville de Brunsbüttel. En août, non loin des rivages de la mer du Nord, plusieurs vols de drones ont été observés plusieurs jours consécutifs au-dessus d’une zone industrielle de la ville. Le drone ne l’est certainement pas “pas là pour observer le magnifique paysage local, mais parce qu’il y a un parc chimique et une installation de stockage de déchets nucléaires à proximité”, C’est ce qu’a ensuite souligné la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock. De quoi motiver l’ouverture d’une enquête « espionnage à des fins de sabotage » par le parquet local.