« Le Panache » de Jennifer Devoldère, une œuvre où le handicap prend une dimension symbolique

« Le Panache » de Jennifer Devoldère, une œuvre où le handicap prend une dimension symbolique
« Le Panache » de Jennifer Devoldère, une œuvre où le handicap prend une dimension symbolique

Jennifer Devoldère, vous aimez mettre en scène des personnages dans des environnements où on ne les imaginerait pas au premier abord, comme cet élève de « Sage homme » ou cet élève qui bégaie dans une compagnie de théâtre. D’où vient ce désir ?

Jennifer Devolère: Je ne l’ai pas perçu comme un anniversaire. C’est vrai que mes personnages se retrouvent souvent à l’opposé de ce qu’on pourrait attendre d’eux dans leur univers. Par exemple, un homme dans un univers féminin ou un personnage qui pousse des coups de gueule sur scène malgré un handicap… Je pense que c’est inconscient. J’aime explorer des personnages en décalage, car cela les pousse à avancer, à évoluer dans un monde auquel ils ne semblent pas appartenir.

Aure Atika, la question du bégaiement est centrale dans « Le Panache ». Avez-vous rencontré des spécialistes du sujet pour jouer la mère de Colin ?

Mariée mansardée : Non, pas particulièrement. J’ai beaucoup parlé avec Joachim Arseguel [qui interprète Colin dans le film, ndlr]qui est vraiment bègue, et avec Jennifer. Cela m’a amenée à m’interroger en tant que mère sur la façon dont on gère un enfant qui bégaie : pose-t-on des questions ouvertes ou fermées ? Essayons-nous d’éviter les situations qui pourraient l’exposer ? Sommes-nous parfois tentés de nous comprendre à contrecœur pour contourner des mots difficiles à prononcer ? Cela affecte également le jeu. Parfois Joachim mettait quelques secondes pour dire un mot, et cela arrêtait le temps, changeant le rythme de la scène. C’est un défi, mais cela ajoute une authenticité précieuse au film. J’ai dû faire face à ces silences et intégrer cet aspect dans mon jeu maternel.

JD : Nous considérons souvent le bégaiement comme un handicap traitable, mais ce n’est pas si simple. Dans la plupart des cas, elle n’est pas liée à une cause psychologique. Le trouble est de nature plus neurologique. Certains peuvent apprendre à le contrôler, mais c’est un accompagnement sur le long terme et même s’il peut diminuer au fil des années, il ne disparaît pas complètement. Pour les personnes qui en souffrent, c’est un véritable voyage.

Le théâtre aide, ici, à retrouver confiance en soi…

JD : Le film est une adaptation de la pièce « Nella pelle di Cirano », qui fut un véritable succès. Il parle d’acceptation de soi, de sa différence et de recherche d’identité. Quand j’ai découvert cela, ces thèmes m’ont parlé. Pourtant, je n’avais pas pensé en particulier au bégaiement avant de voir cette œuvre dans laquelle le handicap prend une dimension symbolique universelle. Nous avons tous vécu des moments où nous butons sur les mots, où nous ne parvenons pas à exprimer nos pensées. Le film touche à quelque chose de profondément humain.

Pensez-vous que le théâtre ou le cinéma peuvent être une véritable thérapie pour certains acteurs ou actrices ?

AA : Absolument oui, le théâtre peut aider à vaincre la timidité. Après, pour le bégaiement, je ne sais pas, mais c’est vrai que ça offre un espace pour exprimer sa fragilité, pour se révéler. Même si l’on compose un personnage, jouer, c’est aussi accepter de montrer une partie de soi. C’est un exercice libérateur, même si tout dépend du contexte et de l’encadrement.

À travers votre personnage, le film aborde également le thème de la croyance et de la religion, puisque cette mère inscrit son fils dans une école privée catholique.

AA : Oui, mais pas pour des raisons religieuses. Cette femme recherche avant tout un cadre qui protégerait son fils du harcèlement scolaire, qu’il a déjà subi ailleurs. Il pense qu’une école privée, avec ses valeurs, pourrait être plus vigilante et bienveillante… Mais le film montre aussi les limites de cette idée.

« Le Panache » interroge de manière critique le fonctionnement de ses écoles, aux règles strictes et rigides, avec le professeur incarné par José Garcia qui se heurte à un mur lorsqu’il tente une autre approche, plus libre, plus artistique…

JD : Je ne dirais pas que c’est une critique. L’éducation est une matière complexe et les écoles privées, comme les écoles catholiques, font partie du paysage éducatif en . Ils ont des forces et des faiblesses. Le film montre simplement que dans ces structures, les parents ont souvent une influence extrêmement forte, ce qui peut créer des tensions. Pour ma part, j’espère que les choses pourront évoluer mais, même au risque de me répéter, je n’ai pas voulu formuler de critique directe. C’est un contexte qui s’applique également à d’autres types d’écoles. Chaque institution a ses règles et sa résistance au changement. Rien n’est complètement noir ou blanc.

Notre cirque

Histoire
Colin (Joachim Arseguel), 14 ans, entre dans une nouvelle école et panique : comment surmonter tout ça quand, comme lui, on bégaie ? Sa rencontre avec M. Devarseau (José Garcia), professeur de français charismatique, va le pousser à affronter ses peurs et à sortir de son isolement. Désormais Colin a un groupe d’amis et un projet : monter sur scène pour jouer Cyrano devant toute l’école…

Notre avis
Adaptation d’une œuvre théâtrale à succès, « Le Panache » ne souffre pas du syndrome du théâtre filmé… ce qui ne le rend pas parfait. Derrière la caméra, Jennifer Devoldère s’efforce de montrer le combat de cet adolescent pour surmonter son handicap et ne néglige pas de montrer le point de vue de son entourage, de sa mère désemparée, incarnée par Aure Atika, à ses camarades de classe qui apprendront à l’accepter. . tel quel.
Une belle histoire racontée de manière télévisuelle très sage, sans prendre de risques. Le message de tolérance est soutenu au point que le film s’enlise dans le didactisme, comme cela s’était déjà produit avec “Le Sage”, le précédent film du réalisateur…
On salue cependant les performances du jeune Joachim Arseguel – également bègue – et de José Garcia en professeur essayant de faire bouger les choses au sein d’une école privée catholique, aux pratiques bien trop rigides. Un choc intéressant entre l’ancien et le nouveau monde, mais qui méritait encore une fois d’être approfondi pour donner plus de panache à ce “Panache” parfois hésitant et donc loin du “Cercle des poètes disparus”, dont on ressent parfois l’influence, définitivement. trop lourd.

> Par Jennifer Devoldère (France). Avec Joachim Arseguel, José Garcia, Aure Atika… Comédie dramatique. 1h33.

Aura Atika. (Photo de SND Vertigo Productions)
 
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