Pénétrer ces deux volumes des œuvres absolues de Baudelaire, dans cette nouvelle édition, permet d’explorer un canyon littéraire et un Kamtchatka poétique qui s’ouvrait soudain sur l’inconnu.
Les œuvres restent spectaculaires avec leurs colonnes (dont bien sûr Les fleurs de la mamanl) et leurs frises. De la poésie majeure y existe, des poèmes en prose (Ah les TVilles parisiennes !), art; un journal et une série de découvertes.
Cette œuvre esthétique et existentielle reste un sommet. Ce temps reste décisif et immortel. La voix de Baudelaire domine la plus pénétrante par l’opinion irréfutable qu’il s’est forgée.
Si la réalité s’est constituée pour le poète, il s’est battu contre elle, et aussi contre lui-même. A tel point que son œuvre reste plus profonde que son néant qu’il a parfois vécu. Mais il faut toujours revenir à le loufoque inoffensif » reprochait à tous ceux qui manquaient l’essentiel. Il convient donc de chercher dans l’œuvre ce qui est irremplaçable et qui s’est libéré du boue par les nouveaux moyens de l’écriture et son illusion pour la transformer en or.
Cette alchimie demeure car elle n’existe pas si haut dans un tel ébranlement de la conscience et du regard. C’est cela qu’il faut toujours demander à cette chose très ancienne mais la plus moderne et la plus récente : la poésie.
Baudelaire refuse toutes les platitudes et toutes les concessions.
Jean-Paul Gavard-Perret
Charles Baudelaire, Œuvres complètes I et II, édition publiée sous la direction d’André Guyaux et Andrea Schellino, préface d’Antoine Compagnon, coll. Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, mai 2024, 150 €
