nous avons essayé l’incroyable 4×4 chinois de 1200 ch

Un intérieur luxueux, digne d’une Bentley

A bord, on nage dans un océan de cuir. Ici aussi, l’inspiration semble venir d’Angleterre, mais cette fois le design n’est pas sans rappeler celui de la Bentley Bentayga. Les peaux dégagent des parfums délicats et les placages de bois précieux (sapelli) sont abondants. L’assemblage et la finition sont impeccables. Il s’agit d’un triple écran qui est placé devant les yeux des occupants. Celui central, arrondi, surplombe les comptoirs et celui placé devant le passager, donnant l’impression d’une très longue dalle. La définition de ces écrans OLED est impeccable, mais leur surface satinée, qui rappelle les produits électroniques bon marché, se démarque dans cet environnement luxueux.

A bord, les matériaux n’ont rien à envier aux marques de luxe les plus établies. Crédit : Nicolas Meunier/Défis

Tous les modèles de la marque Yangwang disposent d’une suspension hydraulique particulièrement sophistiquée. Baptisée DiSus-P, elle reprend le principe de la célèbre suspension Citroën Hydractive, à laquelle s’ajoutent une caméra binoculaire et un lidar, capables de lire le relief de la route. Ainsi, la gestion électronique peut s’adapter en temps réel pour filtrer les irrégularités du bitume de la manière la plus efficace possible. Sur la supercar U9, la direction autorise même d’autres fantasmes : la voiture peut sauter sur place, rouler sur trois roues ou réaliser une chorégraphie.

Un moteur électrique pour chaque roue

Le Yangwang U8 bénéficie d’un mécanisme propre à cette marque de luxe, baptisé e4. Ce numéro révèle la nature même du moteur, avec notamment un moteur électrique pour chaque roue. Cela laisse des possibilités infinies : la répartition du couple roue par roue peut transfigurer le comportement routier, en améliorant la traction, ou en utilisant une répartition asymétrique, qui aide la voiture à pivoter dans les virages.

Le moteur essence quatre cylindres de 2,0 litres fait office de prolongateur d’autonomie. Il fonctionne comme un générateur et n’est jamais connecté aux roues. Crédit : Yangwang

L’une des capacités les plus spectaculaires permises par cette architecture est la fonction « tank turn » du Yangwang U8. En tournant les roues dans des sens opposés à droite et à gauche (comme les chenilles d’un char), ce 4×4 monumental peut littéralement tourner sur lui-même. C’est une caractéristique partagée avec la toute récente Mercedes-Benz G 580 EQ, toute électrique et également équipée d’un moteur par roue. Mais là où l’Allemand peut réaliser sa pirouette en seulement 7 secondes, nous avons réalisé un chrono de 55 secondes avec le Yangwang U8. Le 4×4 chinois semble souffrir de la manœuvre : la roue arrière extérieure a pris un carrossage positif inquiétant sous l’influence de la force latérale. Pourtant, le fonctionnement est spectaculaire… Et peut devenir incontrôlable en tout-terrain.

L’architecture technique du Yangwang U8, avec un moteur par roue, permet d’imaginer les fantasmes tout-terrain les plus fous. Malheureusement, l’électronique agit de manière brutale, ce qui rend les manœuvres en terrain difficile particulièrement difficiles. Crédit : Nicolas Meunier/Défis

Même si nous n’avons pas pu emmener le Yangwang U8 sur les terrains les plus difficiles, nous avons eu droit à une démonstration – en tant que passager – de ses capacités de franchissement, sur un parcours d’obstacles métalliques. Grâce à un couple de 320 Nm par moteur, ce 4×4 lourd peut gravir des pentes de 45° (100 %). Notre pilote s’est même amusé à arrêter l’engin dans une pente, avant de repartir, avec juste un léger patinage des roues avant. Impressionnant.

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Le tout est couplé à une gestion électronique, dotée de plusieurs modes de conduite, dans l’esprit du système Terrain Response de Land Rover. Sur ce point, l’U8 a quelques progrès à faire : le pilote automatique, censé maintenir en permanence une vitesse basse en terrain difficile, manque de subtilité. Il agit parfois avec brutalité lors du franchissement des ponts, lorsqu’une roue se déchaîne. Cela peut déstabiliser la voiture d’une manière peu rassurante. Il est préférable de contrôler la voiture « à l’ancienne », en utilisant l’accélérateur, pour plus de fluidité.

De vraies sensations 4×4, des performances sportives

C’est sur un circuit de la banlieue de Guangzhou que nous avons pu prendre le volant du Yangwang U8. Comme dans un Land Rover Defender ou une Mercedes-Benz Classe G, vous êtes assis très haut. Le Yangwang U8 est encombrant de par sa taille mais aussi de par sa masse de 3 460 kg. Comme le Hummer EV, il devra compter sur la dérogation européenne, qui autorise une dérogation d’une tonne sur la batterie, pour ne pas exiger de permis poids lourd.

Le Yangwang U8 présente des performances intéressantes, et une personnalité radicalement différente selon le mode de conduite choisi.

Le Yangwang U8 présente des performances intéressantes, et une personnalité radicalement différente selon le mode de conduite choisi. Crédit : Yangwang

Au volant, on n’a cependant pas l’impression de conduire un véhicule aussi lourd. Déjà parce que la puissance est généreuse. Ensemble, les quatre moteurs peuvent développer jusqu’à 1 196 ch. La moindre pression du pied droit se traduit par une poussée vers l’avant confortable… Mais pas aussi impressionnante qu’on aurait pu l’imaginer. Le poids a certainement son influence. Mais le capteur de puissance sur le tableau de bord plafonnait à 440 kW (598 ch) lors de notre essai… Seulement la moitié de ce qui est promis sur la fiche technique. C’est pourquoi nous n’avons pas eu l’impression de vivre des accélérations dignes d’une Porsche 911… Alors que le 0 à 100 km/h est annoncé en 3,6 secondes !

Puissance réduite de moitié après quelques tours de circuit

La gestion thermique de la batterie peut en être la cause. Comme tous les modèles de la gamme BYD, le Yangwang U8 utilise des cellules LFP « Blade » qui font la fierté du constructeur. Organisées en bandes, directement placées dans le cadre en échelle séparé du corps, elles parviennent à offrir une densité similaire aux batteries NMC concurrentes. Mais les éléments, très proches les uns des autres, rendent difficile l’évacuation de la chaleur. Nous avons observé à plusieurs reprises, lors de nos tests sur les modèles du constructeur, des pertes de puissance (à l’accélération ou en charge) liées à ce facteur. Notre modèle d’essai avait déjà effectué quelques tours de circuit avant que nous prenions le volant, cela pourrait être une explication.

Le Yangwang U8 utilise des écrans OLED à la définition impeccable. Mais leur revêtement satiné est en décalage avec l'aspect luxueux de l'intérieur.

Le Yangwang U8 utilise des écrans OLED à la définition impeccable. Mais leur revêtement satiné est en décalage avec l’aspect luxueux de l’intérieur. Crédit : Nicolas Meunier/Défis

Un autre facteur peut être le niveau de charge de la batterie. Contrairement à la plupart des modèles BYD connus en Europe, le Yangwang U8 n’est pas 100 % électrique. Sa batterie est limitée à une capacité de 49 kWh, pour une autonomie de 145 km. Au-delà, un prolongateur d’autonomie (un moteur essence quatre cylindres turbocompressé de 2,0 litres) prend le relais. Il n’entraîne jamais les roues.

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Lorsque nous avons pris le volant du Yangwang U8, il n’était plus possible d’utiliser le mode électrique, le niveau de batterie étant trop faible (17 %). Sur la plupart des hybrides rechargeables du marché, ce fond de batterie, associé à l’action du moteur thermique, est suffisant pour développer une puissance maximale, au moins pendant quelques accélérations successives. Cela ne semble pas être le cas chez BYD… Que ce soit sur ce Yangwang U8 ou sur les Seal 05 et Seal U DM-i testés le même jour.

Comportement surprenant, mais réglage perfectible

Si les performances n’ont rien à voir avec celles d’une Tesla Model X Plaid, l’architecture mécanique du Yangwang U8 a révélé toutes ses promesses sur circuit. En mode Confort, cet imposant SUV affiche un comportement serein et un confort amorti. Sur piste mouillée, le sous-virage trahit la masse colossale de l’engin, qui reste rassurant en toutes circonstances. Mais dès qu’on sélectionne le mode Sport, ça se transforme ! Du coup, le Yangwang U8 semble avoir perdu au moins une tonne. A l’accélération, il pivote instantanément… avec des réactions parfois brutales. Même avec l’ESP engagé, il sort des virages serrés en crabe, ce qui nécessite un contre-braquage pour maintenir le cap.

Cette molette située sur le volant permet de sélectionner les différents modes de conduite.

Cette molette située sur le volant permet de sélectionner les différents modes de conduite. Crédit : Nicolas Meunier/Défis

Avec une suspension relativement souple, qui impose un roulis sensible, la conduite sur circuit mouillé ressemble à un rodéo aussi amusant que surréaliste. Il faudra accélérer très progressivement pour ne pas se lancer dans des glissades désordonnées. Le potentiel est énorme, le développement mériterait plus de finesse. Il y a plus de dix ans, nous roulions au Japon avec une Honda Legend hybride, qui disposait d’un moteur sur chaque roue arrière, avec le même principe de répartition vectorielle du couple. Parfaitement calibrée, cette berline était véritablement étonnante. Avec autant de technologie et un peu plus de travail, le Yangwang U8 pourrait probablement faire encore mieux.

Yangwang U8 doit s’améliorer pour correspondre au Range Rover

Ce 4×4 de luxe donne un aperçu assez intéressant de l’état de l’art de la technologie automobile en Chine. Doté de moyens techniques colossaux (90 000 ingénieurs), BYD ne recule devant aucune complexité.

Malgré un potentiel évident, le Yangwang U8 doit progresser pour atteindre le niveau d'un Range Rover.

Malgré un potentiel évident, le Yangwang U8 doit progresser pour atteindre le niveau d’un Range Rover. Crédit : Yangwang

Certes, le manque de mise au point ne permet pas au Yangwang U8 d’afficher la même excellence qu’un Range Rover. Mais il est certain qu’une fois l’expérience acquise sur ces plateformes totalement inédites, le géant chinois saura se placer au sommet de la hiérarchie. Cela ne prendra probablement que quelques années. Même s’il est commercialisé tel quel en Europe (ce qui devrait être le cas en 2025), le Yangwang U8 se révèle déjà aussi spectaculaire qu’attachant.

 
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