Les médias américains ont révélé ce lundi que Donald Trump avait eu un appel téléphonique avec Vladimir Poutine.
Une information démentie par le Kremlin, dont l’opinion sur le nouveau président a considérablement changé.
Histoire de la propagande d’État entre cynisme et fermeté.
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Élections présidentielles américaines
Il était au centre d’un complot visant à élire Trump en 2016. Huit ans plus tard, Vladimir Poutine n’a certainement pas la même approche. Même si le candidat républicain a remporté l’élection présidentielle le 5 novembre, aucun message de félicitations n’est arrivé de Moscou. Pire encore, le Kremlin a démenti lundi 11 novembre toute conversation entre les deux dirigeants. Dans les émissions de propagande russe traditionnelle, les positions sont beaucoup plus sceptiques qu’il y a huit ans.
Donald Trump considéré comme le « destructeur » des Etats-Unis
Évidemment, la défaite de Kamala Harris a pris ces acteurs par surprise. Selon plusieurs informations publiées par la presse indépendante russe, les milieux proches du pouvoir attendaient le candidat démocrate. (nouvelle fenêtre) gagne avec une très petite marge. Assez subtil pour que le camp MAGA (« Make America Great Again ») remette en question l’authenticité des résultats. Les autorités de Moscou espéraient ainsi que des émeutes éclateraient et que le pays serait déstabilisé. Méduse (nouvelle fenêtre).
Une stratégie qui se reflète dans les tentatives d’ingérence observées lors des élections. Comme nous vous l’avons expliqué dans cet article (nouvelle fenêtre)les opérations menées depuis la Russie visaient à saper la confiance américaine dans le processus électoral. Par ailleurs, les quelques manifestations de partisans de la démocratie qui ont éclaté au lendemain des élections ont été largement amplifiées sur les chaînes russes, certains médias citant « Des milliers de migrants descendent dans la rue ».
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Une division de la société américaine que même le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères a voulu accentuer. Dans une interview avec l’agence d’État RIA Novosti (nouvelle fenêtre) le 10 novembre dernier, Maria Zakharova estimait que Donald Trump devait être reconnu pour ses capacités « percevoir les États-Unis comme une société malade ».
Mais c’est la seule qualité que ces rumeurs confèrent au nouveau président des Etats-Unis. « Nous ne nous faisons aucune illusion sur le président américain nouvellement élu »le ministère des Affaires étrangères a immédiatement réagi dans un communiqué. «L’élite politique au pouvoir aux États-Unis, quelle que soit son appartenance à un parti, adhère à des attitudes anti-russes et à la ligne du ‘contenir Moscou’.» Un seul objectif pour ces relais du Kremlin : défendre « des intérêts nationaux strictement russes ».
CHECK – Qui sont ces « journalistes occidentaux », relais privilégiés du Kremlin ?Source: Informations TF1
Quitte à se moquer de Donald Trump. Alors que les Etats-Unis ont évoqué la possibilité d’un appel téléphonique entre les deux hommes, cette hypothèse a fait rire les invités de la chaîne publique Rossiya-1, selon des extraits traduits par le collectif « Russian Media Monitor ». (nouvelle fenêtre). « Ce serait bien s’il [Trump] appelle Vladimir Poutine et ne répond pas”par exemple, le présentateur Ivan Trouchkine a plaisanté sur NTV, une chaîne privée du groupe Gazprom.
Sur le plateau, le milliardaire se transforme presque en idiot utile. “Je suis pour Trump, parce que c’est un destructeur”a notamment lancé l’expérimenté Andrey Sidorov. Devant un présentateur particulièrement amusé, celui qui a toujours défendu l’invasion de l’Ukraine assure que la victoire des Républicains entraînera “la guerre civile” aux États-Unis. « Notre adversaire géopolitique s’effondrera sans même que nous utilisions un missile. » “Trump fait tout pour détruire l’Amérique”confirme le propagandiste en chef Vladimir Soloviev (nouvelle fenêtre).
Des propos sarcastiques, accompagnés de vrais moments de moquerie. Alors que la victoire de Donald Trump venait d’être officialisée, Rossiya-1 a tenu à saluer le retour de Melania Trump à la Maison Blanche. Devant un public qui peinait à contenir les rires, la chaîne a diffusé un montage de toutes les photos nues de la future Première dame.
Un dénigrement qui s’explique par un net changement par rapport à 2016. Les propagandistes n’ont désormais qu’un seul message à faire passer : le leader, c’est Vladimir Poutine. « Grâce à nos succès sur le champ de bataille, en économie (nouvelle fenêtre) et notre capacité à maintenir l’unité du pays, nous sommes désormais en position de force.», résume par exemple Dmitri Evstafiev, chroniqueur à RT, la chaîne d’information russe financée par l’État.
Il en va de même pour Olga Skabeeva – « la poupée de fer de Poutine » (nouvelle fenêtre) – qui, dans son émission, a assuré que ni la Russie ni la Corée du Nord n’étaient intéressées par des négociations avec les États-Unis. “La position de Moscou a changé” insiste-t-il tout au long de son discours, rappelant celui de Donald Trump il y a huit ans « léché les bottes de Poutine ».
Nous nous dirigeons vers la victoire, sans l’aide d’aucun Américain
Olga Skabeeva, présentatrice à la télévision d’État russe
Pour elle, comme pour d’autres représentants du Kremlin, la question centrale reste la guerre en Ukraine. Et c’est donc plein d’ironie ce que l’intéressé a remarqué ce jeudi. (nouvelle fenêtre) d’où le plan promu par Donald Trump «Résoudre la guerre en Ukraine en 24 heures» était voué à l’échec : « Pendant ce temps, nous progressons seuls vers la victoire, sans l’aide d’aucun Américain. »
Contrairement à 2016, où certains étaient très enthousiastes à l’idée de voir le milliardaire républicain arriver à la Maison Blanche, cette fois-ci, les propagandistes russes tempèrent clairement les attentes. L’idée est de ne pas tirer de conclusions sur les motivations du nouveau président américain et de continuer à soutenir le discours selon lequel la Russie n’est pas isolée, mais à la tête d’une « coalition anti-occidentale ». Dans les colonnes de Méduseune Source proche du Kremlin résume : «Ce n’est pas le Poutine qu’il était en 2016. Les compromis [avec l’Occident] il ne s’en soucie plus.”